L'activité textile fait partie de l'histoire du Roannais depuis le Moyen-Âge. Aujourd'hui encore, des entreprises perpétuent ce savoir-faire industriel dans un périmètre très serré autour de Roanne. L'inflation les fragilise, mais le réseau s'organise et se maintient à flot.
Le département de la Loire a une culture textile très importante. Le savoir-faire s'est transmis au fil des générations. Les entreprises ont su se remettre en question et évoluer pour se maintenir à la pointe. A Roanne, berceau du tissage, elles ont fait le pari du 100% local et travaillent de concert pour afficher des prix compétitifs sans sacrifier la qualité.
Maitriser les coûts
Malgré la concurrence internationale, l'art du textile perdure et se renouvelle à Charlieu. Depuis 11 ans, Létol fabrique des étoles 100% ligériennes. Couper, coudre, plier, aujourd'hui ce sont 6 personnes qui vivent de cette activité. L'entreprise a fait le choix du local et de la qualité, dans un rayon de 20 kilomètres. Un pari qui paye.
En 2022, 46 000 étoles sont passées entre les mains de ces couturières. Mais après une décennie d'existence, l'entreprise doit faire face à un nouveau défi : la flambée des prix. "On a été obligé d'augmenter un peu la part sur nos étoles pour nos clients, mais on a pris le strict minimum. C'était un enjeu vis-à-vis de nos revendeurs. On a décidé de prendre une grande partie à notre charge pour que le commerce puisse encore se faire" explique Sophie Badot, Pdg de Létol.
C'est un équilibre à trouver pour ne pas trop augmenter les prix, tout en payant les factures.
Investir pour économiser l'énergie et l'eau
20 kilomètres plus loin, Véronique Jacquet, Pdg de Teintures et Apprêts de la Trambouse (TAT), a les mêmes préoccupations. C'est elle qui fournit les bobines de fil à Létol. Dans le laboratoire, sont concoctées les recettes qui permettent de donner leur couleur unique aux fils. Une fois la teinte validée sur l'échantillon, direction les immenses cuves de l'usine.
Ici aussi, les défis sont nombreux : une facture d'électricité multipliée par 4 en deux ans et des difficultés d'approvisionnement. "Ponctuellement, on risque une pénurie de colorant, des manques d'eau sur certaines périodes de l'année, des éventuelles coupures d'électricité ou de gaz. Il faut se préparer à toutes les éventualités et être prêts à avoir des plans B au fur et à mesure des problèmes", philosophe Véronique Jacquet. Face à toutes ces augmentations, l'entreprise a choisi d'investir dans du matériel et de développer des process plus économes. "En 20 ans, nous avons divisé la consommation d'eau par 10".
Autre actrice de ce circuit court : Sophie Muller (Artitex Sophy). Depuis 2015, elle récupère les étoles pour les traiter dans son local situé lui aussi près de Roanne. Les étoles sont lavées pour débarrasser la matière de tous les produits appliqués pour faciliter le tissage. Après le passage en machine, les étoles sont pliées à la main, une par une, puis regroupées en ballot pour la livraison.
Sophie Muller a choisi les petites quantités, du haut de gamme, pour pouvoir travailler seule. Pour elle aussi, les charges sont en perpétuelle évolution. Elles pèsent de plus en plus lourd dans ses dépenses. "C'est tenable, mais c'est compliqué". L'équation tiendra tant qu'il lui est possible de répercuter les augmentations sur ses prix de vente. Travailler dans le luxe lui donne un peu plus de latitude.
C'est donc toute une chaîne d'entreprise qui travaille en partenariat pour maintenir la production en local et pérenniser des emplois et un savoir-faire qui rayonne dans le monde entier.