Les nappes phréatiques, mises à rude épreuve par la sécheresse ressentie tout au long de cette année, se rechargent peu à peu... Mais en dépit des fortes pluies des dernières semaines, certains niveaux restent préoccupants : très bas dans le département de la Loire et bas dans celui du Rhône.
D'après la carte mise à jour quotidiennement sur le site info-sécheresse.fr, les nappes phréatiques du département de la Drôme ont retrouvé une situation normale, avec un niveau conforme à la moyenne en cette période de l'année. Il est en tout autrement dans le Rhône et surtout la Loire malgré les récentes précipitations.
Trop tôt pour estimer les précipitations récentes
"Il est trop tôt pour estimer l’influence des précipitations récentes sur les aquifères du secteur Isère - Rhône - Loire, et ce pour plusieurs raisons", explique François Castres de Paulet, hydrogéologue au Bureau de Recherches Géologiques et Minières.
"Les pluies ne sont pas réparties de façon homogène sur ce territoire (influence des vents, du relief, etc), et notamment les aquifères ne « réagissent » pas tous avec la même vitesse à chaque événement pluvieux", poursuit-il. La nature des roches traversées au moment de l'infiltration joue également sur la capacité de prendre en compte les dernières précipitations.
Un déficit de précipitation dans la Loire et concentré sur les reliefs
Dans la Loire, le constat est inquiétant : le niveau des nappes phréatiques est très bas, une situation comme il ne s'en produit en moyenne que tous les 10 ans.
Le déficit pluviométrique de cet hiver explique en partie ce phénomène : -23% en novembre 2022, -32% en janvier 2023, -67% en février, ou encore -22% en avril. Ce sont ainsi 9,3 mm qui sont tombés en février 2023, contre 28 mm en moyenne sur la période. Cette situation a même conduit 29 communes à devoir prendre des mesures de restriction d'eau en avril 2023.
Ce constat est d'autant plus alarmant quand on sait que l'hiver est la période charnière pour le remplissage des nappes. "À partir de l’automne, les précipitations sont plus importantes et plus fréquentes", explique François Castres de Paulet. "Les températures sont plus faibles, il y a donc moins d’évaporation et les besoins des végétaux sont moindres", poursuit-il.
De plus, les pluies ne sont pas tombées de manière homogène sur le territoire. Au mois d'octobre de cette année par exemple, "les cumuls de pluie ont été plus importants sur les reliefs de la région (Cévennes ardéchoises, massifs des Alpes et du Jura…) que sur les secteurs de plus faible altitude et/ou de plaine comme la vallée de la Loire et la partie occidentale du département du Rhône" poursuit l'hydrogéologue.
Situation similaire dans le Rhône
Le Rhône est dans une situation similaire de la Loire, bien que moins préoccupante que dans le département voisin. Le niveau des nappes reste bas, mais cette fois-ci pour une situation que l'on rencontre en moyenne une fois tous les cinq ans d'après les statistiques.
Les 37 mm en janvier et les 3 mm en février tombés sur le Rhône (des niveaux historiquement bas) continuent de peser sur l'état des nappes. À titre de comparaison, le cumul de précipitations en 2023 s'élève à 614,8 mm ; la moyenne annuelle de 820,8 mm enregistrée entre 1991 et 2020 sera difficile à rattraper d'ici au 31 décembre.
La situation a même conduit les autorités à lancer des appels pour économiser l'eau.
Un bon mois d'octobre
On peut tout de même rester optimiste : au mois d'octobre, des pluies sont tombées abondamment sur le Rhône et la Loire. Les relevés faits par Météo France à la station de Lyon-Bron indiquent que 150 mm ont été mesurés en octobre, c'est le record de l'année en cours. Sur Saint-Etienne, il est tombé 76,5 mm soit 7% de plus qu'en moyenne sur la période.
L'hydrogéologue François Castres de Paulet tempère tout de même : "la période de recharge vient seulement de commencer et se terminera probablement au printemps ou au début de l’été 2024. La recharge des aquifères nécessite généralement des précipitations régulières."