Scandale de la sextape à Saint-Etienne, un an après : ce que l'affaire révèle de Gaël Perdriau

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Un maire dans la tourmente depuis août 2022. ©France Télévisions

Une vidéo intime, un chantage, des élus ... Tout commence en août 2022 par un article de Mediapart. Une sulfureuse affaire de chantage à la vidéo éclabousse alors Gaël Perdriau (ex-LR) maire de Saint-Etienne et plusieurs de ses conseillers. Qu'a révélé l'affaire de cet homme politique, étoile montante de la droite ? Portrait d'un ambitieux un an après les révélations du site d'information en ligne.

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Le maire de Saint-Etienne entend rester en poste. "Pour avoir pris connaissance du dossier, je suis plus déterminé que jamais", a assuré l'élu stéphanois à l'issue d'un conseil municipal, le 30 mai dernier. Malgré ces 12 derniers mois passés dans la tourmente, Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne depuis 2014, a encaissé chaque coup et chaque accusation après les révélations. Malgré les nombreux appels à la démission, Gaël Perdriau a cependant toujours refusé de renoncer à son mandat de maire. Retour sur son parcours. 

Ténacité et ambition

Un homme "tenace", "qui crée de l'adhésion", "qui ne doute de rien", "quelqu'un qui doit toujours avoir le dernier mot", "quelqu'un d'exigeant, d'extrêmement exigeant", "quelqu'un qui veut marquer son territoire". Les témoignages sont unanimes à propos de l'élu ligérien. Au-delà de sa réputation d'homme fonceur, Gaël Perdriau est aussi décrit comme un ambitieux. Sa carrière politique démarre sur les chapeaux de roues : à seulement 22 ans, il devient conseiller municipal dans la ville où il vient de finir ses études de commerce. 

"On sentait qu'à travers ses interventions, il avait vraiment envie d'exister. C'est clair. Il était de ceux qui voulaient faire de la politique et qui étaient actifs dans le groupe de la majorité," se souvient Michel Thiollière, ancien maire radical de Saint-Etienne, de 1995 à 2001.

Mais le Stéphanois d'adoption ne sera jamais adjoint, car la ville échappe à la droite stéphanoise en 2008. À l'origine de cet échec : la candidature dissidente de Gilles Artigues. Gaël Perdriau passe alors six ans dans l'opposition. Une présence remarquée et qui en dit long sur sa personnalité. "Il intervenait assez souvent sans être le chef de file de l'opposition. Il ne l'était pas pendant longtemps. Il se distinguait surtout par une agressivité et cette opposition systématique, de façon à apparaître un jour comme le principal opposant", évoque Maurice Vincent, ancien maire PS de Saint-Etienne de 2008 à 2014. 

Candidature surprise 

Mais son ambition prendra tout le monde de court lorsqu'il déclare sa candidature au poste de maire de Saint-Etienne, un an avant les municipales de 2014. "Je pense qu'il a dû en parler à une dizaine de personnes autour de lui", avance Dominique Goubatian, journaliste politique au Progrès. Même dans son parti, la surprise semble totale, "mais après son parti l'a suivi. Les cadres l'ont suivi, mais ce n'a pas été une promenade de santé", poursuit le journaliste.

Car pour reprendre l'Hôtel de Ville, il fallait faire l'union avec Gilles Artigues. Ensemble, ils partent ainsi à la conquête de Saint-Etienne en mars 2014. Une union de façade ? "Il y avait de la méfiance. Ce qui s'est passé en 2008 ne peut pas créer de la sérénité. Mais on arrive tout de même à cet accord. Un accord qui est respecté à la lettre par Gilles Artigues", rappelle Dominique Goubatian. 

Grâce à cette union et une campagne offensive, Gaël Perdriau devient maire de Saint-Etienne à l'âge de 41 ans. Gilles Artigues devient son premier adjoint.

 Ambition nationale déçue

Exalté par la victoire, Gaël Perdriau s'entoure de ceux qui l'ont aidé à remporter la ville : son directeur de campagne, Pierre Gauttieri est nommé directeur de cabinet. "Je pense que la rencontre avec celui qui allait devenir son directeur de cabinet en 2014 a été la rencontre de deux êtres avec un ego surdimensionné, qui étaient pétris d'ambition. Les deux se sont entraînés. À un moment, Gaël Perdriau s'est rêvé, s'est fantasmé une ambition nationale", explique Pierrick Courbon, conseiller municipal PS d'opposition à la mairie de Saint-Etienne. Mais le maire de Saint-Etienne ne deviendra pas ministre, malgré les tractations de son directeur de cabinet.

Avec un sens de la formule aiguisé, Gaël Perdriau rejoint l'exécutif des Républicains et écume alors les médias nationaux. "Il fait des coups politiques, des coups médiatiques. Il est capable d'agiter un sujet pour faire partir les gens sur ce sujet et en faire oublier un autre", rapporte Olivier Longeon, conseiller municipal EELV d'opposition à la mairie de Saint-Etienne. 

La grogne monte à la mairie

Gaël Perdriau a-t-il usé de stratégie jusqu'à déplaire dans son propre camp ? En parallèle, l'ambiance à la mairie se tend aussi, les cadres valsent. En quatre ans, 45 responsables démissionnent. "Tout le monde a vu qu'il y avait une concentration extrêmement forte autour du maire et de son cabinet", assure l'ancien maire PS Maurice Vincent. "On savait que les élus n'étaient pas très contents, que les services étaient mécontents, ça s'entendait en ville. On pouvait imaginer que ça poserait des problèmes un jour", ajoute Michel Thiollière. "Quand on veut tout contrôler, on finit par se méfier de tout le monde, y compris de son ombre et peut-être par s'inventer de faux adversaires et peut-être de faux concurrents", professe Maurice Vincent. 

Sextape : le scandale

En août 2022, une enquête de Mediapart révèle que le maire de Saint-Étienne ainsi que plusieurs membres de son entourage, dont son ancien directeur de cabinet, auraient utilisé une vidéo intime à des fins de chantage. L'élu visé n'est autre que Gilles Artigues, son premier adjoint et rival politique. Le conservateur aurait été filmé à son insu avec un escort-boy dans une chambre d'hôtel à Paris. Le chantage durerait depuis des années : la vidéo intime aurait été tournée en janvier 2015.
Éclaboussé par l'affaire, Gaël Perdriau, pressenti pour prendre la tête des LR, est exclu de son parti. L'élu qui s'est mis en retrait de la présidence de la Métropole, est néanmoins resté à la tête de la ville. L'édile a toujours nié ces accusations et a même porté plainte pour "dénonciation calomnieuse" après la publication de l'enquête de Mediapart. 

L'homme de l'ombre

Depuis la révélation de l'affaire, les langues se délient. Des dissensions autour de la forte personnalité du bras droit du maire sont évoquées. Pierre Gauttieri fait peur. Certains parlent de crises de colère et de scènes d'humiliation devant un maire qui aurait laissé faire. "Gaël Perdriau pense qu'il a besoin d'un complément d'autorité qui était Pierre Gauttieri. C'est juste ça. Il y a un manque de confiance chez Gaël Perdriau qui a laissé trop de marge de manœuvre, sans doute à son directeur de cabinet. C'est une évidence," confie Marc Chassaubéné, adjoint à la culture à la mairie de Saint-Etienne.

Contraint par les révélations de Mediapart sur l'affaire de la vidéo intime, Gaël Perdriau finit par limoger Pierre Gauttieri, mais avec une prime de licenciement. Comme pour dire à ses détracteurs qu'il reste le patron de la mairie.

Quatre mises en examen

En avril dernier, les quatre protagonistes présumés de cette affaire, dite du chantage à la vidéo intime, ont été mis en examen. Pierre Gauttieri l'a été en même temps que Gaël Perdriau, suspecté de "chantage". Un ancien adjoint municipal, Samy Kéfi-Jérôme et l'ex-compagnon de ce dernier, Gilles Rossary-Lenglet, sont également impliqués.
Ancien adjoint à l'éducation, Samy Kéfi-Jérôme a démissionné de ses mandats de conseiller municipal et conseiller métropolitain en septembre 2022. L'homme qui a révélé l'affaire à Mediapart, Gilles Rossary-Lenglet avait affirmé dans une confession avoir participé à ce "barbouzage de mœurs" à la demande du maire et de son entourage, dans le but de neutraliser politiquement Gilles Artigues.

Toujours en poste, toujours au travail, dans son bureau ou sur le terrain, Gaël Perdriau tient bon malgré sa mise en examen. Il a refusé de s'exprimer dans ce reportage, mais a confié attendre avec impatience son procès.

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