Sabine est en juillet 1972 à l'hôpital Trousseau de Saint-Etienne. Une naissance sous X. Aujourd'hui la jeune quinqua est à la recherche de sa mère biologique. Pour tenter de la retrouver, elle a lancé un appel via les réseaux sociaux.
"Si je la rencontrais, la première chose que je ferais, c'est la remercier de m'avoir permis d'avoir une famille si extraordinaire et aimante, des super parents". Sabine a des larmes dans la voix. La cinquantenaire est née sous X, le 11 juillet 1972, à l'hôpital Trousseau, à Saint-Etienne. Elle a été adoptée quelques mois après sa naissance par un couple qui l'a élevée à Violay, dans la Loire. Aujourd'hui, elle cherche la trace de sa mère biologique.
Née sous X et adoptée
L'enfance de Sabine dans la Loire a été heureuse. Sans tabous, ni secrets. Elle découvre très jeune qu'elle a été adoptée. Un peu fortuitement. "A Violay, tout le monde savait que j'avais été adoptée, sauf moi. Les enfants à l'école le savaient aussi. Un jour, ils l'ont dit et on en a parlé avec mes parents", explique-t-elle simplement.
"Ma mère m'a toujours dit qu'elle m'aimait et qu'elle m'avait attendue encore plus !" Des liens très forts entre la fillette et ses parents se sont tissés. "Je ne dis jamais qu'ils sont mes parents adoptifs. Ils sont mes parents, tout simplement", ajoute-t-elle.
Etre née sous X, c'est un grand vide que j'ai compensé en partie par une famille très aimante et très stable.
Sabine
Tous deux sont décédés à une dizaine d'années d'intervalle. Une perte douloureuse pour Sabine, dont la relation avec sa mère de cœur était "fusionnelle". Si la quinquagénaire est aujourd'hui à la recherche de ses origines, c'est pour une raison médicale aussi. Elle s'explique : "des problèmes de santé ont été largement déclencheurs de cette démarche. Aujourd'hui, je ne peux pas répondre à la question de mes antécédents médicaux. C'est un grand blanc dans ma vie".
De maigres indices
"C'est la deuxième fois qu'elle se lance dans cette recherche", précise-t-elle . Sa première recherche, elle l'avait effectué peu après sa majorité, "j'ai consulté la première fois mon dossier entre 18 et 20 ans".
Elle apprend peu de choses de sa mère biologique. C'était une adolescente de 16 ans en 1972. Elle était étudiante en secrétariat et comptabilité à Saint-Etienne. C'est en substance tout ce que Sabine connait encore aujourd'hui de celle qui lui a donné la vie. Rien ne mentionne son père. De bien maigres indices accessibles dans son dossier de l'aide sociale à l'enfance. Ces informations figurent sur une simple feuille. "Mon dossier, c'est une centaine de pages et je n'ai pu en consulter qu'une simple page, d'un papier très fin. Un PV d'abandon et quelques informations", ajoute-t-elle. Sa première réaction à la lecture du PV reste gravée dans sa mémoire : le besoin de se regarder dans un miroir.
C'est notre histoire intime dans ce dossier. Une pile de documents qu'on ne peut pas lire !"
Sabine
Trois décennies ont passé depuis qu'elle a eu accès à son dossier. La frustration est encore vive. "C'est surtout l'absence de reconnaissance que ces papiers sont à moi aussi. C'est mon histoire aussi !" Car pour la mère qui accouche sous X, l'anonymat est strictement préservé : "la loi n'impose pas de donner des informations précises et avérées. C'est pénalisant pour nous (les enfants nés sous X) mais c'est aussi la possibilité pour l'enfant être adopté immédiatement", ajoute Sabine.
Le plus difficile est de se sentir dépossédée de sa propre histoire. Certains nés sous X remettent en question la loi, ce n'est pas mon cas du tout.
Sabine
Une bouteille à la mer(e)
"Je lance à nouveau une bouteille à la mer(e)", écrit-elle. Début mai, c'est donc par les réseaux sociaux que Sabine a relancé sa recherche. Elle a posté un message sur un groupe Facebook pour retrouver la trace de sa mère biologique . Sur ce groupe, elle reçoit des conseils, des encouragements, mais pour l'heure rien de concret. Si ce n'est la piste d'une maison maternelle située près du lycée stéphanois et d'une femme qui évoque une camarade de classe enceinte. Mais la piste mène à une impasse. Une question de concordance de date. Il est même probable que l'adolescente était originaire d'un autre département.
Devenue elle-même parent, Sabine l'assure : elle ne voudrait pour rien au monde bouleverser la vie de sa mère biologique. "Certains secrets sont très lourds dans une vie. Ma mère ne m'a pas cherchée. Ma naissance est donc restée un secret". Elle ajoute : "à l'adolescence, on se fait plein de films très positifs, on fantasme, on imagine quelqu'un de super chouette. En devenant adulte, on se rend compte que ce n'est peut-être pas ça".
Sabine a également créé une adresse mail dédiée pour collecter les informations : sousxjuillet1972@gmail.com.
Accès aux origines
En France, toute femme enceinte ne souhaitant pas élever son enfant a la possibilité de le mettre au monde sans laisser d’informations sur son identité. Elle doit simplement mettre au courant l’équipe médicale de l’établissement hospitalier où elle accouchera.
Après sa naissance, l’enfant est confié aux services départementaux de l’aide sociale à l’enfance (ASE). Toutefois, la mère peut revenir sur son choix et récupérer son enfant dans un délai de deux mois. À l’issue de cette période, il peut être adopté.
L'accès aux origines personnelles des enfants adoptés et pupilles de l'État est facilité depuis la loi du 22 janvier 2002. La possibilité d’accoucher anonymement est maintenue, mais la loi a créé le Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (Cnaop). Depuis 2002, le Cnaop a pu communiquer l’identité des parents de naissance pour 3 831 demandes, mais pour 1 367 dossiers, les parents de naissance contactés ont refusé de lever le secret.