Soixante-dix ans après l'appel de l'Abbé Pierre, un quart des Français affirment aujourd'hui participer à des actions de bénévolat. Parmi eux, Bernadette et Stéphanie. Elles livrent leurs expériences de bénévoles et leurs parcours d'engagées au service de l'autre. La première depuis plus d'un demi-siècle, l'autre depuis quelques années.
De Bernadette et de Stéphanie vous ne verrez pas les visages. Elles ne le souhaitent pas parce que si une quarantaine d'années les séparent, elles défendent la même idée : " Ce ne sont pas les visages qui sont intéressants mais les actions menées". Pudiques donc ces femmes et discrètes. Elles ne se sont pas engagées, ni l'une ni l'autre pour être dans la lumière.
Alors pourquoi ? Pour Stéphanie, 49 ans, courtière en assurances, le bénévolat est une vocation tardive. Cheveux courts, regard franc, sourire engageant, Stéphanie a toujours donné de son temps mais depuis quelques années, elle est engagée dans plusieurs associations : le Lions club pour "la transmission, les actions éducatives, la mise en commun des univers de chacun" et une association de motards dont elle est la présidente. Elle met "ses" motards au service d'autres associations pour mener des actions caritatives : lutte contre les myopathies, contre le cancer etc.
Aider ça me rend heureuse. Je le fais pour l'autre mais pour moi aussi
Stéphanie 49 ans, salariée et bénévole
Quand on lui parle de générosité Stéphanie s'agace : " Pour moi dans la générosité, il y a quelque chose de l'ordre du "je te donne parce que j'ai plus". Je préfère l'humanité du "je viens vers toi parce que je te considère comme mon égal". Je vais donner une journée de mon temps à des mômes malades ou handicapés. Le tour de bécane qu'ils feront avec moi va leur donner le sourire. Et ça, c'est un cadeau. J'aide à mon niveau et ça me rend heureuse.". L'engagement c'est aussi beaucoup de travail ! Entre les actions motardes et celles menées avec le Lions Club, elle estime à environ 500 heures par an son temps de bénévolat : " J'aimerais faire encore plus. C'est pour moi, qui ai toujours été entourée de ma famille, d'amis, avec un job, ma juste contribution au monde."
J'envie les retraités qui ont plus de temps que moi à donner aux autres...
Stéphanie 49 ans, salariée et bénévole
Elle ne compte pas s'arrêter là. Elle a en tête d'autres engagements à venir dans le monde du travail comme les prud'hommes et le tribunal de commerce. Et puis le rêve pour plus tard, d'une grande maison pour accueillir des animaux " Ceux qui ne seront jamais adoptés parce que vieux, moches et malades. Ce sera en plus du reste. Je suis envieuse des retraités qui ont plus de temps que moi à donner aux autres, conclut-elle dans un sourire."
On pourrait penser qu'à presque 83 printemps, Bernadette est retraitée. Mais retraitée de quoi ? Du bénévolat ? Plus de 40 ans au service des soins et du maintien à domicile des personnes âgées. Un engagement commencé à Saint-Chamond dans la Loire en 1969 et qui au fil des années est passé du local au national via le départemental et le régional. Trois décennies de présidence à la tête d'une association qui comptait près de 400 salariés.
Je n'ai pas agi pour la gloire mais pour faire bouger les choses. Mes casseroles ne m'auraient jamais suffi !
Bernadette 82 ans, une vie de bénévolat
Le bénévolat militant, pour Bernadette c'est une histoire de famille. Juste après la guerre, le père s'engage aux côtés des Tréteaux, une compagnie de théâtre. Il est aussi brancardier pour accompagner les malades à Lourdes. La mère est une des pionnières du secours catholique dans la Loire. La fille, Bernadette, s'engage après 68. " C'est parti d'un constat. Il y avait seulement deux infirmiers libéraux pour un bassin de population de plus de 50 000 habitants. Il y avait donc une carence. C'est à partir de là qu'on a réfléchi avec des sœurs infirmières et des médecins. Et on a créé le centre de soins. L'aventure m'a menée jusque dans les ministères. Je n'ai pas agi pour la gloire mais pour faire bouger les choses. Mes casseroles ne m'auraient jamais suffi !"
Les centres de soins ont été créés pour assurer le maintien des personnes âgées à domicile " une population dont on ne souciait guère". Les anciens et les nouveaux, puisque des microcrèches ont aussi vu le jour.
Ce qu'on a mis en place répondait à une lacune de la société... L'engagement c'est sortir de sa coquille et regarder autour de soi
Bernadette 82 ans, une vie de bénévolat
Si elle a quitté la présidence des centres de soins depuis plusieurs années, n'allez pas croire que Bernadette se repose. Elle est toujours bénévole auprès des primo accédants et dans un EPHAD ceux qu'elle appelle "mes p'tits vieux même si certains sont plus jeunes que moi !"
Sur toutes ces années passées au service des autres, elle garde la fierté de la mission réussie avec les centres de soins " On a été tellement bons que le privé s'y intéresse désormais. Et puis il y a, comme en sport le collectif parce que seul on arrive à rien. L'engagement c'est sortir de sa coquille et regarder autour de soi."
Comme Bernadette et Stéphanie, près d'un quart des Français sont engagés dans des actions de bénévolats, ce qui représente aujourd'hui plus de 550 000 équivalents temps plein. Et, contrairement aux idées reçues, il n'y a pas que des têtes grises chez les bénévoles ! Et si vous ne savez pas à qui donner de votre temps, "tous bénévoles" recense toutes les associations près de chez vous !