"On est sur une moyenne d'âge de 30 ans", ex-gardien de refuge, il observe les jeunes se réapproprier la randonnée

Il y a 25 ans, on ne pratiquait pas la randonnée comme aujourd’hui. Les applications, les réseaux sociaux, la crise du Covid-19, sont venus bouleverser les habitudes des sportifs, et ont amené un public nouveau, plus jeune.

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Et si la randonnée n’était plus une pratique ringarde, réservée aux personnes de plus de 40 ans ? Dans le massif des Alpes, Fredi Meignan en fait tous les jours le constat. L'ex-gardien du refuge du Promontoire en Isère depuis une vingtaine d’années, il observe de plus en plus de jeunes sillonner les sentiers montagneux. Il nous explique.

"C'est vrai que depuis le COVID, et même avant, il y a un mouvement qui s'est engagé. La fréquentation a considérablement augmenté", explique le randonneur à ses heures perdues.

En 2022, la randonnée pédestre figurait à la première place des disciplines sportives les plus pratiquées par les Français, selon une étude nationale menée par Union Sport et Cycle pour le compte de la FFRandonnée.

Un nouveau public plus dense et plus jeune

Mais plus que la fréquentation, c’est "la diversification des types de randonneurs" qui intrigue Fredi Meignan. "Pour moi, il y a un rajeunissement de la fréquentation. Et il s'accélère", souligne-t-il avant d’ajouter : "On s’est livré cet été à des petits exercices sur des journées entières de croisement de l'ensemble du public en randonnée dans le massif de Belledonne et on était sur une moyenne d’âge de 30 ans".   

Et parmi ces jeunes, la place est faite aux femmes. Plus qu’un cas isolé, elles sont de plus en plus nombreuses, en groupe, à pratiquer les sentiers escarpés de la région.

Alpiniste depuis toujours, Fredi Meignan constate également un intérêt croissant pour les bivouacs, une pratique qui consiste à randonner pendant plusieurs jours, avec des haltes pour dormir en plein milieu de la montagne.

"Jusqu’à maintenant, aller dormir à 2000 ou 2500 mètres d’altitude, à la belle étoile ou en tente, ça restait soit marginal, soit élitiste. Il fallait oser. Et maintenant, il y a des publics qui osent franchir le pas", explique le passionné. Une conjonction de différentes évolutions qui tournent autour d’une génération de randonneurs renouvelée, plus jeune.

"Remettre les pieds sur terre"

"Je me demande s’il n’y a pas une recherche consciente pour certains, inconsciente pour d'autres, de reprendre contact avec la vie de la terre", s’interroge le garde. La jeune génération est en train d’imposer des nouvelles pratiques, mettant fin par exemple au concept de métro boulot dodo, afin de rechercher davantage de satisfaction personnelle. La randonnée en fait partie.

"Je mets l'hypothèse que dans les mois et les années qui viennent, on va se rendre compte qu'on est devenu des extraterrestres sur terre. On ne tient pas compte de la vie de la terre. Et je me demande s’il n’y a pas les prémices d'une prise de conscience. Il ne s’agit pas simplement de renouer le contact avec la nature, mais bien de remettre les pieds sur terre."

Fredi Meignan

ex-gardien du refuge du Promontoire en Isère

Un phénomène exacerbé par la crise du Covid-19 et l’enfermement des jeunes. Cette année, la montagne a connu un deuxième été de fréquentation record, selon les données de l'Union Sport & Cycle. Le tourisme estival a augmenté son activité de 2%, preuve de l’exigence d’un retour des vacances en pleine nature.

Les départements de Savoie et de Haute-Savoie, qui comptent les plus grandes stations historiques des Alpes, sont sans surprises les plus attractifs et entrent même dans le Top 20 des destinations françaises les plus fréquentées, rivalisant avec les départements du littoral français.

Réseaux sociaux et applications : de nouvelles manières de randonner

La randonnée d’aujourd’hui n’a sans aucun doute pas échappé à la numérisation de la société. Iphigénie, Whympr, Instagram… les applications d’accompagnement à la randonnée fusent et les réseaux sociaux regorgent de nouveaux itinéraires à explorer. "Ça tombe bien. Justement, s’il y a ce mouvement de se re-situer sur terre, c'est une façon de faciliter les choses", explique Fredi Meignan.

Au risque de créer des embouteillages sur certains sentiers, ceux que l’on retrouve sur les pages Instagram, Tiktok et qui font rêver. Au risque également de passer plus de temps les yeux rivés sur le téléphone que sur le paysage environnant. "Les cartes IGN permettent d'avoir beaucoup plus de recul sur un ensemble. Les applications, ça reste des petits formats", souligne le gardien du refuge du Promontoire.

Et si certaines "anciennes générations" voient de manière négative l’arrivée de cette nouvelle génération, condamnant des comportements dégradant à l’encontre de la pratique et de son environnement, Fredi Meignan remarque un effort des jeunes pour comprendre cet environnement. Les jeunes sont réceptifs aux conseils prodigués par les professionnels. "Si on leur dit d’aller à 500 mètres à gauche, je caricature un peu, là où il n’y a pas de sur-fréquentation, ils nous écoutent", explique le randonneur.

"Il faut aller à la montagne sur la pointe des pieds"

"Il y a des endroits ailleurs que dans la montagne où les gens ne font pas n'importe quoi parce que culturellement ils savent. Je prends souvent l'exemple d’une cathédrale. Il n’y a pas besoin de mettre un panneau à l'entrée d'une cathédrale ‘interdit aux Motocross’ ou ‘interdit aux quads’. Personne ne rentrerait en moto cross dans une cathédrale. Pour la montagne, c’est le même état d’esprit."

Fredi Meignan

ex-gardien du refuge du Promontoire en Isère

Ex-gardien du refuge du Promontoire, Fredi Meignan est également vice-président de l’association Installations Obsolètes. Avec les bénévoles, ils recensent et démontent des constructions abandonnées. Une question d’amélioration des paysages, mais surtout un objectif de "rendre la nature à la nature".

"Je suis à la fois dans la protection de la montagne et pour que les gens aillent en montagne. On va me dire que c'est contradictoire. Oui et non. Il faut aller à la montagne sur la pointe des pieds, en étant vraiment à l'écoute. Si on y va comme des gros bourrins, dans ce cas ce n’est pas bon". Tout est dans la construction d’un équilibre "entre cette facilitation d'accès et la manière d’y aller".

Retrouvez Fredi Meignan dans l'émission spéciale à l'occasion des 25 ans de "Chroniques d'en haut", samedi 30 septembre sur France 3 Auvergne-Rhône-Alpes, puis en replay sur france.tv

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