Dans ce quartier populaire de Clermont-Ferrand, beaucoup auront les yeux rivés sur le match de la Coupe du monde, de ce mercredi 30 novembre, opposant la France à la Tunisie. Parmi eux, des franco-tunisiens, dont le cœur balance entre les deux équipes.
« On est prêts ! ». Dans ce café du quartier populaire de la Gauthière, à Clermont-Ferrand, le drapeau tunisien est déjà là, suspendu juste en dessous de la télévision. Histoire d'avoir le drapeau sous la main en cas de victoire. En effet, un grand match attend la Tunisie : elle affronte les Bleus ce mercredi, dans le cadre de la Coupe du monde de foot au Qatar. Et cela, fait la plus grande joie de Saïd : « Tahia Tunis ! (Vive La Tunisie). On va regarder ! C’est obligé ! J’espère qu’on va gagner ! », s’écrie ce franco-tunisien, la tasse de café à la main.
Deux pays, deux drapeaux et deux équipes de foot. Pour Abdel, originaire de Djerba, venu en France, il y a 10 ans, le cœur balance :
« La Tunisie, c’est mon deuxième pays. Le premier c’est la France. Difficile de choisir ».
Abdelsupporter tunisien
Le quadragénaire anticipe déjà l'accueil des résultats : « Honnêtement, on sera peut-être moins content (en cas de victoire de la France) parce qu’on sait déjà qu’elle gagnera ce match. Mais si la Tunisie gagne, ce serait vraiment la surprise. Du coup, la joie sera plus forte. Tellement on ne s'y attendra pas », sourit-t-il.
« Je préfère soutenir des gagnants ! », provoque son camarade de table. Vous avez vu Kylian Mbappé ? Un génie ! », lance-t-il amusé. Les yeux rivés sur le match Espagne-Croatie, Abdel reste impassible. « T’es pas Tunisien, c’est pour ça », réplique-t-il. Il poursuit : « Cette Coupe du monde a un goût particulier. C'est l'espoir de tout un peuple ». Abdel suit avec intérêt la crise politique qui bouscule son pays, pour lui « rien ne rassemble plus que le football ! ».
Un quartier animé par le foot
Dans le quartier de la Gauthière, le foot est une véritable passion. Un amour pour le ballon rond qui a poussé une partie de ses jeunes habitants à organiser une Coupe d'Afrique des Nations des "quartiers". Un tournoi de foot populaire transformé en Coupe du Monde des "quartiers", l'été dernier. Parmi les nations représentées, il y avait évidemment la Tunisie qui n'a, malheureusement, pas réussi à passer les phases de poules : « On avait les Comores et l'Algérie face à nous aussi », justifie Driss, jeune adolescent qui avait suivi attentivement cet évènement populaire. Ce supporter espère cependant un tout autre destin pour son équipe, pour cette véritable Coupe du monde. Tout comme Karim, serveur dans ce café : « J'ai beaucoup de franco-tunisiens qui viennent boire un café ici. La Tunisie a intérêt de gagner , sourit le jeune homme habillé d'un survêtement rouge et vert. Pour la CAN (Coupe d'Afrique des Nations), c'était assez blindé. Tout le monde venait regarder le match pour supporter soit l'Algérie, soit le Maroc ».
«Ce n'est pas juste du foot »
Dans le brouhaha de ce café, on perçoit toutefois la ferveur de quelques supporters des Bleus : « Coupe du monde 1998. Vous vous en souvenez ?, s’exclame Slimane. On était tous derrière les Bleus, qu’on soit Tunisiens, Marocains, ou même Algériens », raconte le jeune homme de 38 ans, tout en souriant à son camarade de table - algérien - comme pour le titiller. « On avait tous le même maillot, on criait tous “Allez les Bleus”». Selon lui, cet engouement avait une raison bien précise : « Parce qu’on était représentés. Le fameux Black, Blanc, Beur. Zidane était un symbole. C'était toute une ambiance. L’équipe de France représentait la diversité. Ça nous manque un peu, je trouve. Mettez un Tunisien dans l’équipe de France et je suis le plus heureux du monde ! », ironise Slimane. « Ah bah oui, c’est pas juste du foot », renchérit son camarade algérien.
« Parler foot, c'est toujours un peu sensible », philosophe Ahmed, capuché, devant sa tasse de café. Fils de parents tunisiens, ce jeune homme est un féru de ballon rond, mais sa passion se complique parfois : « Quand je suis en Tunisie, je veux être pour la France. Et quand je suis en France, je veux être pour la Tunisie. Mais dans les deux pays, c'est pas super bien vu », déplore le jeune passionné. «Pas toujours facile d'aimer le foot », conclut-il
Ces supporters peuvent en tout cas se rassurer : à défaut d'avoir une étoile sur le maillot, ces supporters auront sans doute des étoiles plein les yeux.