A Laschamps, village situé sur la commune de Saint-Genès-Champanelle (Puy-de-Dôme), il existe un endroit sombre, à l’abri des regards, où la roche est percée de trous et où les boussoles n’indiquent pas le nord. On vous explique le secret de cette anomalie magnétique.
A Saint-Genès-Champanelle (Puy-de-Dôme), dans le village de Laschamps, il existe un bien curieux phénomène : « Lorsque l’on se trouve dans un lieu très précis du village, près de l’aire de repos et du départ des randonnées dans les volcans, il y a un endroit où les boussoles indiquent le sud. C’est un lieu sombre, caché, peu attrayant. Il n’y a pas beaucoup de monde », explique Béatrice Boudet, institutrice à la retraite vivant dans la commune.
Une inversion des pôles magnétiques
Elle se décrit comme une « collectrice de mémoire » et a réalisé un livret sur cette particularité paru en septembre 2018. « Un chercheur, Norbert Bonhommet, commence, vers 1970, une thèse sur le magnétisme rémanent des laves du Massif Central. En 1972, dans la coulée du Puy de Laschamps, il trouve un retournement complet du champ magnétique terrestre ! Cet événement appelé « le Laschamps » daté à - 30 000 ans environ fut de courte durée (2000 à 3000 ans environ). Mais cette découverte a eu un grand retentissement dans le monde scientifique car une inversion des pôles magnétiques aussi récente pourrait être en corrélation avec d’autres phénomènes géophysiques importants (variations climatiques, fracture de la croûte terrestre ...) », explique Béatrice Boudet.
La mémoire des roches
Une explication plus précise de ce phénomène a été donnée par Suzanne Gély, professeure agrégée de sciences physiques, aux habitants de Laschamps : « Les roches conservent l’aimantation qui leur a été donnée par le dipôle magnétique terrestre au moment où ces roches se sont figées à partir de la lave incandescente : cette aimantation est dite « rémanente » (qui reste) et fossile (car elle date de la coulée volcanique). Les roches de Laschamps gardent donc mémoire, se souviennent de ce qui se passait sur terre au moment où elles se sont solidifiées ; or, chose extraordinaire, en étudiant par des appareils très précis- les roches de Laschamps, un chercheur, Monsieur Bonhommet, faisant une thèse sur le volcanisme en Auvergne, s’est aperçu, en 1972, que ces roches avaient une aimantation inverse de l’aimantation qu’on trouve ailleurs, par exemple au Puy-de-Dôme. Donc, lorsque la coulée volcanique du Puy de Laschamps s’est formée, le champ magnétique Terrestre était inverse de ce qu’il est maintenant (c’est-à-dire qu’au lieu d’un pôle sud magnétique il y avait un pôle nord magnétique et réciproquement). »
La roche percée
Le lieu est ordinaire, avec sa croix et son aire de repos, mais un détail attire l’œil : la roche est percée de multiple trous. « Lorsque les scientifiques ont remarqué cette anomalie magnétique, ils ont fait des trous pour analyser la roche, et cela intrigue les visiteurs, cette paroi rocheuse percée », raconte Béatrice Boudet. L’ancienne institutrice pense d’ailleurs que d’autres anomalies magnétiques existent ailleurs dans le village : « Il y en aurait une sur le terrain de rugby, près d’une roche qui émerge, mais je ne l’ai jamais trouvée ». Béatrice Boudet tente maintenant de faire de cette particularité un atout touristique pour la commune : « Il y a de plus en plus de gens qui s’y intéressent. Laschamps est un village un peu touristique alors lorsqu’il y a des randonnées organisées, on fait passer les touristes avec une boussole. J’y allais aussi en sortie avec mes élèves, mais j’étais institutrice pour des classes de CE2, alors c’était plus un jeu pour eux. »
Phénomène de Laschamps
Désormais, Béatrice Boudet souhaiterait voir ce lieu valorisé encore davantage : « J’aimerais qu’on y installe un panneau explicatif pour que les gens comprennent ce qu’il s’y passe, sinon, ils ne s’y arrêtent pas. Il n’y a pas de ressenti particulier lié au magnétisme, mais il y a une atmosphère sombre. » S’il existe d’autres phénomènes du même type au Japon ou encore aux Etats-Unis, on parle, pour les désigner, de « phénomène de Laschamps ».