Label Rouge, AOP, bio… ce qui se cache derrière ces étiquettes

Sur nos emballages alimentaires, les logos et les signatures fleurissent. Mais comment faire pour s’y retrouver ? Qu’y a-t-il derrière les étiquettes AOP, IGP, Bio, Label Rouge ?

AOP, IGP, Bio, Label Rouge…vous avez forcément déjà lu ces logos sur vos emballages alimentaires. Mais que signifient ces étiquettes ? L’INAO, Institut national de l’origine et de la qualité, est un établissement public qui relève du ministère de l’Agriculture. Il est le « bras armé » du ministère pour mettre en œuvre en France la politique des signes officiels de qualité. Contrairement aux idées reçues, ces signes officiels sont en quantité limitée. Marie Guittard, directrice de l’INAO, explique : « Les signes officiels de qualité sont validés par les pouvoirs publics. Il y a ceux qui garantissent au consommateur des produits qui viennent de quelque part et qui ont des caractéristiques liées à leur origine, les AOP (Appellation d’origine protégée) et les IGP (Indication géographique protégée). Il y a les produits qui sont garantis en tant que produits de qualité supérieure sur le plan du goût, avec le Label Rouge. Enfin, il y a l’Agriculture biologique pour des produits élaborés dans des conditions particulièrement respectueuses de l’impact sur l’environnement et du bien-être animal. Il n’y a pas 36 signes officiels de qualité. Ce qui peut parfois poser problème, c’est la multiplication des labels privés ».
 

Des signes qui attirent le consommateur

Selon Marie Guittard, le consommateur est facilement aiguillé vers ces signes de qualité : « Pour s’y retrouver, il y a des logos, des identifiants précis. Ils sont jaune et or pour les AOP, bleu marine et jaune pour les IGP. Le Label Rouge est un sceau rouge et pour la bio, il y a le logo AB ou l’eurofeuille, une feuille verte avec des étoiles blanches. Ce logo signifie que les pouvoirs publics garantissent des qualités particulières à ces produits. Par exemple, pour une AOP fromagère saint-nectaire, vous achetez un fromage qui vient de Saint-Nectaire, qui tire ses qualités particulières de son origine, l’endroit d’où il vient, grâce à un contexte et à un savoir-faire ancestral. Pour chaque signe, il y a des garanties apportées ».
 

 

Un cahier des charges à respecter

Selon la directrice de l’INAO, une viande issue d’une bête élevée en Pologne ne pourrait pas se voir attribuer le Label Rouge : « Le Label Rouge fait l’objet d’un cahier des charges validé par le ministère de l’Agriculture et de tests qui font que ce produit qui bénéficie de ce label est suivi. Il est de qualité supérieure. En théorie, une entreprise polonaise qui répondrait à ce cahier des charges ne pourrait pas se voir refuser le bénéfice du Label Rouge mais ce n’est pas le cas ». Marie Guittard met en avant pour certains signes une harmonisation qui s’effectue au niveau européen : « Le Label Rouge est un label franco-français. Il est installé dans le paysage depuis 60 ans. Les autres signes sont des signes européens : ils sont validés par le ministère de l’Agriculture en France et par la Commission européenne. Il y a ainsi des AOP italiennes, grecques ou allemandes. C’est aussi très réglementé pour les IGP et l’Agriculture biologique ».
 

C’est un produit gagnant pour le producteur et pour le consommateur 

Selon la directrice de l’INAO, les labels sont une valeur refuge : « On a de plus en plus de consommateurs qui cherchent à savoir d’où vient le produit. Dans un monde où l’on peut consommer tout et n’importe quoi, à n’importe quel moment de l’année, venant de n’importe où, les consommateurs veulent des produits de quelque part et qui sont avec des qualités liées à leur origine. Ces produits sont contrôlés, tracés. Ils affichent leur origine et tirent leurs caractéristiques de cet endroit. Il y a aussi une garantie des pouvoirs publics ». Elle conclut : « Le producteur n’est jamais obligé de produire un signe officiel de qualité. Ceux qui l’adoptent le font car ils sont fiers de leurs produits et parce que c’est un bon moyen de créer de la valeur ajoutée et avoir une meilleure rémunération. C’est un produit gagnant pour le producteur et pour le consommateur ». On compte aujourd’hui en France 363 AOP viticoles et 102 AOP agro-alimentaires, dont 51 dans le secteur laitier.
 

 Le consommateur a du mal à s’y retrouver

Daniel Bideau, président du l’UFC-Que choisir du Puy-de-Dôme et vice-président national de l'association, indique : « Le consommateur a du mal à s’y retrouver. On insiste pour faire confiance aux labels officiels, AOP, IGP, Label Rouge. Mais on met en avant la nécessité de revoir les cahiers des charges, et pour leur donner beaucoup plus de rigueur. Ces labels ont perdu de leur crédibilité en partie. Il faudrait leur donner beaucoup plus de vigueur, avec un meilleur contrôle et peut-être éviter de trop élargir les autorisations des différents produits ». Il poursuit : « On estime qu’il faudrait revenir aux labels traditionnels qui sont fiables et connus de l’ensemble des consommateurs, comme le Label Rouge, l’AOP. Il y a aussi la nécessité d’avoir des labels valorisés, y compris les labels officiels. Il y a plusieurs axes comme l’origine et la typicité, la qualité supérieure des produits, le caractère traditionnel d’une recette, et le respect de l’environnement. Il y a aussi les produits dits « produits de l’année », « élus par les consommateurs », qui sont des appellations fallacieuses. Elles visent à valoriser des produits sponsorisés par leur fabricant. Pour nous, ces appellations ne valent rien du tout ».

L'importance des contrôles

Daniel Bideau rappelle l’importance des contrôles : « Le consommateur est protégé dans le sens où toute fabrication a une protection au niveau de l’hygiène. Il y a des normes à respecter, quel que soit le type de fabrication. Au niveau alimentaire, il faut que le consommateur ait confiance en ces signes de qualité : le cahier des charges doit être surveillé étroitement à la fois par les producteurs et supervisé par l’Etat. On a constaté que l’autocontrôle des professionnels n’est jamais une garantie pour le consommateur ».

 

Les résultats de deux études

Mardi 28 septembre, Greenpeace France, le WWF France et le BASIC (Bureau d’analyse sociétale pour une information citoyenne) d’une part et l’UFC-Que Choisir ont publié deux études qui montrent de grands écarts entre les promesses des signes de qualité et la réalité. L’UFC-Que Choisir a fait procéder à l’analyse des cahiers des charges de 8 Appellations d’origine protégée (AOP) fromagères et de 4 filières viandes sous Label Rouge, afin de vérifier si les critères définis pour les zones et les conditions de production sont à la hauteur des exigences de ces signes officiels. D’après l’UFC-Que Choisir : « Les cahiers des charges étudiés permettent de garantir un réel lien au terroir grâce aux exigences que les professionnels ont définies pour 5 des AOP étudiées : Abondance, Camembert de Normandie, Laguiole, Picodon et Salers. En revanche pour les trois autres -Saint-Nectaire, Cantal et Munster- les productions d’entrée de gamme se révèlent très peu différentes des productions industrielles sans AOP. En particulier, leurs cahiers des charges autorisent le lait pasteurisé et l’ensilage et manquent d’exigences formelles sur les races de vaches ». Ceci n’a pas manqué de faire réagir Sébastien Ramade, président de l’interprofession AOP Saint-Nectaire. Il explique : « Nous ne sommes pas un produit d’entrée de gamme. Nous avons un cahier des charges très strict qui a été modifié il y a une quinzaine d’années par les producteurs de l’époque. Nous avons fait le choix de baser l’alimentation de nos vaches laitières sur une herbe naturelle qui provient de la zone d’appellation. On a 50 à 60 espèces de plantes dans chaque pré. Nos vaches laitières doivent être nées et élevées sur la zone d’appellation. On fait un choix génétique sur nos vaches. Elles s’habituent à notre milieu depuis plusieurs années. On a une flore unique en France ici ».

Cette étude ne va pas nous porter préjudice

Il ajoute : « Concernant l’ensilage, il s’agit d’herbe qui provient uniquement de la zone d’appellation. Dans le cahier des charges, on est limité à 15 %  d’apport d’ensilage sur l’année et on ne doit pas dépasser 40 % sur une journée. Au sujet du lait pasteurisé, cette technique est plutôt  une force. Cela nous permet de fournir du fromage de très haute qualité à des personnes qui n’ont pas la possibilité de manger du lait cru, comme les femmes enceintes, les personnes immunodéprimées, les personnes âgées et le enfants de moins de cinq ans ». Le président de l’interprofession AOP Saint-Nectaire conclut : « Cette étude ne va pas nous porter préjudice. Quand on la lit, on voit bien que l’AOP Saint-Nectaire travaille énormément sur la biodiversité, sur le bien-être animal. On ne pouvait pas l’afficher réglementairement car c’était interdit. Aujourd’hui c’est possible depuis quelques mois ».

Le cas du Label Rouge

De plus, l'UFC-Que Choisir indique :  « Si le Label Rouge est mérité pour les filières volailles et bœuf, il ne l’est pas en revanche pour les productions qui se contenteraient des exigences minimalistes définies pour le porc Label Rouge, des critères importants pour la qualité supérieure tels que la race et l’accès des animaux à l’extérieur étant insuffisamment pris en compte dans les cahiers de charges étudiés ».

Des intentions différentes

Greenpeace France, le WWF France et le BASIC ont réalisé une étude pour évaluer la durabilité de onze démarches alimentaires (labels, certifications, etc.) à l’aide d’une grille d’analyse. L'étude montre que de nombreuses démarches alimentaires ont des bénéfices socio-économiques et environnementaux différents de leurs intentions affichées. Un communiqué de presse  indique : « Les démarches partageant le socle de l’agriculture biologique (AB, Bio Equitable en France, etc.) obtiennent des bénéfices socio-économiques et environnementaux les plus forts et les plus avérés du fait de leurs impacts positifs notamment sur la santé humaine, la qualité des sols, les ressources en eau, la biodiversité, ou le bien-être animal. A l’inverse, les démarches partageant le socle de la certification environnementale : Agri Confiance, Zéro Résidus de Pesticides et la certification Haute Valeur Environnementale (HVE), ont les effets positifs les plus faibles et les moins avérés des démarches étudiées. Pour la démarche HVE notamment, si on note un impact positif modéré pour la qualité des sols, on relève en revanche des bénéfices faibles et peu avérés sur les critères de santé humaine et environnementaux (ressources en eau, biodiversité, qualité de l’air, climat …). Les bénéfices ne sont pas démontrables en l’état sur les autres critères socio-économiques (niveau de vie décent, cohésion sociale, etc.) ».

Une meilleure rémunération pour les producteurs labellisés

Nicolas Sudre est un agriculteur installé à Gelles dans le Puy-de-Dôme. Dans son exploitation de 60 vaches laitières et de 90 hectares de prairie, il fournit une production laitière et la transforme en bleu d’Auvergne AOP et en fourme d’Ambert AOP. Il a obtenu ces labels il y a 2 ans : « On défend un territoire, un terroir, un savoir-faire. On était dans la zone de l’AOP donc c’était dommage de s’en priver. On bénéficie d’un appui technique par des techniciens de l’AOP, d’outils de communication. Il y a aussi la création d’événements comme la fête du bleu et les Fourmofolies, qui font la promotion des deux AOP. On a un produit qui est protégé, qui ne peut pas être copié dans le monde ».

 Je vois une vraie différence

Depuis qu’il a obtenu ces AOP, Nicolas Sudre mesure les retombées : « Je vois une vraie différence. Mes ventes ont vraiment changé dès que j’ai obtenu l’AOP. Avant l’obtention de l’AOP, je produisais du bleu fermier et on vendait moins de la moitié de ce qu’on vend maintenant. Tout a vraiment changé. Le label qui est sur le produit est visible par le consommateur donc ça lui parle tout de suite ». L’agriculteur indique : « Le cahier des charges est un peu contraignant. Il y a certaines règles à respecter mais on est en zone herbagère donc cela ne nous impacte pas vraiment. On a des zones de pâturage minimum à respecter, pendant au moins 120 jours, et ça ne nous pose pas de problème car nos vaches sortent plus de 200 jours dans l’année. On est aussi réglementé au niveau des achats de fourrage et de bétail, qui doivent venir exclusivement de la zone. Il y a aussi des quantités de concentré à respecter pour les vaches. On ne va pas dire que c’est très contraignant, on adhère à un cahier des charges. C’est bénéfique d’avoir obtenu l’AOP. Certes il y a des contraintes et ce n’est pas facile tous les jours car il y a des choses en respecter. En fromagerie, il peut y avoir des petits problèmes mais on a l’aide des techniciens pour les régler ».

C’est une œuvre collective de la filière de la viande bovine allaitante du Massif central

Offrir des garanties au consommateur, c’est justement l’objectif de la marque « Altitude 1886 ». Présente dans 4 réseaux de Grande et Moyennes Surfaces sur la zone du Massif central et dans le sud  (Système U, Auchan, Leclerc et Carrefour), dans des boucheries traditionnelles et auprès de restaurateurs, la marque fête ses 3 ans d’existence. Cyril Guérin, chargé de mission « Altitude 1886 », explique : « La marque a été lancée lors du Sommet de l’élevage 2018. C’est une œuvre collective de la filière de la viande bovine allaitante du Massif central. Il y avait l’opportunité de réunir les éleveurs et les organismes producteurs, ainsi que les transformateurs, les abatteurs. Tous les opérateurs de la filière se sont réunis autour de la table pour créer une association et une marque « Altitude 1886 » Trois ans après, le COVID a eu un impact négatif sur le déploiement commercial. Il a cassé une certaine dynamique. Là, on essaie de remettre les choses en marche pour remporter des succès commerciaux ».

Il faut éduquer le consommateur

Selon le chargé de mission, le consommateur doit recevoir des messages simples pour s’y retrouver : « Il faut éduquer le consommateur. Je peux comprendre qu’il soit difficile de se repérer dans cette jungle de labels. On a opté pour une communication assez claire et on se repose sur 3 piliers, le bon, le sain et le solidaire. On se repose sur les races du territoire. On propose une viande de qualité et de goût. On est contrôlés par un organisme certificateur. On a 10 jours de maturation de la viande. Les éleveurs sont des fermes familiales, à taille humaine, qui veillent au bien-être animal. Les temps de transport sont limités. Les bêtes sont alimentées sans OGM, à 75% au foin et au maximum au pâturage. On respecte une juste rémunération des éleveurs ».

D’après l’INAO, la région Auvergne-Rhône-Alpes est riche de 193 produits sous Appellations d’Origine Protégée (AOP), Indications Géographiques Protégées (IGP), Labels Rouges (LR) ou Spécialités Traditionnelles Garanties (STG), et 33% des exploitations agricoles sont engagées dans au moins un de ces signes. Quelque 12,9% des exploitations agricoles de la région sont par ailleurs engagées en Agriculture Biologique (AB).

" Label Rouge, AOP, bio… ce qui se cache derrière ces étiquettes", on en parle mercredi 29 septembre à 18h30 dans l'émission "On décode" sur France 3 Auvergne-Rhône-Alpes. Vous pouvez participer ou réagir en posant vos questions grâce au formulaire ci-dessous. 
 

 

Les sigles de qualité selon l'INAO
  • AOP : l’Appellation d’Origine Protégée est un sigle européen qui identifie et protège le nom d’un produit, dont toutes les étapes de production sont réalisées selon un savoir-faire reconnu dans une même aire géographique, lui donnant ses caractéristiques spécifiques. C’est la notion de terroir qui fonde le concept des Appellations d’origine.
  • AOC : l’Appellation d’Origine Contrôlée est un sigle français qui est l’équivalent national de l’AOP. Pour certains produits, c’est une première étape vers l’enregistrement en AOP. Ce signe peut aussi concerner des produits non couverts par la règlementation européenne (Exemple : produits de la forêt).
  • IG : l’Indication Géographique est un sigle européen qui identifie et protège le nom d’une boisson spiritueuse, dont la qualité, la réputation ou d’autres caractéristiques sont liées à son origine géographique. Au niveau national, certaines IG boissons spiritueuses sont en outre reconnues en AOC.
  • IGP : l’Indication Géographique Protégée est un sigle européen qui identifie et protège le nom d’un produit, dont la qualité, la réputation ou d’autres caractéristiques sont liées à son origine géographique.
  • STG : la Spécialité Traditionnelle Garantie est un sigle européen qui identifie un produit dont les qualités spécifiques sont liées à une composition, des méthodes de fabrication ou de transformation fondées sur une tradition.
  • LR : le Label Rouge est un sigle uniquement national qui désigne des produits qui, par leurs conditions de production ou de fabrication, ont un niveau de qualité supérieure par rapport aux autres produits similaires habituellement commercialisés.
  • AB : l’Agriculture Biologique est un mode de production, défini par un règlement européen, qui allie des pratiques environnementales optimales, le respect de la biodiversité, la préservation des ressources naturelles et l’assurance d’un niveau élevé de bien-être animal.
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