Guerre en Ukraine : "De grands mouvements géopolitiques sont à venir" Thomas Gassiloud, député du Rhône

Depuis le début des offensives russes, le monde est sidéré. Le député "Agir" du Rhône, Thomas Gassilloud est membre de la commission de la défense à l'Assemblée Nationale. Invité sur notre plateau, il s'exprime sur ce conflit, ses conséquences et le poids de l'Europe face à Vladimir Poutine.

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Brutal et sidérant, le combat menée par la Russie contre l'Ukraine a surpris tant par sa violence que par son ampleur. 

France Rhône-Alpes a convié sur son plateau le député rhodanien, Thomas Gassilloud, membre de la commission de la défense à l'Assemblée nationale pour évoquer avec lui cette guerre insensée. 

Etes-vous sous le choc ?

"Oui, effectivement je pense que ce qui s’est passé hier était assez stupéfiant et a beaucoup surpris. Même si, on pouvait s’y attendre.

On s’attendait effectivement à une offensive dans les provinces séparatistes de l’Ukraine, potentiellement mais une offensive aussi vaste jusqu’aux frontières de l’Union Européenne, ça a surpris tout le monde."

C'est allé très vite...

"L'offensive n'est pas seulement une offensive aérienne, ce qui montre une forme de préparation de la part des russes, il y a également une offensive terrestre en cours, avec plusieurs points d’entrée sur le territoire ukrainien."

Il y a une totale asymétrie des forces en présence.

"Effectivement, l’armée ukrainienne est une armée qui a beaucoup progressé depuis 2014, depuis l’annexion de la Crimée mais qui reste très inférieure en nombre et en qualité de matériel par rapport à l’armée russe.

L’armée russe dispose aujourd’hui de la maîtrise totale des espaces qui englobent le champ de bataille que ce soit l’espace aérien, maritime, le cyber espace et l’espace exo-atmosphérique qui permet d’avoir des informations très précises."

Faut-il armer les forces ukrainiennes ?

"Oui, la question se pose. La France tend vers ce point-là. Ça a déjà commencé, des efforts sont déployés depuis 2014. La communauté internationale s'y associe. Aujourd’hui, il faut aider encore davantage l'Ukraine à faire face à l’armée russe."

Pourquoi s'engager à défendre Kiev, risquer de mourir pour l'Ukraine?

"C’est une vraie question fondamentale. Peut-être parce qu'aujourd’hui, on pense que les sanctions sont l’arme la plus efficace pour faire reculer l’armée russe, des sanctions économiques, financières, technologiques.

L’Ukraine n'est ni membre de l’union européenne, ni de l’OTAN mais il y a des valeurs morales, défendre les valeurs européennes, défendre un principe qui est le droit du respect des frontières dans un État souverain.

On est dans une forme de paradoxe où à la fois on veut protéger l’Ukraine et le droit international et en même temps, on n'a pas la volonté de s’engager militairement, frontalement face à la Russie, en tout cas tant qu’une ligne rouge n’est pas dépassée."

Avez-vous cru à la volonté de Vladimir Poutine de trouver une solution pacifique ?

"Je n’y ai cru qu’à moitié, je pense qu’on a bien fait de mener l’ensemble des efforts diplomatiques nécessaires pour trouver une solution de paix. Mais on voit bien que la Russie, que Poutine est dans une séquence où progressivement, il cherche à reconstituer l’empire soviétique avec l’ensemble de ses sphères d’influence. C'est ce que l'on a vu en Géorgie, en Moldavie, en Crimée."

A-t-on pêché par naïveté? C’est la même stratégie d’envahissement que pour la Géorgie ou l’Ossétie du Sud en 2008...

"On a donné un maximum de chances possibles à la voie diplomatique et je pense que c’était nécessaire. Je ne crois pas que ce soit être naïf que d’essayer de discuter."

"Depuis 2014, Vladimir Poutine travaillait à rendre son pays plus résiliant, il a "dédollarisé" son économie et trouver des nouveaux partenaires commerciaux notamment la Chine et l’Inde. Il a réintégré certaines productions notamment les productions alimentaires, les biens agricoles...La Russie aujourd’hui est moins sensible aux sanctions qu'avant."

Est-ce que ce conflit va changer quelque chose dans notre doctrine militaire ?

"Clairement, on entre dans une nouvelle ère stratégique, on quitte une ère de guerre globale contre le terrorisme, depuis 2001 jusqu'à 2021. On est entré aujourd’hui dans un monde où les puissances régionales cherchent à réaffirmer leur puissance. Je pense aux Russes, aux Turcs qui avaient tenté de le faire en Méditerranée et sans doute que les Chinois dans les prochaines années, on n'est pas à l’abri de surprise de leur part."  

Tout ceci, il faut l’intégrer dans notre manière de répondre, de réagir ?  

"Oui, il faut promouvoir le droit international et être en mesure de répondre à ces stratégies de puissances. Il faut être nous-mêmes en mesure de penser notre puissance et l'Europe est le bon échelon pour développer cette puissance d’un point de vue militaire mais aussi avec des leviers non militaires.  

Si la France travaille autant pour développer la défense européenne, c’est que nous savons que de grands mouvements géopolitiques sont à venir et pour être puissant, il faut également réfléchir à cette échelle."

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