Un ancien journaliste radio s'est lancé dans le slam voilà 5 ans. Son nom de scène : Eurêka. L'artiste lyonnais se produit devant un large public. Durant la crise sanitaire Covid, en 2020, il a donné des dizaines de représentations. Sa marque de fabrique : un twist à la fin de chaque titre.
Blazer bleu marine et jean impeccable, avec son allure sport chic et bon ton, Olivier, alias Eurêka sur scène, est à mille lieues du profil classique d'un slameur issu de la banlieue. Nous l'avons rencontré fin mars, au collège Alexis Kandelaft de Chazay d'Azergues, au pays des Pierres Dorées. Il dispensait une conférence musicale. Si ce Lyonnais de 36 ans ne colle pas aux clichés, ce slameur peu ordinaire s'est forgé une belle réputation dans l'art de manier le verbe. Il faut ajouter que confinement, loin de tarir sa créativité, a offert de nouvelles opportunités à ce slameur "en cravate".
J'ai souhaité faire du slam en restant moi-même. C'est une image qui surprend parfois mais qui permet aux gens de se souvenir de moi. Ca rejoint l'idée d'être soi-même, d'oser s'écouter.
Du slam en mode "twist"
Eurêka a besoin de peu de matériel le slameur pour faire sensation. De la vidéo est projetée derrière lui pendant son concert. Une véritable mise en images de ses textes plutôt éloignés de la culture hip hop. "C'est un concept un peu particulier : chacun de mes morceaux raconte une histoire et à la fin de l'histoire, il y a un twist, un retournement de situation" explique-t-il. Un twist qui permet de revoir la vidéo, avec un oeil nouveau. Des sujets qui parlent à tous, des mots qui fédèrent. Le morceau intitulé "Le mystère de la Chambre rose" est celui de ses titres qui rencontre le plus de succès. "Je suis assez fier du twist final. Une personne sur dix devine la chute."
"Je m'éveille aujourd'hui dés le lever du soleil, après une douce nuit de repos et de sommeil dans une petite chambre à aucune autre pareille. Une chambre toute rose, aux nuances de vermeil ...". C'est ainsi que débute "La chambre rose", l'un de ses titres qui rencontre le plus de succès. "Je suis assez fier du twist final. Une personne sur dix devine la chute."
Son nom de scène, Eurêka ("j'ai trouvé" en grec), fait directement référence aux twists qui concluent ses textes. "J'ai trouvé, c'est ce que peuvent se dire les spectateurs qui écoutent un slam et qui essaient de deviner la chute avant la fin".
Des thèmes universels
Exit les clichés. Loin de l'image "bling", "street" ou "gansta" du slam, Eurêka veut offrir une image universelle de ce genre musical. Une approche qui s'apparente davantage à de la poésie. "J'essaie de sortir des sujets abordés traditionnellement dans le rock ou dans le slam. Le but : que la musique soit la plus universelle possible, qu'elle s'adresse à tout le monde. Le but est aussi de faire aimer le slam à ceux qui ont des aprioris." Jeunes, seniors, parents ou cadres supérieurs... A l'image de son art, le public d'Eurêka est hétéroclite.
La première question que j'adore poser au début de mes concerts, c'est : levez la main, les gens qui n'auraient jamais pensé mettre les pieds dans un concert de slam... et en général, tout le monde lève la main.
"Comment j'en suis arrivé là ?"
Si le Lyonnais est devenu slameur, c'est un peu le fruit du hasard. Adolescent, il écrivait déjà des textes de slam mais rien ne le prédestinait à une vie d'artiste. Le sort réserve parfois bien des surprises. Il y a cinq ans, comme un coup de tonnerre, c'est une rupture amoureuse qui vient bouleverser ses projets. A 31 ans, Olivier Tonnelier décide alors de tourner la page pour entamer une nouvelle carrière. Le journaliste revient vers ses premières amours et se lance dans l'art du slam. Un coup de tête ? Non, plutôt "une nouvelle chance".
"A la suite de cet événement, j'ai décidé de tout recommencer. J'ai quitté mon ancien métier de journaliste radio et je me suis donné un ou deux ans pour réussir". Eurêka y voit aujourd'hui "la plus belle opportunité" de sa vie. Il en est encore très surpris : "je n'aurais jamais pensé avoir l'audace un jour de me lancer dans ce métier", confie le slameur en costume. Olivier, alias Ereûka, s'est lancé "à corps perdu" dans l'aventure.
Trouver confiance en soi
Gagner en self-estime, c'est aussi le message que cherche à donner le slameur à travers ses textes. Eurêka propose aussi des conférences musicales sur la confiance en soi et la poursuite de ses rêves. Des conférences intitulées : "S'écouter, trouver sa voie, vivre ses rêves". "J'ai envie de dire aux gens, écoutez-vous, vous avez un talent en vous, vous avez un potentiel que vous ne soupçonnez pas, ou alors un potentiel que vous sous-estimez. Il faut vous faire le cadeau de l'exploiter et de l'offrir aux gens qui vous entourent".
Des conférences destinées aussi bien aux adolescents, qu'aux adultes. "Je raconte ce parcours de la radio jusqu'au slam, comment je me suis lancé alors que personne n'y croyait à part moi. Je donne des clefs aux collégiens et aux lycéens sur comment croire en leur potentiel, croire en leur talent et ne pas se laisser décourager par la peur d'échouer ou le regard des autres."
La crise Covid n'arrête pas le slameur
En 2020, alors que le monde de la culture se met en mode "pause" pour une durée indéterminée, Eurêka a donné des dizaines de représentations. Il a même battu son record. Entreprises, bibliothèques, collèges et lycées remplacent les scènes de spectacles. En 2021, le slameur lyonnais continue à se produire dans les établissements scolaires, face à des adolescents souvent bluffés. Jusqu'à deux à trois concerts par semaine, avant le confinement d'avril.