La polémique continue d'enfler à Lyon : les menus sans viande dans les cantines des écoles sont toujours critiqués par les éleveurs qui manifestent lundi 22 février et organisent un barbecue devant les bureaux du maire. Le préfet du Rhône a été saisi, il va lancer un contrôle de légalité.

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Les éleveurs ont prévu de manifester lundi 22 février devant l'Hôtel-de-Ville de Lyon pour protester contre la décision sanitaire de la mairie de ne proposer qu'un menu unique et sans viande, dans les cantines des écoles de la ville.

"Il est nécessaire d'avoir un repas équilibré"

Pour la FDSEA et les Jeunes Agriculteurs, "nous ne laisserons pas tout passer sous prétexte de crise sanitaire". La mesure de supprimer la viande dans les cantines doit durer 7 semaines, une décision uniquement prise à l'aune de la pandémie actuelle selon les services de la mairie, qui a déjà promis de revenir aux menus classiques après la crise du Covid. Mais ces précisions ne rassurent pas du tout les éleveurs. Le syndicat rentre à son tour dans ce débat qui dure depuis quelques jours, avec cette fois-ci des arguments environnementaux et nutritionnels: "Il est nécessaire d'avoir un repas équilibré nutritionnellement et diversifié" écrit la FDSEA dans un communiqué. "Nous rappelons que des légumes ou légumineuses ne sont pas des menus de substitution car ils n'ont pas la même valeur nutritionnelle qu'un morceau de viande. Nous ne sommes pas aux Etats-Unis ou en Amérique du Sud. Nos modèles d'élevage apportent une complémentarité agronomique, une biodiversité. On nous parle d'impact environnemental alors qu'on s'apprête à signer les accords du Mercosur ! La crise du covid n'excuse pas tout."

En signe de pied-de-nez, les éleveurs ont installé une mini-ferme symbolique devant les bureaux du maire EELV de Lyon Grégory Doucet, avec évidemment un barbecue et une dégustation, de viande bien-sûr. Une vache dans son enclos et deux petits chevreaux sont encadrés par de nombreux gendarmes.

Pour Pascal Girin, président de la FDSEA du Rhône, "il n'est pas acceptable d'imposer un mode de consommation à des enfants de primaire alors qu'ils n'ont rien demandé, alors que la plupart des parents veulent un repas équilibré. Pour moi ce n'est pas digne d'un fonctionnement républicain."

"Des mesures idéologiques

La polémique a été lancée par l'opposition de droite au conseil municipal. "Cette manière d'asséner un choix, sans aucune alternative possible, est proprement inadmissible", s'est indigné jeudi dernier son chef de file Étienne Blanc, candidat malheureux à la mairie l'an dernier. "Dans la ville de la gastronomie, la majorité écologiste profite de la crise sanitaire pour faire passer des mesures idéologiques sans aucune concertation", abondait Béatrice de Montille, élue LR dans le 3e arrondissement.

Le ministre des Comptes publics, Olivier Dussopt, a fustigé dimanche "un choix anti-social et doctrinaire". "Je suis toujours pour qu'on laisse le choix aux élèves. Il ne faut pas que ce soit une décision idéologique", déclarait de son côté le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, interrogé lors de l'émission Le Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI. Jeudi, dans un entretien avec l'AFP, M. Denormandie avait appelé les élus locaux à "faire le pari" de la viande de jeune bovin dans les menus scolaires, afin de soutenir des éleveurs. 

Le préfet lance un contrôle de légalité

La saisine du préfet se fonde sur un arrêté de 2011 fixant les règles nutritionnelles dans la restauration scolaire, selon lequel "au moins quatre repas", sur vingt consécutifs, doivent être servis "avec, en plat protidique, des viandes non hachées de boeuf, veau, agneau ou des abats de boucherie".  Interrogé sur l'absence de réaction l'an dernier, le cabinet du ministre de l'agriculture a évoqué "une vraie différence de situation entre mai et maintenant: nous ne sommes plus dans une situation d'urgence, face à une situation exceptionnelle".

Selon nos informations, la préfecture du Rhône va procéder à un contrôle de légalité ces prochains jours, à la demande du gouvernement, pour vérifier que cette décision municipale respecte bien le code des collectivités territoriales. Cette procédure exceptionnelle doit vérifier le côté juridique de la décision.

Les éleveurs doivent être reçus dans l'après-midi par la préfecture.

La polémique enfle

De l'idéologie dans les assiettes? Le gouvernement lui-aussi continue de reprocher à la mairie écologiste de Lyon d'imposer ce menu sans viande dans les cantines.

La mairie se défend en évoquant un choix lié aux contraintes sanitaires, une mesure déjà appliquée l'an dernier par l'ancienne municipalité  de Gérard Collomb, sans choquer personne. La mairie explique qu'à la demande de l'Éducation nationale, une distanciation de deux mètres doit être respectée entre les enfants à la cantine, ce qui revient à faire manger moins d'élèves en même temps à partir de lundi, jour de rentrée scolaire dans notre région. Le recours temporaire au menu unique vise à fluidifier le service afin que tous les repas - 29.000 par jour - puissent être servis durant le temps du déjeuner, étalé de 11H30 à 13H45.

"C'est tout simplement du bon sens"

Sans viande mais avec oeufs et poisson, ce menu "reste équilibré" et permet "de n'exclure aucun enfant", affirme l'adjointe à l'Éducation, Stéphanie Léger, sans étiquette. "C'est tout simplement du bon sens pratique", justifie le maire EELV Grégory Doucet. En rappelant, au passage, que le même choix avait été fait à la sortie du premier confinement, au printemps dernier, par la précédente équipe de Gérard Collomb. À défaut de viande, personne n'avait alors décelé la moindre idéologie dans les assiettes. "Que la droite qui s'est alliée à mon prédécesseur au moment des municipales (en juin, ndlr) crie à l'idéologie aujourd'hui, me fait sourire", avait ajouté M. Doucet vendredi soir sur franceinfo.

Consommer "plus local, plus végétal et durable"

À Lyon, au-delà de la polémique, l'exécutif veut profiter de l'échéance prochaine du contrat d'Elior, groupe de restauration collective titulaire de la délégation de service public, pour consommer "plus local, plus végétal et durable" dans les cantines scolaires. Une politique qui va dans le sens du "plan protéines végétales" mené par le gouvernement, selon M. Doucet.

Lors d'une rencontre ce jour avec les représentants de la filière bovine, la ville de Lyon a réaffirmé son soutien à l'agriculture locale. "Nos politiques publiques participeront à améliorer l’autonomie alimentaire du territoire, c’est-à-dire à favoriser l’accès des populations aux produits locaux plutôt qu’aux produits d’imports".

Gautier Chapuis, conseiller délégué à l’alimentation locale, a indiqué que le futur contrat de restauration scolaire prévoit pour la première fois la création d’une commission bi-annuelle qui réunira la Ville de Lyon, le futur contractant du marché et les représentants du secteur agricole afin de favoriser les synergies locales et reterritorialiser l’écoulement des filières (50% de produits locaux contre 30% aujourd’hui issus d’un rayon de 50km).

À l'issue de cette rencontre à l'hôtel de ville, Pascal Girin a de son côté proposé que d'ici les vacances de Pâques, "et comme le préconise la législation, un repas par semaine soit servi avec de la viande".

Une proposition de sortie de crise

Le groupe "Droite, Centre et Indépendants" a protesté contre cette décision en ouverture du Conseil municipal ce lundi, par la voix de Béatrice de Montille, conseillère du 3e arrondissement : "Nous avons formulé une proposition simple au maire de Lyon pour sortir de cette position idéologique et se mettre en conformité avec la loi : intégrer au moins un repas par semaine avec de la viande, pendant toute la durée du nouveau protocole sanitaire, les autres repas de la semaine pouvant comporter du poisson, ou des œufs, de façon à contenter tout le monde."

Le maire de Lyon lui a répondu: "Nous ne sommes pas dans une opération de promotion du 'végétarianisme' ou du véganisme puisque nous allons offrir des protéines animales aux enfants chaque jour", comme du poisson et des oeufs. La mairie a pris "une décision de gestion de crise sanitaire" et "on attend du gouvernement qu'il cesse les polémiques et qu'il nous soutienne", a renchéri Bruno Bernard, président EELV de la Métropole de Lyon, sur BFMTV. "C'est un manque de respect pour les élus locaux et ça montre aussi que ce gouvernement a un problème avec l'écologie."

La réaction d'Olivier Véran en visite à Lyon

"Il n'y a pas lieu de polémiquer", a estimé le ministre de la Santé, Olivier Véran. "Je comprends que dans les familles en précarité, la viande, le poisson peuvent coûter cher, donc quand on met son enfant à l'école et à la cantine, c'est aussi l'occasion pour l'enfant d'avoir des protéines animales qui sont importantes dans un régime nutritionnel", a déclaré M. Véran à la presse en marge d'un déplacement dans une Caisse d'allocations familiales (CAF) à Lyon. "A côté de ça, je ne suis pas choqué qu'on puisse proposer des menus sans viande ni poisson à l'école. La question, c'est quelle est la motivation sous-jacente. Il n'y a pour moi pas lieu de polémiquer, mais une attention à porter au régime alimentaire des enfants", a-t-il ajouté.

 

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