Des membres des collectifs Extinction rebellion et Youth for climate ont réussi à s'introduire à l'intérieur du site de Pierre Bénite, près de Lyon, ce samedi 2 mars. Une action pour dénoncer les pollutions dont est responsable Arkema.
A l'aide de pinces coupantes, ils ouvrent les grillages. Aussitôt, les uns après les autres, ils pénètrent au cœur d'un site particulièrement sensible.
Près de 300 militants activistes se sont mobilisés, ce samedi 2 mars après-midi, et environ 150 d'entre eux sont entrées dans l'enceinte d'Arkema, pour dénoncer les pollutions aux PFAS dont est accusée l'entreprise Arkema de Pierre-Bénite, près de Lyon. De nombreuses forces de police sont intervenues et ont procédé à des interpellations.
Action coup de poing
Le détail de l'action était resté secret jusqu'à son exécution. Peu après 15 heures, environ 150 militants des collectifs Extinction rebellion et Youth for climate entrent par une brèche qu'ils viennent d'ouvrir dans le grillage du site. A l'intérieur, ces personnes masquées et revêtues de combinaisons blanches déploient des banderoles, notamment une grande, qui alerte : "poison". Une autre dénonce : "Arkema, producteur de polluants éternels depuis 1960 !". Des inscriptions à la peinture accusent l'entreprise pour ses pollutions environnementales avérées. Des sacs de mortiers sont déployés et une chaîne humaine est constituée par d'autres militants, bras dans les bras, pour ralentir l'intervention des forces de l'ordre.
Huit interpellations
Peu après 15h, face à l'ampleur de la mobilisation, les forces de l'ordre s'avèrent insuffisantes en nombre. Des renforts affluent rapidement. En plus d'une compagnie de CRS, des policiers de la sécurité publique et des membres de la BAC interviennent. Des bombes lacrymogènes sont utilisées et des interventions ont lieu à l'intérieur comme à l'extérieur du site. Finalement, les militants sont rapidement évacués, et huit personnes sont interpellées. Sollicité, le parquet de Lyon n'était pas disponible à ce stade pour répondre à France 3 sur les éventuelles poursuites qu'elles encourent. L'entreprise a déjà indiqué qu'elle porterait plainte suite à l'intrusion et aux dégradations constatées.
Arkema indique par ailleurs avoir lancé une "inspection générale du site, pour s’assurer que tout était sous contrôle au niveau de la sécurité et [ses personnels] sont en train d’évaluer la nature des dégradations". Selon la préfecture du Rhône, les constatations étaient toujours en cours en fin d'après-midi. "Au plus fort de l'action, on estime que 150 personnes étaient à l'intérieur du site", relèvent les forces de l'ordre.
Arkema, source de pollutions aux PFAS
L'entreprise Arkema est régulièrement mise en cause pour son rôle avéré dans la diffusion dans l'environnement de diverses substances liées aux PFAS, utilisées dans de nombreux produits, notamment dans les poêles antiadhésives. Ces "polluants éternels" sont connus pour leur persistance à très long terme dans l'environnement et dans le corps. L'agence Régionale de santé d'Auvergne-Rhône-Alpes a récemment publié des résultats préoccupants sur la présence de PFAS détectée dans les communes environnantes du site d'Arkema, mais aussi, plus largement, dans toute l'agglomération lyonnaise ainsi que dans différents points d'eau potable de la région.
L'entreprise fait valoir qu'elle est, "depuis de nombreuses années, dans une démarche d’amélioration de la performance environnementale de ses installations." Depuis novembre 2022, elle a mis en place un dispositif de filtration lui permettant "de réduire les rejets de l’additif fluoré de plus de 90%". Par ailleurs, elle indique que ses précédents investissements en recherche lui permettront "de fabriquer ses produits sans aucun recours à des additifs fluorés d’ici la fin 2024."
Un site Seveso sensible
La plate-forme industrielle Arkema de Pierre-Bénite fait partie des sites considérés comme sensibles par les autorités, classé "Seveso seuil haut". L'apparente simplicité avec laquelle les militants ont pu pénétrer à l'intérieur du site pourrait donc également soulever d'importantes questions de sécurité pour l'entreprise et pour les populations environnantes.
D'autant que les militants exprimaient leur intention, dans un communiqué publié sur leurs sites, de procéder à "un bidouillage technique des ateliers et machines qui, aujourd’hui encore,ont pour conséquences le rejet de plus de 300 kg/an de [PFAS]". La rédaction de France 3 n'était pas en mesure de confirmer si des installations avaient été atteintes par l'intervention des militants.
Pierre Clousier, directeur du site de Pierre Bénite, a relevé, dans un communiqué, que "cet acte (...) peut faire courir des dangers aux salariés et aux manifestants, en raison de l’activité industrielle du site, classé Seveso". Il condamne par ailleurs "un acte qui perturbe fortement l’outil de travail de plus de 500 salariés." Le site avait déjà été ciblé en décembre 2022 et l'entreprise avait déjà porté plainte.