Pédophilie dans l'Eglise : un an après, le rapport explosif de la commission Sauvé

La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise (Ciase), présidée par l'ancien vice-président du Conseil d'Etat, Jean-Marc Sauvé, avait révélé le 5 octobre 2021 l'ampleur du nombre de victimes de violences sexuelles depuis 1950. Un rapport explosif : le nombre des victime était évalué à 330 000. Retour sur ce séisme dans l'Eglise catholique.

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Il y a tout juste un an, le 5 octobre 2021, le rapport de la Ciase, présidé par Jean-Marc Sauvé, était dévoilé au grand public. Jean-Marc Sauvé, a présenté publiquement son rapport de 485 pages et 2 000 d'annexes. Un rapport accablant qui révélait l'ampleur du phénomène de pédocriminalité dans l'Église catholique et qui venait mettre fin à plusieurs décennies d'omerta. 

330 000 victimes d'abus : coup de tonnerre dans l'Eglise

Les chiffres révélés alors ont provoqué un séisme. Le rapport faisait état de 216 000 enfants abusés par des religieux depuis les années 50. Un chiffre évalué à 330 000 si on intègre les victimes des laïcs au service de l'Eglise. "Par leur ampleur, ces nombres sont bien plus que préoccupants. Ils sont accablants et ne peuvent en aucun cas rester sans suite. Ils appellent des mesures très fortes", avait déclaré Jean-Marc Sauvé devant une assemblée silencieuse et médusée, le jour de la présentation officielle du rapport de la Ciase. 

Après la famille, l'Eglise est le milieu où les agressions sexuelles sont les plus élevées, toujours selon ce rapport. 2,8% des religieux sont des prédateurs. Ils seraient entre 2900 et 3900 hommes, prêtres ou religieux en France à avoir sévi depuis les années 50. Une estimation "minimale" selon le rapport.

Colère et indignation de François Devaux 

Le Lyonnais François Devaux, victime du père Preynat, était présent lors de la présentation du rapport. Le co-fondateur de La Parole Libérée n'a pas retenu sa colère et son dégoût. Il avait eu des paroles très dures pour qualifier l'attitude de l'Eglise en matière d'abus sexuels : "C'est bien dans les méandres les plus vicieux et les plus insupportables que vous êtes descendus. Si bas ! Si nauséabonds !".

La Parole Libérée, association fondée en décembre 2015 et à présent dissoute, a été à l'origine de l'affaire Preynat et des procès du Cardinal Barbarin. Un scandale qui a secoué le Diocèse de Lyon et qui a également entraîné la démission du prélat. Une association qui a fait bouger les lignes avec une affaire qui a aussi été aux prémices de la Ciase.

Mais alors que l'Institution semblait enfin reconnaître sa responsabilité après des décennies d'omerta, François Devaux préférait rester prudent. "Il serait naïf que de renouveler sa confiance les yeux fermés à cette institution qui n'a cessé de trahir sur les crimes les plus abjects", avait-il déclaré le 5 octobre 2021 en marge de la présentation du rapport de la CIASE.

"J'ai honte de ce qui s'est passé"

La Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Eglise a travaillé durant plus de 30 mois pour rendre ses conclusions et pour mesurer l'ampleur des abus et agressions sexuelles commises par des religieux, des prêtres et des laïcs. Ses membres ont sillonné la France pour entendre les témoignages de victimes. Plus de 6000 au total. La commission a également exploré les archives des diocèses et des congrégations.

A Lyon, le rapport Sauvé avait recensé 76 prêtres pédophiles. "Personnellement, ce rapport me bouleverse, m' écœure et me scandalise. Les personnes victimes que j'ai rencontré m'ont aidé à prendre conscience du traumatisme que représentent ces actes odieux", avait déclaré l'archevêque de Lyon, Olivier de Germay, lorsque le rapport a été dévoilé. "J'ai honte de ce qui s'est passé, de ces actes inqualifiables", avait alors ajouté le Primat des Gaules, successeur du Cardinal Barbarin, en guise de "mea culpa". La ville de Lyon avait été marquée par les deux procès du cardinal Philippe Barbarin. 

Si l 'église s'est montrée pétrie de honte après la publication du rapport Sauvé, l'Institution a-t-elle répondu à la souffrance des victimes ? Le rapport a-t-il servi d'électrochoc pour l'Eglise ? A-t-il eu un effet sur les actions de prévention ? Où en est aujourd'hui l'indemnisation des victimes ?

Quid des réparations ?

Le rapport de la Ciase préconisait d'individualiser le calcul de l'indemnisation due à chaque personne en fonction des préjudices. Il proposait de financer les indemnités à partir du patrimoine des agresseurs et de l'Église de France. 

" La question de l'indemnisation n'est pas un don, c'est un dû. Nous considérons que les victimes ont une créance, et que l'Eglise a contracté une dette à leur égard ", avait déclaré Jean-Marc Sauvé, président de la Ciase.

Deux commissions ont vu le jour dans le sillage de la publication du rapport Sauvé. Ces deux instances sont en charge de la reconnaissance et de la réparation des actes pédocriminels au sein de l'Église catholique. Il s'agit de l'Inirr (Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation) et de la CRR (Commission Reconnaissance et Réparation). Ces deux instances auraient reçu près de 1 500 demandes. 

Mais les dossiers traînent : nombreuses sont les victimes qui attendent toujours d'être recontactées. La grande majorité attend aussi de connaître le montant des réparations auxquelles elles peuvent prétendre. Des associations de victimes déplorent aujourd'hui la lenteur du traitement des demandes. La bataille pour la reconnaissance de leur préjudice est encore loin d'être terminée.

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