Témoignage. "Les soldats avaient des branches dans les casques, le visage noirci et faisaient le V de la victoire", Blanche Boulet, 105 ans, raconte son D-Day

Publié le Écrit par Ana K. et Sandie Goldstein

C'était il y a 80 ans, les alliés débarquaient en Normandie. Ce 6 juin 44, la grande Histoire percute l'histoire toute simple de Blanche Boulet. Décorée de la légion d'Honneur, la centenaire décrit le D-Day tel qu’elle l'a vécu en Normandie.

Un ciel assombrit par une nuée d'avions, autant de bateaux, des soldats alliés en ligne, il est des images d'une force évocatrice incontestable. Ces images vues et revues, en noir et blanc, Blanche Boulet les a vécues "en vrai". Sa mémoire est intacte, elle partage ses souvenirs.

Début juin 1944, les combats font rage

C'est dans sa maison à Marcy-l'étoile, dans la banlieue lyonnaise que vit Blanche Boulet. Originaire d'Ouistreham, à 105 ans, sa vivacité fait envie. Alerte et autonome, elle nous ouvre son album photos.

Le 6 juin 1944, elle a 25 ans, les troupes anglaises et le commando Kieffer débarquent dans le petit coin de Normandie où vit Blanche.

Les combats font rage pour s'emparer des fortifications du mur de l'atlantique, défendu par les Allemands. C'est le jour le plus long de Blanche. Après une nuit sans sommeil, au petit matin, spontanément elle se rend dans un poste de secours improvisé. Les premiers blessés militaires et civils arrivent.

C’était une angoisse terrible, dit-elle, j'ai soigné comme un automate. Nous n'avions ni eau, ni électricité et peu de pansements.

Blanche Boulet

"C’était une angoisse terrible, dit-elle, j'ai soigné comme un automate. Nous n'avions ni eau, ni électricité et peu de pansements. À mains nues, nous avons soigné tous ces blessés", dit-elle avec émotion dans la voix. 

"Il y avait une vieille grand-mère, qui avait le visage criblé d'éclats de verre, que je lui ai enlevé pendant des jours", se remémore-t-elle.

Des scènes gravées dans sa mémoire

"Un moment après, nous avions un jeune anglais nommé John, qui était là sur son brancard, et peut-être une heure après, deux autres soldats -"what is your name ?" (quel est votre nom) demande le docteur, "Mais nous sommes français ! Nous sommes venus combattre, avec nos alliés et le commandant Kieffer"ont répondu les soldats."

Blanche raconte les dialogues, auxquels elle a assisté, en gardant le ton et l'enthousiasme des protagonistes.

"Vers 3 h heures, reprend Blanche, deux tanks sont passés, suivis de soldats qui avaient des casques garnis de branches, le visage noirci, faisant le V de la victoire". Comme si elle y était de nouveau Blanche prend une grande inspiration pour poursuivre son récit, "À ce moment-là, des avions passaient, et on les voit larguer des parachutes avec des conteneurs aux hommes qui tenaient les ponts d'Hérouville et de Ranville, puis une nuée d'avions, d'innombrables avions, allaient semer la mort sur Caen et sa terrible bataille commençait."

La bataille de Normandie s'achève le 30 août 1944, durant 63 jours Blanche Boulet a porté secours aux civils et aux soldats. Un comportement héroïque pour lequel elle a reçu la légion d'honneur. 

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