L'Etat français doit boucler le financement des études sur le tracé du Lyon-Turin avant la fin du mois de janvier s'il veut obtenir des aides de plusieurs millions d'euros de la part de l'Union européenne. Considéré comme le "chantier du siècle" en Savoie, ce projet destiné au fret est estimé à plusieurs milliards d'euros.
À l'approche d'une importante échéance européenne, l'Etat français et les collectivités locales n'ont pas encore bouclé le financement des études sur le tracé français du Lyon-Turin, toujours en débat trente ans après le lancement de ce projet du siècle en Savoie.
L'enveloppe globale pour les "études d'avant-projet" de cette ligne ferroviaire à grande vitesse transalpine est de 220 millions d'euros, portant principalement sur les voies d'accès françaises, ainsi que sur le "CFAL-Nord", le contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise.
L'Union européenne est susceptible de subventionner les études à hauteur d'un peu plus de 90 millions d'euros, à condition que la France dépose son dossier avant le 31 janvier. Elle doit donc trouver d'ici là un accord de financement.
Des millions à trouver
À une semaine de l'échéance, il manque 40 millions d'euros, selon une source proche du dossier. La moitié pourrait être prise en charge par l'Etat, qui mobilise déjà près de 65 millions d'euros. Pour le reste, une dizaine de collectivités locales sont sollicitées : des agglomérations, des départements, et la région.
La semaine dernière, une nouvelle réunion entre les représentants de l'Etat et ces collectivités n'a pas été conclusive. "Ça fait plusieurs semaines, plusieurs mois que ces discussions ont lieu. (....) On espère aboutir d'ici la fin du mois", assure-t-on du côté du ministère français de la Transition écologique, qui chapeaute les Transports depuis le dernier remaniement gouvernemental. C'est "une étape importante pour la suite du projet", les études devant permettre d'arrêter le tracé définitif des voies côté français.
La construction des infrastructures ferroviaires de ce côté de la frontière représentera ensuite un investissement de l'ordre de 10 milliards (valeur 2020 hors inflation), selon une estimation officieuse du ministère des Transports.
À la recherche de financeurs
Le coût global du Lyon-Turin avait été évalué à 12 milliards d'euros en 2002. En 2012, la Cour des comptes à Paris le chiffrait à 26,1 milliards d'euros, aucune nouvelle estimation n'a pas été communiquée depuis.
On est le premier financeur en tant que collectivité locale, et de très loin.
Laurent Wauquiez, président (LR) de la région Auvergne-Rhône-Alpes
Concernant le financement des études, la Région Auvergne-Rhône-Alpes avait annoncé mi-novembre qu'elle apporterait 13 millions d'euros, soit "à peu près un tiers de ce qui est attendu des collectivités locales". "Je ne me suis jamais dérobé" sur le sujet, a assuré vendredi à l'AFP le président LR de la Région Laurent Wauquiez, en soulignant avoir proposé deux millions supplémentaires pour le projet via le volet mobilité du Contrat Plan Etat-région.
"On est le premier financeur en tant que collectivité locale, et de très loin", a-t-il souligné, renvoyant la question à l'Etat, mais aussi aux agglomérations écologistes de Lyon et Grenoble, et à celle de Chambéry.
La Métropole de Lyon reconnaît que la ligne transalpine n'est pas sa priorité, contrairement à la ligne de contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise - partie nord, le "CFAL Nord", jugée indispensable au développement du trafic fret qui traverse actuellement la ville, et aux "RER du quotidien".
La métropole envisage, dans le cadre des discussions en cours et sous conditions, "de mettre jusqu'à 5 millions sur le CFAL Nord, qui fait bien partie de la globalité des accès de cette infrastructure du Lyon-Turin", a expliqué son président Bruno Bernard à l'AFP.
Travaux italiens programmés
Le chantier de ligne à grande vitesse entre Lyon et Turin vise à réduire le transport de marchandises en camion à travers les Alpes au profit du rail. Il se découpe en trois parties : les accès français (150 km), les accès italiens (60 km) et le tunnel de base du Mont-Cenis (57,5 km), qui deviendra le plus long tunnel ferroviaire au monde.
Fin 2022, le gouvernement italien avait acté la programmation de 750 millions d'euros pour les voies reliant Turin au tunnel de base. Mais côté français, aucune décision n'a encore été prise sur le parcours des voies ferroviaires jusqu'au tunnel. Les dernières préconisations du Conseil d'orientation des infrastructures (COI) avaient inquiété les partisans du projet avec un scénario repoussant le volet français au mitan des années 2040.
Les opposants au Lyon-Turin dénoncent un projet "pharaonique" et "néfaste" pour l'environnement, la biodiversité et les ressources en eau. Pour ses soutiens, il participerait à la décarbonation en retirant plus d'un million de camions des routes de la région.