Lyon-Turin : cinq choses à savoir sur ce projet ferroviaire, considéré comme le "chantier du siècle" en Savoie

Le chantier du Lyon-Turin fait l'objet d'une manifestation d'opposants à ce projet ferroviaire, à l'appel du collectif Les Soulèvements de la Terre, ce week-end des samedi 17 et dimanche 18 juin. Voici, en cinq points, les informations clés pour comprendre ce "chantier du siècle" en Savoie.

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Un important rassemblement, à l'appel du collectif Les Soulèvements de la Terre, est prévu en Maurienne ce week-end des samedi 17 et dimanche 18 juin. Les manifestants entendent s'opposer au projet du Lyon-Turin, une ligne ferroviaire destinée au fret, qui doit traverser les Alpes jusqu'en Italie.

Voici cinq choses à savoir sur ce dossier, qui cristallise de nombreuses tensions dans les Alpes du Nord. 

À quoi doit-il servir ?

Depuis la naissance du projet dans les années 1980, la liaison ferroviaire transalpine a changé de forme à de nombreuses reprises. Un temps envisagé pour le transport de voyageurs, le projet actuel fait désormais la part belle au fret. Objectif annoncé par les promoteurs du Lyon-Turin : réduire le transport routier, notamment des camions de marchandises dans les Alpes du Nord, afin de désengorger dans des zones sous tension comme la vallée de l'Arve et le tunnel du Mont-Blanc.

Sur les 44 millions de tonnes de marchandises qui transitent chaque année dans l'arc alpin, le projet du Lyon-Turin permettrait d'en absorber 25 millions sur les rails. Contre seulement une poignée de millions à l'heure actuelle, qui transitent par une "ligne historique" passant par Modane pour traverser le Mont-Cenis et ressortir à hauteur de Bardonnèche, en Italie.

Pourquoi est-il contesté ?

Ce projet est décrié depuis de nombreuses années par des associations et personnalités politiques. Notamment du fait que la "ligne historique" serait sous-exploitée. Elle devrait permettre de transporter près de 10 millions de tonnes de marchandises par an. Mais seules 2,9 millions de tonnes ont été mises sur les rails de cette ligne, en 2018. Les opposants s'interrogent donc sur la nécessité de construire une nouvelle ligne, alors que le tracé historique n'est pas exploité à son plein potentiel.

Un récent rapport du Comité d'orientation des infrastructures (COI), instance consultative placée auprès du ministre chargé des Transports, avait notamment donné la priorité à une modernisation de la ligne existante entre Dijon et Modane. Cette modernisation permettrait le transport de 16,8 millions de tonnes de fret par an. Soit 67 % de l'objectif de 25 millions de tonnes par an.

"On ne s'oppose pas au train. C'est le mode de transport qu'il faut favoriser. Mais là, on s'oppose à la construction d'une ligne juxtaposée à une ligne qui existe déjà. Même si c'est pour gagner une heure de trajet, c'est absurde", explique Pina, porte-parole des Soulèvements de la Terre, ce vendredi en marge des manifestations du week-end.

C'est un problème pour l'environnement et les populations de ces vallées.

Pina, porte-parole des Soulèvements de la Terre.

"Ce sont des milliers de tonnes de gravats qui doivent être évacuées, de la poussière à n'en plus finir. C'est un problème pour l'environnement et les populations de ces vallées", poursuit-elle. Car ce chantier est surtout critiqué pour ses conséquences environnementales. Les opposants au Lyon-Turin mettent en avant le captage et l'accaparement d'eau souterraine pour mener à bien les chantiers, l'artificialisation de 1 500 hectares de terres agricoles et forêts, les émissions de dioxyde de carbone ainsi que les tonnes de déchets déplacés pour creuser les tunnels.

En Italie, également concernée par les mêmes problématiques, un mouvement populaire appelé "No Tav" s'est créé dans les années 90 pour s'opposer au Lyon-Turin. Très implanté dans le val de Suse, qui débouche sur Turin, le mouvement a déjà réuni des dizaines de milliers de personnes lors de manifestations par le passé.

Combien coûte le projet ?

La question est au centre des attentions. Notamment pour les gouvernements français et italiens qui comptent sur un soutien financier de l'Europe. Si les chiffres diffèrent selon les sources, la Cour des comptes a, un temps estimé, le coût total à 26 milliards d'euros.

Le seul "tunnel de base international" (il s'agit du tunnel sous la Maurienne entre la France et l'Italie ; des voies d'accès sont construites côté français notamment en Isère et Savoie pour rejoindre cette galerie, ndlr) est estimé entre 8 et 9 milliards d'euros, financés entre la France, l'Italie et l'UE.

Quel est le tracé ?

En France, le tracé pour rejoindre le "tunnel de base" a fait l'objet de très longues discussions. Trois scénarios ont été envisagés, dont deux ont retenu l'attention du gouvernement :

  • le "scénario mixte" marchandises/passagers : il a été plébiscité par de nombreux élus locaux, dont le maire (DVG) de Chambéry, où devait passer ce tracé ;
  • le "scénario grand gabarit" : une ligne ferroviaire quasiment réservée au fret avec la construction de trois tunnels (sous la Chartreuse, sous Belledonne et sous le col du Glandon).

C'est ce dernier scénario qui a été privilégié par le ministre des Transports, Clément Beaune, fin 2022. Ce scénario fait la part belle au fret et permettrait d'atteindre l'objectif de 28 millions de tonnes de marchandises transportées tous les ans.

Quelles échéances ?

En juin, 32,5 km de galeries ont déjà été réalisés sur les 162 km au total. Les chantiers n'en sont donc qu'à leur début. Depuis son lancement, le projet du Lyon-Turin a en effet pris du retard. Le tunnel transfrontalier, long de 57,5 km et en cours de creusement, doit désormais être livré en 2032.

Cela ne veut pas pour autant dire que des trains circuleront sur le Lyon-Turin en 2032. Si l'Italie a pris la décision de livrer ses voies d'accès en même temps que le tunnel de base, ce n'est pas le cas en France. En avril, une soixantaine de parlementaires, de différents bords politiques, ont lancé un appel à Emmanuel Macron pour accélérer la construction des voies d'accès françaises, craignant de voir le projet repoussé au-delà de 2045 comme le préconise le Conseil d'orientation des infrastructures (COI).

Ils demandaient de "lancer au plus vite les études d'avant-projet détaillé (APD) de la section française". Sans cela, au-delà de 2028, le projet n'aura plus de base légale. "La déclaration d'utilité publique (DUP) ne sera pas prolongée", indiquaient les parlementaires. Cela rendra alors constructibles des pans entiers de l'itinéraire reliant Lyon à Saint-Jean-de-Maurienne, une région soumise à une forte pression foncière.

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