Saint-Pierre-d'Entremont est la première commune de Savoie à prendre un arrêté interdisant les pesticides. Cette initiative, jugée illégale par le préfet, s'ajoute à une centaine d'autres appliquées par des maires à travers la France.
La vague anti-pesticides a atteint la Savoie depuis que la commune de Saint-Pierre-d'Entremont a pris un arrêté en ce sens. Prenant exemple sur le maire de Languouët (Ile-et-Vilaine) et une centaine d'autres qui ont suivi le mouvement, la première magistrate de ce village a fait appliquer un texte prévoyant l'interdiction d'utilisation de produits phytopharmaceutiques de synthèse à moins de 150 mètres des habitations.
En Isère, Grenoble, Eybens et Malleval-en-Vercors ont voté des textes similaires. Pour la maire de Saint-Pierre-d'Entremont Brigitte Bienassis, il s'agit avant tout de "protéger les habitants des risques dus à l'utilisation des pesticides". Quelques années auparavant, dans la même lignée, l'édile avait pris un arrêté anti-OGM visant notamment à interdire ces organismes dans les produits servis en restauration collective.
Le village, comptant environ 500 âme, est niché sur les hauteurs du massif de la Chartreuse, au coeur d'un site naturel protégé. Aucun exploitant voisin n'utilise de pesticide aux abords de la commune, mais pour Brigitte Bienassis, il s'agit d'une "mesure de prévention". "Le parc de la Chartreuse est un territoire attractif parce que naturel et sain, c'est important de dire non", estime-t-elle.
Flou juridique
Si les premiers arrêtés de ce type avaient été retoqués par la justice, deux ont été maintenus par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui a rejeté la requête du préfet des Hauts-de-Seine, ceux de Sceaux et de Gennevilliers en région parisienne. L'Etat maintient que les maires ne sont pas compétents pour prendre de telles mesures, mais le flou est maintenant jeté autour de ce conflit de compétence.
La maire de cette commune savoyarde s'en réjouit : "On dirait que le vent tourne. Plus il y aura de communes à passer des arrêtés anti-pesticides, plus ça montrera l'insistance des élus à protéger la population". Les maires, "en tant que garants de la sécurité publique", doivent selon elle être reconnus compétents pour légiférer sur les pesticides. "Pour l'instant, l'Etat retoque les arrêtés mais ne fait rien", poursuit l'élue.
Alors en appliquant ce texte, Brigitte Bienassis espère "obliger l'Etat à se positionner de façon sérieuse" sur cette question. Le 26 juin, le Conseil d'État a en partie annulé un arrêté interministériel réglementant l'utilisation des pesticides, jugeant qu'il ne protégeait pas suffisamment la santé des riverains ni l'environnement.
Le gouvernement, qui a proposé un nouveau projet d'arrêté jugé minimaliste par les écologistes, a promis de tenir compte des résultats d'une consultation publique menée en septembre, qui a récolté plus de 50.000 avis. L'entrée en application des nouveaux textes est prévue pour le 1er janvier 2020.