Il sera le seul monument de Savoie a profiter des fonds du Loto du Patrimoine cette année. Construit entre 1882 et 1884, le bâtiment de l'octroi, situé en plein cœur d'Albertville, va être rénové après des décennies de dégradations. Une manière pour la capitale tarentaise de renouer avec son passé Belle Époque quelque peu oublié.
Si vous posez la question à un touriste sur la route des vacances ayant fait le choix de s'arrêter à Albertville, il y a toutes les chances qu'il vous parle de son intérêt pour les Jeux Olympiques d'hiver de 1992, ou de son désir de visiter la petite cité médiévale de Conflans qui domine le centre-ville... Mais peu de chance qu'il évoque les monuments de style Belle Époque de la capitale tarentaise.
Et pourtant, dès l'été 2025, c'est bien dans le bâtiment de l'octroi, un petit pavillon de 60 mètres carrés aux ornements "Liberty" que ces touristes viendront prendre dépliants et informations sur les lieux incontournables à visiter dans la cité olympique.
De l'officine des poids et mesures... à l'office du tourisme
C'est en effet une antenne de l'office du tourisme de la ville qu'est vouée à devenir la minuscule bâtisse. Sise sur une grande avenue très passagère, avec pour voisin de trottoir un palais de justice aux allures de paquebot des années 1980, et faisant face à l'imposante mairie dont la construction lui est tout juste antérieure (1860), le positionnement du bâtiment de l'octroi est central à Albertville.
"Pour ceux qui ne le sauraient pas, c'est la preuve qu'il y avait déjà une Albertville avant les Jeux de 92", explique tout sourire Frédéric Burnier Framboret, le maire de la ville. "Cette ville a été en grande partie aménagée après l'annexion de la Savoie à la France, entre 1860 et 1880. Ce qui explique que tous les bâtiments officiels sont très typés. Que ce soit la mairie, ou l'ancien palais de justice, ils ont tous un cachet, doublé d'un certain charme... Et ce bâtiment de l'octroi n'y déroge pas".
Un "charme" très particulier pour les contemporains de sa construction... Car comme son nom l'indique, ce bâtiment de l'octroi a été construit à des fins de collecte d'un impôt pas spécialement populaire : une taxe sur les marchandises, levée par la propriétaire des lieux, l'administration des poids et mesures.
"Depuis qu'il a été construit entre 1882 et 1884, il a failli être démoli plusieurs fois", explique encore le maire. "Plus personne ne le connaît par son nom, ni par la fonction qu'il a eue jusqu'à la fin des années 1940. Mais par contre, tout le monde le connaît visuellement lorsqu'il vient ici, ce petit bâtiment très mignon... Pas bien mis en valeur pour le moment, c'est vrai. Mais ça va changer !".
Un grand chantier
Un changement grandement facilité par les fonds bientôt mis à disposition par le Loto du Patrimoine. On n'en connaît pas encore le montant exact. Mais l'on sait déjà que l'on pourra compter sur une enveloppe pouvant aller jusqu'à 80 000 euros. Sur une facture de travaux de 150 000 euros, l'aide sera bien utile.
D'autant que, même discrète dans ses dimensions, la bâtisse nécessitera, sur chacun de ses deux étages de 30 mètres carrés, un énorme travail de rénovation, du sol au plafond.
"Pour l'extérieur, la toiture a déjà été refaite. Sur les maçonneries, on va pouvoir s'employer à restituer les moulures en ciment prompt, telles qu'on les faisait à Grenoble dès 1840", explique Sébastien Porcheret, le responsable du service "ville d'art et d'histoire" de la mairie. "En ce qui concerne les intérieurs, on va avoir fort à faire pour lui redonner du lustre, redéfinir les espaces : ça va nous occuper un petit moment".
Une nouvelle vitrine pour Albertville
Dès les premiers jours de 2025, la cure de jouvence du bâtiment de l'octroi va donc pouvoir commencer. Elle devrait durer environ six mois. Le temps d'évacuer les outrages du temps... Et des hommes qui ont ravagé ses intérieurs, pour laisser place à un spectacle de chaos général. Planchers défoncés, vitres et fenêtres brisées, plâtres et peintures boursouflés d'humidité...
"30 ans d'abandon produisent les mêmes effets sur votre maison que sur un bâtiment public", explique encore Sébastien Porcheret. "Sans affectation, sans chauffage, il va s'abîmer. Sans oublier que l'on est en centre-ville sur une voie de grand passage, ce qui attire les squats, les intrusions diverses et variées..."
Après 30 ans de déshérence, il faut remonter aux Jeux Olympiques d'Albertville en 1992 pour retrouver trace de la dernière utilisation connue de la maison de l'octroi. A l'époque, elle avait déjà été utilisée comme antenne de l'office du tourisme afin d'accueilir et de renseigner les visiteurs de passage lors de l'événement. La vie de la petite bâtisse s'était éteinte avec les derniers feux de la cérémonie de clôture. Le Loto du Patrimoine va lui redonner vie, pour en faire un trait d'union entre les différentes âmes historiques de la ville.
"Pour valoriser le patrimoine historique d'Albertville, on a toujours du mal à faire le lien entre la ville haute - médiévale - avec Conflans, et la ville basse - au centre-ville - qui date du XIXe siècle," note encore le spécialiste du patrimoine municipal. "Le bureau d'information touristique qui ouvrira ici, après les travaux, nous offrira une splendide vitrine touristique".