Deux cousins, âgés de 18 et 19 ans au moment des faits, sont jugés à partir de mardi 3 décembre 2013 devant la cour d'assises de Côte d'Or, face à 200 parties civiles. Ils sont accusés d'avoir provoqué l'incendie d'un foyer pour travailleurs immigrés à Dijon, le 14 novembre 2010, faisant 7 morts.
Le rappel des faits
Le 14 novembre 2010, vers 01H30, les résidents du foyer Adoma, situé dans le quartier de la Fontaine-d'Ouche à Dijon, sont réveillés par un incendie. Un simple feu de poubelle, dans un appentis adjacent, s'est propagé au bâtiment et a provoqué d'importants dégagements de fumée, envahissant ses neuf
étages.
Des témoignages de victimes
Un reportage de Pauline Ringenbach et Jean-François Guilmard, avec Michèle Brugère, magistrate chargée du secrétariat général de Dijon, Maître Jean-Philippe Morel, avocat des parties civiles et Orane Duchatel, présidente de l'Association d'Aide aux Victimes d'Infraction Pénale de Côte d'Or
"Réveillée par des hurlements"
Sept personnes décèdent. Âgées de 40 à 60 ans, l'une a sauté du septième étage et les six autres ont été asphyxiées. Trois sont de nationalité française, deux sénégalaises, une algérienne et la dernière vietnamienne.
Cent-quarante-et-un des 190 résidents du foyer étaient présents au moment du sinistre et tous ont été incommodés par les fumées. Soixante-douze d'entre eux ont été hospitalisés, dont 13 dans un état grave.
Parmi les familles présentes le soir du drame, l'une d'elles a "été réveillée par des hurlements", raconte son avocate, Me Virginie Nunes. "Ils ont vécu la cohue dans les escaliers, des gens se faisaient piétiner". "La mère et ses quatre enfants gardent un véritable traumatisme, ils font des cauchemars et les souvenirs sont toujours très présents", ajoute Me Nunes.
Selon un autre conseil des parties civiles, Me Géraldine Wendel, "ceux qui étaient présents ont vu les gens sauter par les fenêtres et mourir sous leurs yeux". "Ceux qui n'étaient pas dans le bâtiment ont subi des pertes matérielles, avec le regret d'avoir perdu leur petite vie et leurs papiers alors même que, pour les demandeurs d'asile, ils se trouvaient dans une situation administrative précaire". Quatre-vingt-treize pompiers étaient intervenus dont trois avaient été légèrement intoxiqués. A l'époque, cet incendie est le plus meurtrier en France depuis 2005.
Une dramatique "bêtise de jeunes"
Une enquête est ouverte, elle est confiée à la direction inter-régionale de la police judiciaire de Lyon et à la Sûreté départementale de la Côte-d'or. Deux jours plus tard, deux jeunes hommes, cousins, sont interpellés. L'un d'eux, âgé de 19 ans, est arrêté dans un hôpital psychiatrique à Dijon, où il avait demandé à être interné quelques heures après les faits. L'autre, 18 ans, était résident du foyer incendié.
Ce sont eux qui, "complètement paniqués", avaient prévenu les secours "au moment même du départ du feu", selon le procureur de la République à Dijon
à l'époque des faits, Eric Lallement. L'un d'eux s'était aussi répandu dans de nombreux médias, avec une foule de détails sur l'incendie, ce qui avait éveillé les soupçons des enquêteurs. Devant la police, les deux suspects reconnaissent alors qu'ils étaient présents sur les lieux au moment des faits, en se rejetant mutuellement la responsabilité de l'acte fatal.
Les coupables risquent la prison à vie
Déjà auteurs de feux de poubelles quelques mois auparavant en Côte-d'Or, les deux jeunes hommes comparaissent notamment pour "destruction de bien" par incendie "ayant entraîné la mort". Leur procès s'ouvre mardi devant la cour d'assises de Côte-d'Or et doit durer trois semaines au regard du nombre important de victimes, 185 personnes étant visées dans la procédure."J'espère que la cour va tenir compte du fait que c'était un acte stupide, véritablement une bêtise de jeunes à peine sortis de l'adolescence, et qu'il n'y avait aucune volonté de tuer des gens", a déclaré Me Alexis Janier, avocat de l'un des accusés. Tous les deux encourent la réclusion criminelle à perpétuité.