Mardi, l'Autorité de sûreté nucléaire a annoncé qu'une anomalie avait été détectée à Flamanville, dans la composition de l'acier du couvercle de la cuve, et du fond de cuve du réacteur EPR. Des pièces appelées "calottes", en partie fabriquées par Creusot Forge, filiale d'Areva.
L'anomalie signalée mardi par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sur la cuve du réacteur nucléaire en construction à Flamanville (Manche) risque de condamner ce réacteur ainsi que deux autres EPR en chantier en Chine, affirme jeudi l'organisation écologiste Greenpeace. "Si les tests en cours confirment l'anomalie (et il y a de fortes probabilités qu'ils la confirment) ces EPR sont condamnés à ne pas démarrer" car les cuves, dont l'acier fait l'objet de doutes, "sont a priori irremplaçables" une fois posées, a déclaré à l'AFP Yannick Rousselet, chargé des questions nucléaires à Greenpeace France.
"Jamais au monde pour le moment on a réextrait une cuve sans détruire tout ce qu'il y a autour", affirme Yannick Rousselet. Interrogé par l'AFP, le service de communication d'EDF, maître d'oeuvre du chantier de Flamanville, a indiqué ne faire "aucun commentaire". "Les enjeux sont considérables", ajoute Yannick Rousselet, pour qui il s'agit du plus gros problème jamais relevé sur un EPR (réacteur pressurisé européen).
Mardi, l'ASN a annoncé qu'une "anomalie" avait été détectée à Flamanville "dans la composition de l'acier du couvercle de la cuve, et du fond de cuve", deux pièces appelées calottes. Outre Flamanville, trois réacteurs EPR sont en construction dans le monde, en Chine et en Finlande. Or "certaines calottes des cuves des réacteurs de Taïshan 1 et 2 (Chine) ont été fabriquées par Creusot Forge, filiale d'Areva, selon un procédé similaire à celui de la cuve de l'EPR de Flamanville", a précisé mercredi le gendarme du nucléaire dans un communiqué. Ce n'est pas le cas des calottes de la cuve de l'EPR d'Olkiluoto en Finlande, qui proviennent d'un autre fournisseur.
Areva doit réaliser des expertises d'ici octobre
Areva doit réaliser d'ici octobre des expertises pour confirmer ou infirmer "l'anomalie" apparue au cours de "premières mesures". "Un couvercle de cuve, c'est des mois de fabrication, et des coûts astronomiques, donc ça pose un problème, mais c'est remplaçable. Mais les cuves c'est complètement
inenvisageable", affirme le militant. Car "quand on pose une cuve, aussitôt on met une quantité d'éléments autour, y compris des éléments bétonnés pour la fixer", selon lui.
La cuve de Flamanville a été posée en janvier 2014 avant le démarrage de la centrale prévu en 2017. Celui de Taïshan 1 est annoncé pour fin 2015. Selon Greenpeace, "la pièce étalon sur laquelle a été détectée l'anomalie est censée valider l'ensemble des calottes" fabriquées par Creusot Forge pour Flamanville et Taïshan, mais aussi pour des réacteurs qui ne sont pas encore commandés, comme Taïshan 3 et Hinkley Point (sud-ouest de l'Angleterre), pour lequel EDF n'a pas pris de décision définitive d'investissement. Interrogée par l'AFP, Areva n'a "pas souhaité faire de commentaire".
Selon Greenpeace, le géant du nucléaire, en difficultés financières, "a pris un risque industriel en décidant de faire une série de calottes" sur la base de ce
même étalon. "Sur le seul chantier EPR où Areva est maître d'oeuvre, celui de Finlande, au lieu de faire les calottes en France, Areva les a fait faire par les Japonais et elles n'ont pas de problème", ajoute le militant de Greenpeace. En 2014, Areva avait indiqué que la cuve de Flamanville avait été forgée à 80% chez Japan Steelworks et à 20% chez Areva au Creusot. La cuve, qui pèse 425 tonnes et mesure 11 mètres de haut, est une pièce "particulièrement importante pour la sûreté" car elle "contient le combustible" et "participe à la seconde barrière de confinement de la radioactivité" après la gaine du combustible, selon l'ASN.