Le réseau Les Premières a ouvert une antenne en Bourgogne-Franche-Comté. Accompagnement individuel, coaching personnalisé, programme par étapes : tout est fait pour donner un coup de pouce aux start-ups sélectionnées...à condition que celles-ci soient fondées par des femmes.
"Le plafond de verre, il est dans la tête"
En France, quand quelqu’un crée son entreprise, dans 70% des cas c’est un homme. Pire, parmi les start-uppeurs de France, 10% seulement sont des start-uppeuses. Pourquoi un tel écart ? Qu'est ce qui empêche les femmes de se lancer dans l'entreprenariat ?
Laurence Berthoud Lafarge a sa petite idée. Depuis cette semaine, cette chef d'entreprise dijonnaise est aussi co-fondatrice d’un nouvel incubateur à Fontaine-lès-Dijon : Les Premières est l’extension locale d’un réseau national d’incubateurs à vocation éthique - anciennement "Les Pionnières" - en l'occurrence l'entreprenariat des femmes. "On parle souvent de plafond de verre pour les grandes entreprises. Mais dans la création d'entreprise, le plafond de verre il est dans la tête", souligne la déléguée générale de la structure. Autrement dit, les femmes oseraient moins se lancer que les hommes.
Pourtant, selon les statistiques du gouvernement, 18% des Françaises disent vouloir créer leur entreprise, soit près de cinq millions d'entrepreneuses potentielles.
Laurence Berthoud-Lafarge, co-fondatrice de l'antenne Les Premières de Bourgogne-Franche-Comté
Le mot "ambitieux" peut être un gros mot pour les femmes
Treize entreprises ou ébauches d'entreprise ont déjà rejoint la structure dijonnaise, deux les rejoindront au mois de juin. Leur point commun : elles sont toutes fondées par des femmes - mais les groupes mixtes sont acceptés - et elles portent un projet innovant et surtout ambitieux. C'est justement sur ce dernier point que les velléités entreprenariales peuvent être freinées. "Nous avons vu une cinquantaine de personnes au moment de la sélection. Mais dès qu'on parle de projet ambitieux, certaines femmes se disent 'ce n'est pas pour moi', regrette Laurence Berthoud-Lafarge. Le mot "ambitieux" peut être un gros mot pour une femme".
Pourquoi ? Selon la co-fondatrice, tout est question d'équilibre. "Dans la vie d'une femme, son conjoint fait partie de son équilibre. Elle n'a pas envie de rompre son mariage si son mari lui dit qu'il ne croit pas en son entreprise. (...) Elle va peser le pour et le contre, beaucoup plus que ne le ferait un homme", souligne-t-elle, étude hollandaise à l'appui. Mais tout est aussi question de conjoint, à en croire une start-uppeuse croisée à la structure. "Le rôle des papas a beaucoup évolué. (...) Ce qui est important, c'est le temps que je vais consacrer à ma famille comparé au temps que je vais consacrer à mon entreprise, indique la trentenaire. Heureusement, mon conjoint se pose exactement les mêmes questions."
Lancement de l’incubateur @LesPremieresBFC ce matin ! Succès à toutes ! pic.twitter.com/h6YUG4oGBB
— BOURGOGNE ANGELS (@AngelsBourgogne) 20 mars 2018
Le réseau, une ressource très prisée des femmes entrepreneurs
Pourtant, quand il s'agit de parler de ses enfants, certains clichés perdurent. "Pour certains financeurs ou accompagnateurs de votre projet, si vous êtes une femme et que vous avez des enfants, on va toujours vous demander comment vous allez réussir à conjuguer tout cela, déplore Caroline, mère de plusieurs enfants en bas âge. Il faut constamment faire ses preuves".Les Premières proposent un programme en trois étapes :
-Start Premières, pour celles qui ont une idée
-Go Premières, quand l'idée devient un projet d'entreprise
-Boost Premières, quand on est officiellement sur le marché.
Dès la deuxième étape, les entreprises pré-incubées bénéficient d'un accompagnement indiviuel, de coaching personnalisé, moyennant un forfait de 850 euros par an.
@LesPremieresBFC @taleadijon la #startup #cestchouette les bons plans pour connaître les talents de la région #artisanat #independant pour dynamiser l emploi local pic.twitter.com/V7nbAgoJJ3
— Valerie Vuillemot (@vvuillemot) 20 mars 2018
"Un endroit où échanger sans tabous"
Mais si Caroline a rejoint ce nouvel incubateur, c'est avant tout pour développer son réseau, crucial pour son entreprise de formation professionnelle.
Sur ce point, Anne Vrdoljak, consultante et formatrice d'un jour aux Premières, est catégorique : "Très nettement, les femmes qui fondent leur entreprise ont besoin de soumettre leur projet à l'adhésion des autres femmes. Est-ce que c'est une bonne idée ? Est-ce que je m'adresse aux bonnes personnes pour le développer ?" Les femmes rechercheraient le retour d'expérience bien plus fréquemment que les hommes, qui préfèrent "tenter, au risque de se tromper", selon elle.
Chloé Roubot, 22 ans, parlerait plus d' "une ambiance de girl power, un endroit où échanger sans tabous". La jeune diplômée a fondé avec sa tante "C'est Chouette", une application qui propose, en échange d'un abonnement, des réductions chez les commerçants indépendants de Côte-
d'Or. Pour elle, être une femme n'a rien changé. "Les choses évoluent beaucoup. Je pense que les freins qui existaient auparavant appartiennent au passé", souligne-t-elle.
Ces deux dernières années, à l'échelle du monde, il y a eu plus de femmes que d'hommes qui se sont lancées dans l'entreprenariat , selon la dernière étude du Global Entrepreneurship Monitor, menée dans plusieurs universités dans 74 pays.
Le réseau Les Premières accueille toujours de nouveaux incubés. Le thème de la première formation est d'ailleurs éloquent : "Entreprendre, comment oser ?"
Lancement de l’#incubateur et de la 1ère promo du #go1ere @LesPremieresBFC merci @taleadijon cc @bfc_region @CaissEpargneBFC @mabanque_bnpp @MAAFAssurances pic.twitter.com/FoayXoXmWp
— LesPremières (@LesPrem1eres) 20 mars 2018