Situé à 2h30 minimum de Dijon, l'hôpital de Nevers peine à attirer les médecins et les soignants. Pour remédier au problème, Denis Thuriot, le maire de la ville, souhaite mettre en place une liaison aérienne.
L'hôpital de Nevers est confronté à un déficit chronique de personnels soignants et a du mal à recruter. Aujourd'hui, il manque dans ses services une vingtaine de médecins et une dizaine d'infirmières. La raison : les 2h30 à 3 heures de route qui le séparent de son CHU de référence, situé à Dijon.
Depuis que Denis Thuriot est maire de Nevers et à ce titre président de son centre hospitalier, il a cherché toutes les solutions possibles : construction d'un internat pour les étudiants en médecine, projet d'ouverture d'une formation pour infirmiers de bloc opératoire ou anesthésistes. Le problème persiste.
Cela fait 8 ans que l'on s'acharne à trouver des solutions à l'ancienne pour tenter de faire venir des médecins, des infirmiers, des internes dans notre hôpital. Je remercie le personnel soignant qui vient régulièrement de Dijon passer deux trois jours dans notre hôpital, mais ce n'est clairement pas assez. Si on ne fait rien, nous serons toujours au même niveau dans quelques années !...
Denis Thuriot, maire de Nevers (Renaissance)
Des "flying doctors" pour renforcer les équipes de l'hôpital de Nevers
Devant la problématique de la distance incompressible et du manque d'attractivité de son territoire (les deux étant étroitement liées), le maire de Nevers pose sur la table l'idée d'un pont aérien. "J'ai repris l'idée initialement pensée par le centre de cancérologie Georges-François Leclerc de Dijon, qui avait été mise sous le tapis. Le personnel soignant de Dijon rechigne à faire les 2h30 à 3 heures de trajet par la route dans des conditions de sécurité parfois discutables, et je les comprends. Ma priorité, c'est qu'ils puissent venir, et en 35 minutes, il y a beaucoup plus de candidats !..."
Faire de l'intérim un métier, c'est proprement scandaleux quand on manque de soignants !
Denis Thuriot, maire de Nevers (Renaissance)
L'idée de l'ouverture d'une liaison aérienne entre Nevers et Dijon fait son chemin, d'autant que le recours à l'intérim coûte cher à l'établissement hospitalier. Denis Thuriot ne se prive pas de dénoncer au passage ceux qui se font payer "une fortune" en travaillant en tant qu'intérimaires. "Faire de l'intérim un métier, c'est proprement scandaleux. Il y a certains médecins qui ne travaillent que 10 jours par mois, à 1500, 2000 voire 3000 euros la journée. Le reste du temps, alors qu'ils sont formés, ils ne sont pas disponibles pour les hôpitaux. Je souhaiterais que ça change."
Chaque année, l'établissement hospitalier consacre 3,5 millions d'euros de son budget au titre de l'intérim. Une rotation en avion reviendrait à 13 000 euros.
Pour David Boucher, délégué syndicat CFDT à l'hôpital de Nevers, cette solution est "recevable, mais uniquement sur le court terme. Le problème est plus général, selon lui. Il relève d'une meilleure gestion de la santé en France qui doit faire l'objet d'un débat entre le politique et le citoyen". En renforçant la présence de professeurs, notamment en gynécologie ou dans d'autres spécialités, ce pont aérien "permettrait d'apporter enfin à la population une médecine qui soit la même à Nevers et à Dijon et de renforcer la coopération entre les hôpitaux".
Entre laisser mourir les gens parce qu'ils n'ont pas les bons soins et utiliser un avion, le choix est vite fait
Denis Thuriot, maire de Nevers (Renaissance)
Reste l'épineuse question écologique, qui est balayée d'un geste par celui qui est à la fois le maire de Nevers et le directeur de l'aéroport. "La route entre Nevers et Dijon est dangereuse, le train, on n'avait qu'à faire mieux, on a été incapable de rénover une ligne. Et puis, il faut arrêter "l'avion bashing". J'ai voyagé dernièrement à titre personnel, je n'ai jamais vu autant d'avions pleins. Et entre laisser mourir les gens parce qu'ils n'ont pas les bons soins et utiliser un avion, le choix est vite fait, ce sera l'avion et j'imagine que la population sera du même avis que moi".
La ville de Nevers entend d'ailleurs ouvrir de nouvelles lignes pour sortir de son isolement. Une liaison aérienne entre Nevers et Lourdes serait actuellement à l'étude.
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