À Mâcon, une reproduction miniature de la maison de bois va voir le jour. Sa fabrication allie les technologies modernes de scan et d'impression 3D et celle plus traditionnelle du bronze. Ce projet à destination des personnes en situation de handicap visuel mettra à portée de toutes les mains ce monument incontournable de la ville.
Sur la place aux herbes de Mâcon, il faut lever le nez pour profiter des détails et sculptures grivoises qui ornent la maison de bois. Mais la hauteur du bâtiment du XVIe siècle et l'aménagement urbain ne permettent pas toujours de distinguer la richesse des façades dans son ensemble.
En plus de son architecture devenue précieuse dans le paysage mâconnais, nombre de miniatures parsèment la bâtisse. Et une observation attentive finit toujours par nous faire découvrir une pièce comique, voire irrévérencieuse, un autre patrimoine dont tout le monde devrait pouvoir profiter.
C'est en tout cas l'avis de Monique et Marie-Claude, deux bénévoles de l'association Valentin Haüy, association qui œuvre pour l'inclusion des personnes souffrant d'handicap visuel. C'est au sein de leur comité local qu'elles émettent l'idée d'une reproduction tactile des gravures de la maison de bois.
Un projet ambitieux...
L'association propose à la mairie de Mâcon de produire une "maquette tactile" des façades qui pourra s'inscrire dans la réfection de la place aux herbes.
Le projet est pris en charge par un membre de l'association à Lyon, Rémy Closset qui connaît depuis toujours la maison de bois. Architecte à la retraite, lui-même atteint d'un handicap visuel, il est le géniteur de près de 200 peintures en bas relief, un spécialiste de la modélisation 3D à destination du toucher.
"Mon objectif est de reproduire fidèlement les façades ainsi que deux miniatures qui iront sur un pupitre devant le bâtiment", explique Rémy Closset. Cet aménagement urbain et culturel permettrait à tous, valides comme malvoyants, de découvrir certains détails du bâtiment, guidés par un texte et sa traduction en braille.
La mairie accepte le projet et Rémy Closset en parle à Pierre Meyrignac, le directeur de SolideXpress. Cette société bourguignonne spécialisée dans la 3d suit Rémy Closset dans ses travaux depuis le début en imprimant ses modélisations de peintures en relief.
C'est le plus gros objet que nous ayons eu à numériser avec cette technologie, une véritable prouesse au vu des détails.
Pierre Meyrignac, directeur de SolideXpress
Pierre Meyrignac décide d'utiliser une technologie dernier cri, un scanner portatif Artec Leo qui permet d'avoir le sujet sous tous les angles avec une précision révolutionnaire de 0.1 mm. Il passera près d'une journée à "prendre en photo" la totalité des deux façades depuis une nacelle pour en obtenir une reproduction numérique absolument exacte.
Après des heures de traitement par des ordinateurs surpuissants, Rémy Closset doit encore "nettoyer" le modèle numérique, enlever les détails parasites comme les câbles le long des murs. Viendra ensuite la phase d'impression 3D dans les locaux de SolideXpress par l'équipe de Pierre Meyrignac. Ce modèle numérique de la maison de bois est aussi donné à la mairie de Mâcon sous forme de plan qui pourra être archivé, première sauvegarde architecturale du bâtiment.
... mais un projet long
L'œuvre exposée ne devra souffrir ni des intempéries ni des millions de mains qui la manipuleront. C'est donc ensuite chez un artiste fondeur de Chissey-les-Mâcon qu'iront les pièces imprimées en 3D. Le sculpteur de l'atelier de la treille, Thierry Goury créera à partir d'elles des moules pour y couler du bronze et obtenir les pièces finales.
On part d'une photographie pour arriver à un volume en bronze aux détails réalistes. Ce projet va au-delà de l'accessibilité aux malvoyants, il rend visible par tous des choses qu'on ne remarque pas d'habitude.
Thierry Goury, artiste sculpteur à l'atelier de la treille
Le pupitre qui accueillera ces reproductions de la maison de bois est quant à lui en cours d'élaboration dans les bureaux d'études et de programmation urbaine de la ville de Mâcon. Une réunion publique de consultation sera organisée le 11 octobre pour présenter le projet aux usagers de la place aux herbes.
Mais en attendant l'inauguration du projet, il sera possible de visiter le Tactile Tour à Mâcon du 4 au 18 octobre au musée des Ursulines. Cette exposition itinérante de l'association Valentin Haüy vous proposera de découvrir des œuvres picturales par le toucher grâce à des retranscriptions en sculptures 3D, une exposition initialement à destination des malvoyants, mais enrichissante pour tous. Les objets qui y sont présentés sont le résultat d'une précédente collaboration entre Rémy Closset et SolideXpress.