La Commission européenne a présenté mercredi 14 juillet son plan "paquet climat" qui vise à réduire à zéro le niveau des émissions de CO2 par les véhicules neufs dans les pays membres d'ici 2035. Certaines mesures inquiètent la filière automobile du Nord-Franche-Comté.
Face au changement climatique, la Commission européenne a présenté mercredi 14 juillet son plan de bataille en douze propositions. Ce "paquet climat" ambitieux vise à réduire les émissions de CO2 des voitures neuves de 100 % d'ici 2035 dans les 27 pays membres. En clair, seuls les véhicules neufs à moteur électrique pourront être en vente dès 2035. La Commission a inscrit les objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre à hauteur de 55 % par rapport à 2021 pour les voitures, et à 50 % pour les véhicules utilitaires légers d'ici à 2030.
Des centaines d'emplois pourraient disparaître
Ce projet législatif acterait donc la fin des moteurs thermiques essence ou diesel en Europe y compris les hybrides (essence-électrique) et hybrides rechargeables. En France, ces propositions secouent l'industrie automobile, en particulier dans le Pays de Montbéliard (Doubs). "La transition énergétique doit se faire avec l’industrie et pas contre l’industrie" écrit le syndicat FO Sochaux dans un communiqué. Le syndicat redoute la disparition de centaines d'emplois sur le Site de Sochaux-Belchamp et dans l’ensemble de la filière automobile du Nord Franche-Comté si aucun effort n'est entrepris pour "la formation des salariés dans les futurs métiers que ce soit en Recherche & Développement comme en Production".
Le marché est-il prêt pour la voiture électrique ?
Ludovic Party, directeur des programmes Innovation pour le Pôle Véhicule du Futur, s'interroge aussi sur l'avenir de la main d'oeuvre dans la filière automobile. "La fabrication de moteurs électriques fait appel à sept fois moins de main d'oeuvre que dans la construction de moteurs thermiques" explique-t-il. L'impact sur l'emploi est donc prévisible. Selon lui, les questions que ce plan soulève sont plus nombreuses que les réponses. "Les usagers seront-ils prêts à acheter des voitures à moteur électrique ?", s'interroge-t-il. Aujourd'hui, le marché électrique français représente seulement 10 % des commandes de véhicules neufs.
Des bornes de recharge encore trop rares
La demande en électrique se heurte à plusieurs freins. D'abord, son autonomie reste bien inférieure à celle des voitures thermiques. D'autre part, le réseau des bornes de recharge est complexe et encore peu étoffé comparé au réseau de stations essence. "Interdire une technologie n’est pas une solution rationnelle à ce stade", a dénoncé l’Association des constructeurs européens d’automobiles (Acea). En France métropolitaine, on compte 31 206 points de recharge, un chiffre bien loin de l'objectif des 100 000 bornes fixé par l'État pour la fin 2021.
L'emploi des sous-traitants menacé
Les sous-traitants, dont beaucoup ne fabriquent qu'un composant pour les véhicules thermiques, risque d'avoir du mal à prendre le virage de l'électrique. Même problème pour les équipementiers ou les concessionnaires. En effet, les véhicules électriques nécessitent moins d'entretien que les voitures thermiques. A l'heure actuelle la plupart des composants ne sont pas faits en France. Toute une filière automobile devra donc se convertir. Les constructeurs devront investir des milliards dans l'électrification de leur gamme. Stellantis a annoncé la création d'une usine de fabrication de batteries électriques nouvelle génération dans le Nord de la France. Cette gigafactory devrait employer à terme 2500 personnes.
Quid de la production électrique ?
Finalement Ludovic Party du Pôle Véhicule du Futur s'interroge : "est-ce que ce n'est pas un virage trop radical ?". De plus, la question de la fourniture en électricité est centrale. Nous ne sommes pas en capacité aujourd'hui de produire l'électricité nécessaire pour charger l'ensemble de la flotte des véhicules utilitaires, légers neufs qui entreront en circulation. "Si c'est pour réimplanter des usines à charbon, l'intérêt écologique est nul" souligne-t-il.
Pour l'heure les négociations autour de ce pacte vert commencent tout juste au niveau européen. Un texte définitif pourrait être adopté en 2022, pendant la présidence française.