Coronavirus Covid-19 : le plus comtois des fromages, le Comté, réduit momentanément sa production

En raison d'une baisse des ventes, le CIGC, Comité Interprofessionnel de Gestion du Comté a décidé ce 1er avril de réduire de 8% sa production de meules de Comté. Les consommateurs achètent moins. Et les caves d'affinage sont limitées en stockage.

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Comté, le coronavirus fait des trous dans le fromage


C’est la première fissure dans le comté. Et dieu sait que les fromagers n’aiment pas ça, à tous points de vue. La semaine dernière, une fruitière du Jura a dû interrompre la collecte du lait. Sur le plateau d’Aromas, au pays des lacs, une vingtaine de fermes ont attendu le camion en vain. Certains ont préféré donner leur lait plutôt que de le jeter. Un crève-coeur pour les sociétaires de la coopérative qui produisent du lait bio. Raison invoquée par la direction, plus de place dans les caves d’affinage. Heureusement la collecte a repris après quelques jours.

Un micro-événement ? Sans doute, mais significatif de la menace qui pend au dessus de la tête de toute une filière. Le CIGC, Comité Interprofessionnel de Gestion du Comté, s’est réuni mercredi 31 mars et jeudi 1er avril pour régler le débit du lait dans toute la région. Un mois après le début de l’épidémie le constat est là. Les consommateurs ont moins acheté, les caves d’affinage se remplissent, la question se pose, comment on freine ?


Une filière Comté qui a connu des ventes record en 2019


Le dernier édito du président du CIGC, en janvier dernier, mettait en garde mais pensait-il lui même en arriver là ? Voici ce qu’écrivait Alain Mathieu il y a peu de temps encore.
« Ce début d’année 2020 s’annonce plutôt bien pour notre filière. Les consommateurs plébiscitent toujours le Comté, comme en témoigne le niveau record des ventes sur l’année 2019. Cette évolution est plus qu’encourageante pour tous les acteurs de la filière : agriculteurs, fromagers, affineurs. Nous pouvons tous voir là une reconnaissance des exigences et de la rigueur que nous mettons chacun dans l’accomplissement de nos métiers. Ce succès ne doit pas nous griser. Sachons faire preuve d’humilité. Restons vigilants, réalistes et réactifs face aux aléas climatiques qui s’amplifient et au contexte géopolitique incertain. »

Ce 1er avril 2020 marquera l’histoire du Comté. De façon totalement inédite, la filière va réduire sa production de 8%. Certes pour un temps restreint. Mais tout de même. Jamais la filière n’avait pris de telles décisions.
Un connaisseur du milieu, qui préfère rester anonyme, rappelle qu’au début des années 2000 « la filière Comté avait connu une crise de croissance. Trop de fromages sur les bras. La réponse avait été de pousser le curseur de la publicité pour doper les ventes et faire baisser les stocks. Là il s’agit d’autre chose, c’est strictement du jamais vu ! »

 


Comment réduit-on la production de lait ? Quelques éléments de réponse


Selon les premiers agriculteurs que nous avons contacté, il y a plusieurs possibilités. D’abord diminuer la quantité de granulés et de céréales donnés aux bêtes. Les Montbéliardes sont des bêtes de course habituées à une alimentation très finement pesée et pensée. Moins de granulés devrait moins favoriser la lactation. Les vaches devraient aussi rester au repos plus longuement après le vêlage. Pour faire simple, les veaux vont téter plus longuement. Reste une question de taille. C’est le printemps, les bêtes doivent sortir. Or une vache qui broute produit plus de lait. « C’est bien gentil », disent certains, « mais avec ce temps on ne va pas retarder la mise à l’herbe. Et puis garder les vaches en étable c’est consommer du foin et le foin on en a plus beaucoup et ça coûte cher ». La dernière solution, la plus radicale, consiste à vendre des vaches. Bref, alléger le troupeau.

Joint par téléphone, Alain Mathieu, président du CIGC, confirme le caractère inédit de la décision. « A crise exceptionnelle, adaptation exceptionnelle. Nous avons préféré agir tout de suite pour laisser du temps à la filière.» Il rappelle que la décision a été prise «à l’unanimité par quatre collèges, soit 16 personnes. Un collège représentant les producteurs de lait, un autre les fruitières, un pour les transformateurs et les affineurs, le dernier pour les affineurs metteurs en marché. » Alain mathieu ajoute : « Il nous reste à partager cette décision avec la filière Morbier et la filière Bleu de Gex. La filière Mont d’Or est moins concernée puisqu’elle ne produit pas en ce moment. Il faut arriver à un ajustement entre les AOC, à un écrêtement de la production de lait. C’est un enjeu d’équilibre. Il va falloir y arriver ensemble. »

 
 


La roue tourne malgré tout

La plupart des fromageries et des fruitières restent ouvertes. Et s’adaptent aux contraintes. A Fontain, près de Besançon, le gérant propose de passer commande par mail. Et de passer quand c’est prêt. Avec un objectif simple, limiter les déplacements et minimiser le temps de présence et de circulation. Ce n’est pas encore le drive mais à Fontain on veut rester efficace.

Dans le Jura, à Champagnole, Marc Janin, fromager MOF, meilleur ouvrier de France, propose de livrer gratuitement pour un montant minimum de 30 euros. Les commandes de comté ou de morbier peuvent être passées depuis les autres magasins d’alimentation de la ville. Belle solidarité des commerçants entre eux.
 Avec Marc Jannin Crémier-affineur à Champagnole Alain Mathieu Président du comité interprofessionnel de gestion du comté (CIGC) Florent Dornier Agriculteur à Ville-du-Pont Reportage de Mary Sohier, Jean-Louis Saintain et Pascal Gomez
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