Depuis décembre 2022, Josette Huet a l'interdiction d'habiter dans sa maison à Chaume-et-Courchamp en Côte-d'Or. Un calvaire pour elle au quotidien, qui doit vivre dans une caravane dans son jardin.
Le 5 décembre 2022, la vie de Josette Huet bascule. Sa maison située à Chaume-et-Courchamp en Côte-d'Or est déclarée inhabitable par des experts. Des études révèlent la présence de fissures sur les murs, les plafonds et au sol, à cause des nombreuses sécheresses sur les dernières années.
Cette maison, elle l'a achetée il y a 17 ans avec son mari, décédé depuis. Aujourd'hui, Josette doit vivre dans une caravane installée dans son jardin. Elle obtient seulement l'autorisation d'utiliser sa salle de bain et sa cuisine.
Plus d'un an après notre dernière rencontre, Josette vit toujours dans sa caravane. Lorsqu'on lui demande comment elle se sent, la sinistrée a du mal à contenir ses larmes. "Il y a beaucoup d’émotion. Je continue à vivre comme il y a un an et demi. Je n’ai plus accès à ma maison comme il faut, je n'ai plus de meubles. Je ne peux plus recevoir qui que ce soit, je ne peux plus voir mes petits enfants chez moi."
Pourquoi n'a-t-elle pas été relogée ? Josette affirme n'avoir aucune réponse de l'assurance Groupama. "C’est le grand silence depuis le début. J’ai posé la question en envoyant une lettre recommandée au directeur général de l'assurance et on m'a dit d’aller sur le site pour les réclamations. Je veux savoir pourquoi je n’ai pas droit à l’assistance qu’ils proposent sur le site. Je n’ai pas eu un seul appel de leur part", se plaint-elle.
50 000 euros de frais depuis décembre 2022
Grâce à la mobilisation de plusieurs proriétaires de la commune regroupés dans un collectif (il y a une dizaine de maisons fissurées à Chaume-et-Courchamp), l'état de catastrophe naturelle pour des mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols est reconnu en mai 2023. Une bonne nouvelle pour Josette Huet, à condition qu’elle puisse prouver que les fissures de sa maison sont bien dues à ces mouvements de terrain, car c'est aux victimes qu'incombent la charge de la preuve.
Une double peine selon Caroline Guédin, référente du collectif des riverains en colère : "pour pouvoir être indemnisé, il faut avancer des fonds qui sont énormes. Pour Josette, c'est déjà 50 000 euros. Qui peut payer de telles sommes ?"
Comble de malchance, la maison de Josette Huet est située en bord de route et menace de s'effondrer. Le maire a donc pris un arrêté interdisant le passage devant sa maison, obligeant les habitants et les agriculteurs et même les pompiers à faire un détour de plusieurs kilomètres pour traverser le village.
Le risque, c'est que pour régler définitivement le problème, la démolition de la maison soit demandée. C'est d'ailleurs le souhait de la communauté de communes. "Je ne comprends pas à quoi servent les politiques s'ils se mettent du côté des assureurs, plutôt que d'aider les sinistrés sur les démarches juridiques à faire", déplore Caroline Guédin. La démolition risquant d'effacer toute preuve, Josette Huet a saisi la justice en juin 2023.
L'expert établit la responsabilité de la sécheresse
Il y a quelques jours, une note de l’expert payé par Josette Huet a établi la responsabilité de la sécheresse pour les fissures de sa maison. Un premier pas encourageant… mais qui n’impose rien à Groupama. "D'un strict point de vue juridique, aucune obligation n'existe [pour l'assureur] tant que le magistrat n'aura pas tranché ce dossier. Il aura la liberté de le faire lorsque nous saisirons au fond si nous ne trouvons pas d'accord amiable", explique Maître Frédéric Télanga, l'avocat de Josette Huet.
En attendant l’accord amiable ou le procès, reste une autre étape pour la sinistrée : faire chiffrer le coût des travaux… avec une nouvelle étude d’expert. Son coût : 9 000 euros à la charge, encore, de la victime, qui envisage de lancer une cagnotte en ligne.
Je veux la sauver, c’est ma vie.
Josette HuetSinistrée
Mais, malgré des procédures qui durent, Josette est déterminée à se battre pour sa maison. "Devant le silence de l'assurance, je ne sais pas ce qu'il va arriver. Ça va être un grand combat, je pense. J’ai dit à mon avocat que j’avais pris des engagements et je ne m’arrêterai pas, j’ai des soutiens."
"Je veux la sauver, c’est ma vie", ajoute-t-elle. "Si elle vient à être brûlée, je n’ai plus rien. J’ai travaillé toute une vie pour ne rien avoir aujourd’hui. J'espère que la maison sera sauvée, que je pourrai y retrouver une belle vie, recevoir mes petits-enfants et mes amis, tous ceux qui m’ont sauvée."
Plus de la moitié des maisons en France sont situées sur des zones frappées par le phénomène de retrait-gonflement des sols argileux dus à la sécheresse.