Avant les législatives les 12 et 19 juin prochains, France 3 part à la rencontre des habitants de toutes les circonscriptions de Bourgogne. Aujourd'hui, c'est au tour de la quatrième de Côte-d'Or, qui regroupe Montbard, Châtillon-sur-Seine et Semur-en-Auxois.
Discret depuis sa réélection au soir du second tour de la présidentielle le 24 avril dernier, Emmanuel Macron se déplace à Cherbourg (Manche) le mardi 31 mai sur un thème toujours sensible, la santé. Face aux soignants, il annonce le lancement d’une "mission flash" d’un mois pour étudier les solutions afin de sauver l’hôpital public et faire le bilan des difficultés auxquelles font face les services d’urgences en France.
À quelques 700 kilomètres de la Manche, dans la 4ème circonscription de Côte-d’Or, la plus grande de notre région avec 342 communes, la santé reste un sujet de préoccupation. Dans ce canton rural aux quelque 87 500 habitants, l’accès aux soins est toujours au centre des discussions.
Alice habite à Boussenois, une petite commune de 130 habitants, dont le nom rappelle étrangement une parodie célèbre des Inconnus, et qui se situe au nord du département. Alors qu’elle brave la pluie pour tailler les rosiers de son jardin, cette retraitée de 68 ans, qui vit seule, évoque ses difficultés pour accéder aux soins.
Impossible d'aller chez un médecin sans voiture
Ici, l’hôpital le plus proche se situe à Dijon, à 40 kilomètres. "J’ai eu des problèmes de santé il y a deux ans. Pour trouver un médecin et quelqu’un qui puisse m’amener à Dijon, c’était compliqué. Pour les pompiers, ce n’était pas assez grave et mes enfants n’étaient pas là. Donc j’ai téléphoné à un de mes neveux. Heureusement, il était là, il est venu. Sinon c’est la galère. C’est stressant quand on a vraiment mal et qu’on ne peut rien faire, c’est un vrai problème".
Les gens qui n’ont pas de voiture et d’enfant, je ne sais pas comment ils font.
Alice, habitante de Boussenois
Quant aux médecins généralistes, là-aussi, en trouver un relève parfois de la gageure. Il faut souvent aller à Selongey, à près de 5 kilomètres. La voiture est encore une fois indispensable. "Et puis c’est tout surbooké, c’est compliqué. Des fois, on en trouve un, sinon il faut faire 17 kilomètres. Quand j’ai un problème, j’appelle mes enfants, ils sont à 6 kilomètres. Mais les gens qui n’ont pas de voiture et d’enfant, je ne sais pas comment ils font".
Alice attend alors que son futur député se saisisse de la question de la santé en milieu rural. "Il faut qu’il nous amène des médecins, des kinés, parce que ça c’est la galère aussi. On fait avec, on essaye de se débrouiller, mais ce n’est pas facile tous les jours".
Mais les difficultés à trouver un médecin n’incombent pas seulement à la petite commune de Boussenois. À Venarey-lès-Laumes, où on compte près de 3 000 habitants, il y a très peu de docteurs, qu’ils soient spécialisés ou généralistes.
"On voit le nombre de médecins qu’il y avait avant et qu’il nous reste maintenant… Je sais qu’il y en a un qui va partir dans un an ou deux. Je ne suis pas sûr qu’il soit remplacé. Personne ne veut venir. Les gens préfèrent aller en ville où il y a plus de confort", constate Philippe, un habitant que nous croisons alors qu’il rentre d’une petite balade matinale.
"Vous êtes obligés de faire des kilomètres pour vous faire soigner, ce n’est pas normal. Il faut mettre une carotte pour inciter les jeunes médecins à venir, ne pas les surtaxer. Quand on voit des gens de 70 ans devoir continuer car il n’y a pas de successeur, c’est terrible", conclut le retraité de bientôt 63 ans.
45 % de la population a accès à un médecin en Haute Côte-d'Or
Globalement, dans la 4ème circonscription de Côte-d’Or, 45 % de la population a accès à un médecin, contre 79 % à l’échelle nationale selon des statistiques de l’Insee. Toujours dans ce secteur, 41 % des habitants disposent d’un pharmacien, 30 points de moins qu’en France.
Le 20 janvier dernier, l’ARS de Bourgogne-Franche-Comté annonçait pourtant une liste de 25 établissements labellisés hôpitaux de proximité, dont deux dans le nord de la Côte-d’Or, à Montbard et Châtillon-sur-Seine.
Des sites dont la mission est d’être au plus près des besoins de la population, avec différentes spécialités, de la téléconsultation et des services d’accueil pour les premiers niveaux de soin.
Mais dans le même temps, une quarantaine de lits seront fermés en Haute Côte-d’Or cet été : 19 à Montbard et 23 à Châtillon. Par ailleurs, les deux établissements cherchent une soixantaine d’infirmiers et d’aides-soignants.
"On nous retire tout en fin de compte. Niveau santé, il faut aller sur Dijon alors qu’on avait un hôpital qui avait tous les services. Il ferme tout doucement", s’emporte Irène, 70 ans, qui habite dans le Châtillonnais.
"Pour les yeux, il faut aller à Montbard, ils n’ont pas de rendez-vous avant septembre – octobre. Ça m’inquiète énormément. Il faut qu’un député débloque un maximum d’argent pour rouvrir notre hôpital et faire venir des jeunes. Les médecins partent et ne sont pas remplacés. On est très mal desservis niveau santé", souffle la retraité qui ne suit pas les législatives. "Pour moi, c’est de la débâcle, je n’y comprends plus rien. Ce n’est pas intéressant".
Lehioui Mokhtar est arrivé il y a trois mois à Châtillon. Avec sa femme et ses deux enfants, il a quitté Paris, dont les loyers étaient trop importants. Il constate la différence d’accès aux soins en Haute Côte-d’Or par rapport à la capitale.
"C’est vrai que c’est embêtant. Ce n’est pas évident. Quand on a des enfants, la santé, c’est ce qu’il y a de plus important. Il faudrait plus de médecins, il n’y en a pas beaucoup de spécialisés. Il faut plus de structures dans les domaines de la médecine pour enfance", plaide-t-il alors que ses enfants s’amusent sur une aire de jeux.
Mais contrairement à Irène, Lehioui Mokhtar ira voter et garde foi en la politique. Il a même entrepris les démarches administratives pour voter dans sa circonscription les 12 et 19 juin prochains.
► Dans la quatrième circonscription de Côte-d'Or, les électeurs pourront choisir entre dix candidats. La députée sortante est Yolaine de Courson (MoDem).