PORTRAIT. Téléthon 2022 : Marion Barq, atteinte d'amyotrophie spinale et "maman, comme les autres"

À 33 ans, Marion est professeure des écoles, et tient à vivre sa vie de maman, "comme les autres". Atteinte d'une amyotrophie spinale, elle est maman d'une petite fille, Romy, et souhaite vivre sa parentalité, malgré sa maladie et sa situation de handicap.

Marion Barq vit à Neuilly-Crimolois (Côte-d'Or), avec son compagnon et sa fille Romy. Elle est atteinte d'une amyotrophie spinale infantile de type 2, apparue à 9 mois.

"Je n'ai jamais marché, j'ai toujours été en fauteuil roulant"

Marion Barq décrit sa condition sans pudeur, bien qu'elle "n'aime pas trop être dans la lumière".

M.B. : "Je n'ai jamais marché, j'ai toujours été en fauteuil roulant. A l'époque, l'avenir était un petit peu sombre, la recherche n'avait pas suffisamment avancé pour qu'on ait des perspectives d'avenir meilleures que ce qu'on a aujourd'hui.
On a donc annoncé à mes parents que je ne passerai pas le cap des deux ans à Dijon. Comme mes parents sont plutôt d'esprit combattif, ils ont décidé de me faire suivre à Paris à l'hôpital de Garches. On a rencontré le formidable Professeur Barois et son équipe qui, en fait, ont donné beaucoup plus d'espoir sur mon avenir, et leur ont ainsi démontré qu'il y avait des adultes atteints de cette maladie. Mes parents ont ce souvenir d'avoir été un peu "sauvés" par ce deuxième diagnostic."

Rechercher "la normalité"

En plus d'être maman d'une petite Romy, Marion assume un rôle familial important.

Marion Barq : "Je suis aussi belle-maman de deux garçons que mon conjoint a eu d'une précédente union. J'ai eu une enfance très heureuse malgré le handicap, on m'a toujours traité comme n'importe quel enfant. J'ai toujours été poussée pour travailler, pour me lever le matin, malgré les difficultés, les douleurs. Je pense que c'est ce qui fait qu'aujourd'hui, j'ai un peu la vie de tout le monde.

Des fois, la normalité peut paraître très banale, voire un peu ennuyeuse, mais quand on est atteint d'un handicap lourd comme le mien, la normalité, en fait, c’est vachement chouette ! Et moi, ça me permet de mener ma vie d’une façon très épanouie, très heureuse et c’est un peu le message que je vais tenter de faire passer dans le portrait qui sera diffusé sur le plateau du Téléthon samedi. Malgré les annonces un peu sombres et les difficultés de la vie imposées par le handicap, car on ne va pas se mentir, ce n’est pas tous les jours tout rose, il y a des choses plus difficiles, il y a beaucoup d’hospitalisations, des problèmes, des risques pulmonaires.

Mais la vie peut être aussi vachement belle, en tous cas elle vaut vraiment le coup d’être vécue !"

Un tournant dans la maladie

Marion recevait des soins importants, jusqu'à son adolescence. Une lourde opération lui a permis d'aborder l'avenir plus sereinement.

M.B. : "Ma maladie entraîne une grosse dégénérescence musculaire, quasiment tous les muscles sont atteints. Et cela entraîne une capacité respiratoire extrêmement faible. Je n’ai que 30% de ma capacité respiratoire. Tout au long de l’enfance et de l’adolescence, au fur et à mesure qu’on grandit, la colonne vertébrale se tord, ça fait une scoliose importante. Petit à petit, si rien n’est fait, la colonne vient toucher les poumons, et là les choses deviennent très compliquées. À 14 ans, j’ai bénéficié d’une opération du dos, qui m’a permis de remettre ma colonne un peu droite et elle a été bloquée, pour arrêter cette torsion qui mettait en danger ma respiration.
À partir de cette opération très lourde, je dirais que c’est une seconde vie. Jusqu’à 14 ans, le quotidien était rythmé de soins, de grosses séances de kiné quotidiennes, de verticalisation. Après l’opération, j’ai pu relâcher les soins. J’ai toujours des soins, mais moins importants".

Les progrès pour les traitements

Grâce aux dons, grâce aux progrès scientifiques, la recherche sur les maladies génétiques avance. Des maladies qui laissaient peu d'espoir pour les patients il y a quelques dizaines d'années.

M.B. : "J’ai commencé un essai thérapeutique, avant de tomber enceinte de Romy. C'était une des premières avancées : la thérapie génique. J’ai forcément tout arrêté, et je n’ai pas repris. L’amyotrophie spinale de type I, sans traitement, ça peut emporter les enfants relativement jeunes et de nos jours il y a eu des progrès incroyables au niveau de la thérapie génique, issus des travaux menés par le Généthon, qui ont vraiment pu commencer à sauver des vies.

Les choses ont bien évolué. Pour moi c’était il y a 30 ans, maintenant il y a des médecins très compétents dans toutes les grandes villes de France, y compris à Dijon. Je suis très heureuse dans ma vie actuelle mais je pense que si j’étais née trente ans plus tard, avec les médicaments qu’on a maintenant mis sur le marché, je marcherais probablement aujourd’hui. Alors je ne serais pas comme tout le monde, mais il y a des enfants bien plus atteints que moi, qui réussissent à faire quelques pas, à faire quelques transferts. Ce sont des enfants, qui, il y a encore quelques années, avaient un avenir vraiment menacé par la maladie".

Avoir espoir en la recherche

Marion ne renonce pas aux traitements possibles. Sa priorité du moment, c'est avant tout sa famille, mais au moment voulu, elle souhaite reprendre les essais thérapeutiques.

M.B. : "Moi j’ai toujours de l’espoir, c’est mon maître-mot qui dirige mon quotidien. Pour moi, s'il y a de la vie, il y a toujours de l’espoir derrière. Je pense qu’à mon âge, et avec toutes les rétractions (musculaires ndlr), je n’ai pas l’espoir de remarcher, mais j’ai toujours l’espoir de stopper la maladie. C’est une maladie qui est évolutive, j’ai l’espoir que je puisse mieux respirer, que je sois moins en danger chaque automne quand les maladies telles que la grippe nous menacent. J’ai l’espoir et lorsque je n’aurai plus le projet de construire ma famille, je pense que je me remettrai dans tous ces traitements, pour essayer d’en tirer le meilleur possible".

Le projet familial, malgré la maladie

Lorsque Marion a souhaité devenir maman, le corps médical ne l'a pas dissuadée, mais émis des réserves. Marion n'a pas renoncé, et maintenant, sa fille à ses côtés la conforte dans son choix.

Marion Barq : "La maladie affaiblit les muscles, retentit sur les fonctions respiratoires. C’est un tableau plutôt noir qui ne fait pas rêver les grands spécialistes, malgré toute leur bienveillance, un pneumologue ne peut pas me dire allez-y foncez ! Mon projet d’être maman, c’était plus qu’un projet, c’est un combat.

L’envie d’être parent, pour mon conjoint et moi, elle est plus forte que toutes les mises en garde du corps médical et des difficultés qui étaient annoncées. Je n’ai jamais été aussi épanouie et sereine qu’enceinte. Il y avait certes des complications éventuelles, pour lesquelles on m’avait mise en garde. Dès que Romy s’est nichée dans mon ventre, j’ai toujours eu ce sentiment qu’on formait déjà avant sa naissance une équipe de choc. Elle m’a donné la force de tout affronter !

La naissance de Romy c’est mon plus grand combat, c’est ma plus grande victoire, c’est aussi une sacrée revanche sur la maladie. Ça résonne évidemment pour moi, mais aussi pour tous mes proches. C’est la victoire de tout le monde". 

Un quotidien fait de soins

Marion ne minimise pas les contraintes liées à sa maladie. C'est au quotidien qu'il faut gérer des séances de kiné, se protéger de toute infection respiratoire. Une discipline qu'elle gère depuis toujours.

M.B. : "J’ai des soins quotidiens, j’ai des séances de kiné, j’ai des appareils respiratoires. Sur une journée où je ne suis pas malade, c’est-à-dire pas enrhumée, rien du tout, j’ai une heure de soins par jour, avec en plus annuellement des consultations pluridisciplinaires liées à ma pathologie, surtout en pneumologie.

La semaine dernière j’avais attrapé une grosse bronchite, avec un début d’infection du poumon gauche, j’avais 8 heures de soins par jour. Je prends soin de moi autant que possible, je suis très vigilante. J’ai une auxiliaire de vie qui vient tous les jours, à certains moments de la journée. Elle m’assiste pour toutes les tâches qui impliquent des transferts, la douche, le passage aux toilettes, ce genre de choses, tout ce que je ne peux pas faire, malgré ma volonté de vouloir le faire". 

Un entourage professionnel bienveillant

Marion est institutrice, dans une école de la périphérie de Dijon. Sa présence dans l'établissement lui a permis d'acquérir une légitimité dans son travail, avec ses collègues, auprès des enfants et des parents d'élèves, des contacts au quotidien où elle puise son énergie.

M.B. : "Je travaille dans une école élémentaire à Quétigny, j’y suis depuis 10 ans. J’ai en charge les grands, les CM1/CM2 et ça se passe très très bien. Autant avec mes collègues, qu’avec les enfants et leur famille. On me fait confiance. J’ai fait mes preuves, autant que j’ai pu, comme tout le monde. Je n’ai pas le sentiment d’être traitée différemment. Je ne m’ennuie jamais ! Il y a une charge mentale qui est importante, car au-delà du travail en classe, il y a aussi le travail à côté à la maison. Il n’y a aucune journée qui se ressemble et ça me va très bien".

Se projeter vers l'avenir

Marion n'est jamais à court d'idées. Résiliente, elle a connu des moments difficiles mais souhaite faire partager son enthousiasme.


Marion Barq : "J’ai toujours plein de projets ! Avec mon conjoint Lionnel, on a décidé de monter une chocolaterie artisanale, familiale. On avait envie de travailler ensemble, à côté, en plus de nos boulots respectifs. Autre projet en cours, un mariage, en juillet 2023 !
Les gens disent "c’est super, c’est admirable", mais c’est finalement la vie de tout le monde ! Il n’y a rien de bien spécifique, hormis le fait que je suis sur 4 roues ! On essaie de vivre les choses, les expériences, comme tout le monde ! Il faut se dire que même s’il y a des coups durs, il y a aussi plein de bons moments à la clé. Il faut s’en donner les moyens, il faut se battre toujours forcément un petit peu plus pour arriver à ses objectifs de vie, mais ça en vaut le coup". 

Marion publie régulièrement sur les réseaux sociaux sur le thème de l'handiparentalité, sous le pseudo maman.à.roulettes.




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