Sécheresse et pollution : dans l'Auxois, un chantier à 5,5 millions pour contrer les risques de pénurie d'eau potable

Le syndicat des eaux de l'Auxois-Morvan termine tout juste les travaux de l'interconnexion du réseau d'eau sur le territoire. Désormais, une centaine de communes bénéficient du même réseau d'eau. Ce qui doit permettre d'éviter toute pénurie en cas de sécheresse ou de pollution d'une source de captage.

Le long de la départementale qui mène à Thorey-sous-Charny, près de Pouilly-en-Auxois, une longue tranchée est en train d'être rebouchée. À l'intérieur, un tuyau bleu qui court sur plusieurs kilomètres, jusqu'au réservoir d'eau potable du château d'eau de Soussey-sur-Brionne, sur une colline de l'autre côté de l'autoroute. C'est la fin de près de deux ans de travaux, pilotés par le syndicat des eaux de l'Auxois-Morvan (Sesam).

Remédier aux problèmes de sécheresse et de pollution aux nitrates

Ce chantier à 5 495 000 euros, financé par l'Etat et par les collectivités locales, vise à raccorder environ 90 communes de l'Auxois-Morvan entre elles. C'est ce qu'on appelle des interconnexions. Le but : s'assurer que toutes ces communes aient de l'eau potable en permanence.

"Il fallait régler à la fois le problème de la quantité d'eau potable, lorsqu'en cas de sécheresse les sources se tarissent, et le problème de la qualité, avec le taux de nitrates qui est parfois trop élevé dans certains captages", explique Martine Eap-Dupin, maire de Précy-sous-Thil et présidente du syndicat des eaux de l'Auxois-Morvan.

"Le choix qui a été fait par les élus est de dire : on règle les problèmes pour les générations futures, pas juste pour aujourd'hui", ajoute Martine Eap-Dupin. "L'eau, c'est la vie de notre économie, de nos habitants, de nos élevages. C'est aussi l'eau qui permet d'avoir nos beaux paysages de l'Auxois."

"On a donc tablé pour que ces installations durent au moins 80, voir 100 ans, parce que ces problèmes, toutes les générations les croiseront."

Martine Eap-Dupin

Ces interconnexions ont été réalisées sur 14 mois en deux phases : une première phase côté Morvan, la seconde côté Auxois. Au total, 32 ressources de captage sont connectées entre elles. Un 33ème captage basé dans le réservoir de Grosbois est à l'étude et "sans doute réalisable dans les années à venir".

En attendant, il a fallu parer au plus pressé. Le chantier a débuté en 2020 par le raccordage des communes les plus nécessiteuses. Bertrand Boillin, ingénieur travaux : "Certaines communes avaient une partie d'eau non potable, ou des manques d'eau en été. Ce sont celles que nous avons reliées en priorité."

Parmi ces communes "à risque" de pénurie : les 32 hameaux de Champeau-en-Morvan, qui disposent "de six captages de faibles capacité", détaille le Sesam. Autres points sensibles : les sources de Savernot et de Chamboux, vulnérables à des ruptures d'approvisionnement et des pollutions accidentelles. "En cas de pénurie d'eau, la commune de Saulieu ne pouvait plus alimenter ces zones", note le Sesam. L'interconnexion permet de remédier à ce problème. 

Deux arrivées d'eau et un capteur en temps réel pour mesurer la qualité de l'eau

Comment cette régulation fonctionne-t-elle ? Pour le savoir, direction le château d'eau de Soussey-sur-Brionne. À l'intérieur, un réservoir d'eau potable de 150 à 200 m3, et deux tuyaux. Le premier est le tuyau de captage d'origine ; le second est le nouveau tuyau de raccordage. "Notre première priorité était d'assurer une quantité suffisante d'eau potable", indique Aurélien Picard, maître d'oeuvre au Sesam. "Ce nouveau tuyau nous permet de subvenir en cas de manque. Mais il nous permet aussi de régler les problèmes de nitrates." 

Un compteur est positionné sur les deux tuyaux du château d'eau, et mesure en permanence le taux de nitrates de l'eau qui arrive des sources des communes. "Automatiquement, si le niveau de nitrates est trop élevé, le tuyau de sécurisation s'ouvre et apporte de l'eau bien moins chargée en nitrates."

"L'interconnexion va venir équilibrer le taux de nitrates, faire un mélange entre les eaux, et on se retrouvera avec un taux de nitrates bien inférieur à la réglementation."

Aurélien Picard

Un chantier à 5,5 millions d'euros et une augmentation des prix pour certains usagers

Mais ces installations ont un prix : près de 5,5 millions d'euros de travaux pour la pose d'environ 40 kilomètres de tuyaux en fonte. Si la plupart du circuit est enterré de manière classique le long de la route, il a fallu par endroits passer sous l'autoroute ou des cours d'eau, ou encore fixer le tuyau en hauteur le long des ponts. Ces réalisations sont particulièrement coûteuses. La facture est répartie ainsi : 

  • 2 600 000 euros à la charge de l'Etat,
  • 1 500 000 euros à la charge du Sesam,
  • 1 000 000 euros à la charge du département de Côte-d'Or,
  • 400 000 euros à la charge de la préfecture de Côte-d'Or.

Les interconnexions ont aussi un coût pour certains habitants du secteur. Lors de notre reportage, nous avons été interpellés par Gaël Finot, éleveur à Thorey-sous-Charny. "Avant, l'eau était à 0,90 euros du mètre cube. Maintenant, elle est à près de deux euros !"

L'agriculteur estime ne pas avoir besoin de cette interconnexion. Le village de Thorey-sous-Charny est en effet alimenté par sa propre source depuis des années. Mais la ressource n'était pas sécurisée, explique le Sesam : en cas de pollution ou de sécheresse, la commune risquait de ne plus être alimentée. "Les prix ont augmenté par endroits car ils sont désormais lissés sur l'ensemble des communes de l'interconnexion", explique Aurélien Picard. Autrement dit, chaque commune paie le même prix. Le prix de la tranquillité, et l'assurance de ne pas manquer d'eau en cas de problème, promet le Sesam. Avant l'interconnexion, un tiers des communes avaient régulièrement des taux de nitrates trop élevés pour la consommation humaine.

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