"Cette histoire-là nous appartient", d'anciennes étudiantes du DEUST de théâtre de Besançon présentent "Métanoïa", une pièce de théâtre sur la sororité

Cinq anciennes étudiantes du DEUST de théâtre de Besançon, dans lequel enseignait Guillaume Dujardin, condamné à la prison pour harcèlement, agression et chantage sexuel, présentent une pièce de théâtre baptisée "Métanoïa". Explications.

C'est l'histoire d'une rencontre, d'individualités et de sororité. C'est l'histoire de femmes qui ont choisi de raconter leur parcours comme elles l'entendent, en renouant avec une passion commune blessée et malmenée, celle du théâtre.

"Ce seront des histoires différentes que celles qu’on nous a forcé à raconter à l’école. L’histoire ne passe plus par la violence, elle passe par la douceur, par le groupe. On ne le fait pas pour prouver quoi que ce soit. On le fait pour nous", nous explique Marion, l'une des comédiennes de la pièce "Métanoïa", dont la première représentation est prévue le 13 octobre prochain. C'est loin du Doubs, au Théâtre des Carmes à Avignon, que cette pièce sera présentée officiellement au public pour la première fois, mais son destin est intimement lié à Besançon.

L’idée c’était de refaire du théâtre les cinq. Et ça c’était déjà énorme après toute cette histoire.

Marion, comédienne dans la pièce "Métanoïa"

Ce spectacle est né de la rencontre entre la metteuse en scène et documentariste Sylvaine Faligant et une partie des femmes constituées parties civiles dans le procès de Guillaume Dujardin, cet ancien professeur de théâtre de l'université de Besançon, condamné à 4 ans de prison dont 2 ferme pour harcèlement, agression et chantage sexuel sur plusieurs de ses étudiantes, entre 2014 et 2017. 

"Il ne fallait pas que ce spectacle devienne une thérapie"

Cinq jeunes femmes, étudiantes du DEUST de théâtre de Besançon durant ces années-là, sont désormais sur les planches après deux ans d'un travail intense et éprouvant, débuté en avril 2021. La création de la pièce s'est faite en parallèle des échéances judiciaires, dans ce procès ultra médiatisé, qui s'est terminé devant la cour d'appel de Besançon.

"C’était le yoyo en permanence, parce qu’être ensemble sur un plateau c’était difficile. On était toutes à des moments différents de nos vies. Certaines avaient continué, d’autres avaient arrêté le théâtre. Il ne fallait pas que ce spectacle devienne une thérapie en fait, et je pense qu’on a réussi", souligne Sarah, l'une des cinq comédiennes engagées dans ce projet.

Tout comme pour le procès durant lequel 10 victimes se sont constituées parties civiles, c'est la force du collectif qui permet une issue salvatrice au travail de création artistique. "Pour nous, ce qu’il y a de plus important c’est de passer de l’individu au collectif. On sait aujourd’hui que si ce procès a débouché sur une condamnation c’est aussi parce qu’il y avait un très bon collectif. Si on regarde aujourd’hui les procès similaires au notre, il n'y a que des non-lieu car c’est parole contre parole. Nous, on a eu la chance d’être très nombreuses. C’est pour ça que le procès a eu une issue positive", explique Marion, dont le bras droit est tatoué du mot "sororité".

"Il y avait une nécessité pour tout le monde de raconter cette histoire et de pouvoir se réapproprier le théâtre. Cette histoire-là nous appartient. C’est un travail qui demande autant personnellement que professionnellement", ajoute Sarah, tout en insistant sur le travail des corps réalisé avec la chorégraphe Morgane Karsenti. "Tout ça ensemble, ça a créé de très très belles choses".

Une pièce de théâtre et un documentaire

"Je voulais à la base faire un film documentaire qui accompagne la procédure judiciaire. Mais ça me semblait impossible de réaliser un projet qui ne se focalisait que là-dessus" se souvient la metteuse en scène Sylvaine Faligant, qui a instantanément été marquée par la trajectoire de vie des comédiennes avec qui elle travaille désormais.

Cinq jeunes femmes sont sur scène. Elles ne se connaissent pas. Elles sont là ensemble mais ne savent pas encore pourquoi. Du statu quo de leurs vies respectives, elles exploreront seules puis ensemble les méandres de leurs récits en quête d’un changement. Assignées femmes, elles se débattent avec leur quotidien, marqué par les conséquences de cette assignation. Voyage initiatique au cœur de la sororité, Métanoïa explore les dynamiques sociales qui animent les récits des personnages. Alliant le théâtre et la danse, la pièce se pense comme un laboratoire où explorer collectivement des quêtes intérieures.

"Métanoïa", du collectif La Gangue

Dans cette pièce d'environ 1h10, les thèmes du rapport au genre, des violences sexistes et sexuelles, du rapport au corps et à l'identité et au fait d’être assignée femme sont explorés. Parallèlement à la pièce de théâtre constituées en trois actes, un documentaire a également été réalisé pour une diffusion prévue en 2023. Si la pièce de théâtre n'en est qu'à ses débuts sur les planches, les possibilités de la faire vivre auprès du public sont déjà multiples dans la tête de Sylvaine Faligant. "L’idée c’est aussi d’emmener la pièce dans des universités, des lycées. Ça peut aussi être des ateliers autour de ce qu’elle raconte. Il y a tout un ensemble de possibilités. C’est une matière qu’on peut étirer et développer"

L'idée non dissimulée et hautement symbolique, c'est évidemment de venir jouer cette pièce de théâtre à Besançon. Félicie Bolot, chargée de diffusion du collectif La Gangue, le confirme : "On a reçu un soutien du Centre Dramatique National de Besançon avant même la création de la pièce. C’était un choix symbolique de soutenir notre spectacle. On l’a accepté aussi avec l’envie d’aller plus loin, donc oui, c’est évidemment une réflexion d’aller à Besançon.”

"On a envie de ça évidemment. Et évidemment ce sera un challenge. Ce serait une belle boucle de venir jouer cette pièce à Besançon”, conclut quant à elle Marion, soutenue du regard par Sarah.

► Infos pratiques 

"Métanoïa", première création du collectif La Gangue
Ecriture collective
Mise en scène : Sylvaine Faligant
Assistanat à la mise en scène : Soizic Billet
Chorégraphe : Morgane Karsenti
Avec : Marion Begin, Sarah Bosson, Pauline Faivre, Zélie Gillet et Karine Guibert
Durée estimée : 1h15
Tout public

Représentations à venir :
Jeudi 13 octobre à 21h au Théâtre des Carmes
Jeudi 20 octobre à 20h30 au Théâtre El Duende, à Ivry-sur-Seine
Vendredi 28 octobre à 20h au Théâtre de l'Oeuvre, à Marseille

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