Dans le Doubs, des chasseurs appellent à réguler la population du lynx, espèce pourtant protégée

Vendredi 16 février, l'association de chasse de la commune de Fournets-Luisans (Doubs) a demandé à la Fédération départementale des chasseurs du Doubs d'étudier un "déclassement" du lynx, espèce pourtant protégée. Une volonté qui fait bondir les associations de sauvegarde des animaux, et à laquelle la Fédération départementale s'est dite "opposée".

Le lynx bientôt régulé dans le Doubs ? C'est en tout cas le souhait d'une petite partie des chasseurs du département. Dans un courrier envoyé le vendredi 16 février à la Fédération des chasseurs du Doubs, l'association intercommunale de chasse agréée (AICA), représentée par son président Steve Thalmann, appelle à la "régulation du lynx boréal", espèce pourtant protégée.

Dans ce document, que France 3 Franche-Comté a pu consulter, les mécontents réclament que plusieurs points relatifs au lynx boréal soient inscrits à l'ordre du jour de l'Assemblée générale des chasseurs du Doubs 2024, pour être votés. En plus de la régulation, Steve Thalmann demande à sa fédération de s'engager "à faire bouger les lignes quant au classement du lynx boréal" en tant qu'espèce protégée.

Le lynx responsable de la réduction du nombre de chevreuils ?

Autre demande, plus surprenante, annoncée dans le courrier, l'arrêt de "tout débat, exposition ou projection en lien avec le lynx boréal au sein des locaux situés rue du Châtelard", soit le siège de la Fédération départementale des chasseurs du Doubs. Pour justifier cette volonté de revenir sur le statut du lynx boréal, Steve Thalmann, "soucieux de l'équilibre agro-sylvo-cynégétique", expose la menace que représente l'animal pour "la pérennité des espèces chevreuils et chamois sur nos territoires de chasse".

La présence marquée du lynx boréal contribue inexorablement à la disparition du chevreuil sur un grand nombre des territoires du département.

Steve Thalmann,

président de l'AICA de Fournets-Luisans-Fouans

Très vite, le Centre Athénas, association de "sauvegarde de la faune sauvage en Bourgogne - Franche-Comté responsable" a réagi. Dans un communiqué, l'organisme dénonce "une haine du lynx et une radicalisation des chasseurs".

Pour le centre, l'argument qui montre le lynx comme responsable de la baisse des chevreuils symbolise "l'aveuglement" et "l'ignorance" des auteurs du courrier, et occulte "les modifications climatiques radicales et leurs effets sur la flore" et "le maintien des quotas de chasse quoi qu’il en coûte", qui impacteraient en priorité les cervidés.

Les sécheresses à répétition qui ont impacté la reproduction du chevreuil, le changement climatique, M. THALMANN, président de l’AICA de Fournet Luisans (25) ne connait pas.

Communiqué du Centre Athénas

L'association pointe également du doigt les "actes de braconnages répétés" perpétrés sur les lynx en Bourgogne-Franche-Comté, "que les cas soient constatés directement ou révélés par l’apparition de jeunes orphelins". Contactée par France 3 Franche-Comté, la Fédération départementale des chasseurs du Doubs a précisé d'emblée qu'elle était "totalement en désaccord avec la position portée dans la lettre de M.Thalmann".

La Fédération départementale de chasse opposée au déclassement du lynx

"Ce sont des questions qui ont été abordées dans une réunion locale mercredi 14 février" précise Thibaut Powolny, responsable environnement à la Fédération. "Mais les tirs et les prélèvements de lynx sont illégaux et nous n'allons pas revenir dessus". Et M.Powolny de rappeler que sa structure a voté en août 2023 un schéma départemental de gestion cynégétique protégeant l'animal, tout en faisant partie du programme Ecolynx, chargé d'étudier, d'améliorer les connaissances et de sensibiliser la population sur le lynx.

Une question reste néanmoins en suspens : les points abordés dans le courrier par M.Thalmann seront-ils discutés lors de l'Assemblée générale des chasseurs du Doubs ? "Oui, ils pourront être intégrés" avoue Thibaut Powolny. "Mais en aucun cas cela ne veut dire qu'on va les adopter. Au contraire, on va  continuer à travailler avec des débats et des projections de films sur le sujet".

Le lynx, tout comme le loup, est un sujet sensible ici. À nous de convaincre nos adhérents qu'on peut très bien laisser l'animal en tant qu'espèce protégée.

Thibaut Powolny,

responsable environnement à la Fédération départementale des chasseurs du Doubs

Des justifications qui ne convainquent pas totalement le Centre Athénas. "Les représentants de l’extrême-chasse montrent leur vrai visage, et du coup, s’ils obtiennent de leur Fédération ce qu’ils veulent, se posera la question du maintien de l’agrément au titre de la protection de la nature dont bénéficient les fédérations de chasseurs" estime l'association. Le Centre met également en lumière "les subventions" dont bénéficie la Fédération départementale "pour favoriser l’acceptation du lynx, ce à quoi elles sont manifestement inefficaces…".

Pour rappel, de 2002 à 2021, au minimum 54 lynx ont été tués par braconnage en France. Dans 18 cas, des cadavres ont été découverts ou des témoignages probants obtenus. Le Centre Athénas a permis de révéler 13 de ces 18 cas. Les décès de lynx ne sont ainsi pas rares en Bourgogne-Franche-Comté. Le 14 février dernier, un animal avait ainsi été retrouvé mort dans le Jura, après avoir été probablement percuté par un train sur la voie ferrée entre Poligny et Saint-Lothain. 

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