Les sociétés d'éradication des frelons asiatiques continuent encore d'intervenir pour détruire des nids de frelons. Un phénomène qui s'est accentué en Franche-Comté depuis ces trois dernières années.
Depuis quelques semaines, les arbres se parent de leur robe automnale. Certains gardent leurs feuillages, d’autres laissent entrevoir leurs branches…et aussi les nids de frelons.
"Les nids se sont développés tout l’été"
"On est en pleine saison, j’ai encore beaucoup d’appels", admet Matthieu Chenu, d’Action 3Drones. Ce spécialiste, membre du groupement des indépendants experts des guêpes et frelons, sillonne la Franche-Comté pour détruire les colonies de frelons. Il y a quelques jours encore, il s’occupait d’un nid à l’Institut de Formation de Professions de Santé de Besançon, en y injectant un insecticide végétal, le pyrèthre de Dalmatie.
"L’automne est souvent la période pendant laquelle on intervient, parce que les nids se sont développés tout l’été et ils sont encore bien nombreux dans la région", renchérit-il. Les frelons asiatiques se nourrissent d'autant plus de protéines en hiver, comme l'explique Matthieu Chenu : "Pour les abeilles, il est donc encore plus difficile de survivre."
Les opérations se multiplient, mais peut-on s’en débarrasser complètement ? Matthieu Chenu répond : "Il ne s’agit pas d’éliminer l’espèce, mais bien de la réguler, car sa progression est exponentielle". Exponentielle, mais à quel point ? Il lâche : "Si on ne traite pas un nid, il peut y en avoir quatre à cinq l’année d’après."
Une capacité de reproduction forte
La progression de l’insecte est d’autant plus impressionnante depuis trois ans. "C’est vrai que le phénomène des frelons asiatiques s’accélère, affirme Frédéric Mora, directeur scientifique et entomologiste au Conservatoire botanique national de Franche-Comté. Cette espèce a sans doute fait son apparition au début des années 2000. Les premiers signalements se sont produits en 2014. Auparavant, le frelon est sans doute passé sous les radars."
Un développement qui s’explique par un "comportement classique des espèces envahissantes", d’après l’entomologiste spécialisé dans les coléoptères. "Sans espèces compétitrices, les colonies de frelons se développent, et occupent cette niche écologique, explique-t-il. C’est une espèce assez dynamique : comme les guêpes, ils ont une capacité de reproduction forte, ils sont très mobiles. Et l’enchaînement d’années douces leur a permis de se reproduire." Les frelons ont déjà conquis le Sud de la France, et progresse désormais vers le Nord : il y en a dans toute la France. Frédéric Mora indique qu’"en Franche-Comté, les ressources alimentaires sont vastes pour cette espèce : des chenilles, des mouches, des abeilles domestiques et des fruits mûrs. Les frelons ne sont pas très sélectifs dans leur alimentation."
Les interventions pour frelon asiatique d'une société du Doubs
Une évolution indéterminée
Pour autant, cette progression est-elle inquiétante ? Oui et non, répond l’expert. "Quand une espèce apparaît dans un espace où elle ne devrait pas être, il y a deux options, commente-t-il. Dans certains cas, elle se stabilise. Dans le pire des cas, il peut y avoir la création d’un déséquilibre. Par exemple, il y a le problème de la prédation des abeilles domestiques. Et puis cela peut favoriser les risques sanitaires avec les piqûres." L'entomologue estime qu'"il est trop tôt pour savoir comment cette espèce évoluera dans notre territoire".
Pour Matthieu Chenu, qui éradique ces nuisibles, la "problématique des frelons asiatiques" doit être saisie "par les collectivités". "Certains particuliers ne souhaitent pas détruire les nids. D’autres n’en ont pas les moyens. Mais les frelons progressent très fortement, constate-t-il. Peut-être qu’il faudrait qu’il y ait une prise en charge et que les collectivités participent."
