Alors que 45 suppressions de postes sont prévues sur les trois prochaines années, un appel à la grève était lancé ce lundi 30 septembre pour dénoncer notamment la paupérisation de la protection de l'enfance. Une branche particulièrement bouleversée depuis l'agression au couteau d'un agent le 4 septembre.
“À Besac, ils sont en vrac!” Au son des clarines, une centaine d’agents se sont réunis ce lundi matin devant les grilles du conseil départemental, pour dénoncer leurs conditions de travail, et réagir à la violente agression d’un agent survenue le 4 septembre à la maison France Services de Valdahon (Doubs). Un éducateur du "Pôle enfant confié" de Pontarlier, structure du département du Doubs, et qui travaillait au sein du centre médico-social, avait été frappé au couteau à l'abdomen par un habitant de Valdahon qui avait rendez-vous. L'agresseur avait pu être interpellé rapidement.
“On est là avant tout pour soutenir notre collègue qui a quand même été poignardé dans l’exercice de ses fonctions”, explique à France 3 Franche-Comté Adeline Clerget, secrétaire adjointe CFDT et représentante de l’intersyndicale CFDT-CGT-FO. “C’est un évènement qui malheureusement était prévisible parce que ça fait des années qu’on dit qu’un jour il y aura un drame, ce drame est arrivé.”
Ces conditions de travail ne garantissent plus la sécurité physique et psychique des agents.
Communiqué de l'intersyndicale
Un préavis de grève a donc été déposé pour ce lundi 30 septembre, alors que les élus se retrouvent en session, pour dénoncer une “dégradation constante des moyens de la protection de l’enfance et plus généralement du secteur social et médico-social”, soulignent les syndicats représentatifs dans leur communiqué. Cet appel à la grève est une première depuis 2017. "C'est très rare", grince Adeline Clerget."La grève, ça ne fait pas partie de la culture du travailleur social",
“Certes, on a une baisse de nos moyens, regrette l'éducatrice de formation. Ça ne doit pas être un alibi à l’inaction. On a des agents de terrain qui ont des compétences, qui ont des technicités, qui pour la plupart font un travail qui n’est plus le leur.”
Avec la fermeture des différents services publics, vous avez des gens qui viennent à palier les fermetures des bureaux CAF, des fermetures de la CPAM, et les maisons France Services, elles ne peuvent pas tout absorber.
Adeline Clerget, secrétaire adjointe CFDT
Sur les pancartes des manifestants, le Haut-Doubs est plusieurs fois mentionné. "La spécificité géographique du territoire haut-doubien doit être prise en compte, explique l'intersyndicale : pas de tribunal de proximité, pas de réponses médicales et éducatives adaptées au placement, un territoire très étendu à couvrir multipliant les kilomètres et le risque routier..."
45 postes supprimés au conseil départemental du Doubs sur 3 ans
Unis pour la défense de leur collègue agressé à Valdahon, les agents mobilisés, principalement des femmes, déplorent un acte “en lien” avec des suppressions de postes annoncées en interne depuis le mois d’avril, selon Isabel Nunes, représentante CFDT du personnel.
On sait que c’est une contrainte à laquelle on n’échappera pas”
Isabel Nunes, représentante CFDT du personnel.
45 suppressions de postes (sur 2300 agents au total) sont prévues sur trois ans, soit une quinzaine par an, selon Isabel Nunes, confirmant une information de l’Est Républicain. Dans le détail, ces postes non remplacés s’expliquent par une baisse de 10% du budget sur chaque direction, dont la direction enfance-famille.
Le fonctionnaire agressé, explique Isabel Nunes, était attaché au pôle enfant confié (PEC) de Pontarlier, un pôle particulièrement affaibli selon la CFDT : “Le plus ancien des travailleurs sociaux a trois ans et demi d’ancienneté à Pontarlier”, constate amèrement la représentante syndicale. En outre, l’agent poignardé à Valdahon était non seulement contractuel, mais il comptait “200 heures effectuées en trop sur l’année”, soit deux mois de travail -non rémunéré-, précise Isabel Nunes.
Les syndicats demandent donc de réétudier cette coupe de 10% dans le budget sur les secteurs en tension, notamment les PEC, et de pérenniser ces postes. Selon le communiqué de l'intersyndicale, le Doubs a même fait de la protection de l'enfance "sa priorité numéro un" avec un "plan Enfance" annoncé en début d'année, et qui à ce jour n'est pas appliqué : "La situation n'a fait que s'aggraver."
Une délégation syndicale a été reçue par la direction, alors que de nombreux travailleurs sociaux avaient pris la route pour être entendus depuis le pays de Montbéliard ou le Haut-Doubs. "C'est l'ensemble du département qui s'est déplacé", appuie Adeline Clerget.