À Chapelle-des-Bois, Mecque du ski de fond du massif du Jura, les annonces d’Emmanuel Macron quant à la non réouverture des stations de ski pour les fêtes de Noël, ont fait l'effet d'une douche froide, et soulèvent de nombreuses questions.
Comme un fondeur pris dans les microscopiques cristaux d’une tempête de neige. À Chapelle-des-Bois, site réputé dans le Doubs comme le paradis blanc des fans de nordique, le monde du ski est dans le flou total. Le village compte 280 habitants et 750 lits touristiques.
Emmanuel Macron a estimé "impossible" mardi soir l'ouverture des stations de sports d'hiver avant les fêtes de fin d'année en raison des risques sanitaires liés à l'épidémie de Covid-19, il a indiqué que "les décisions seront finalisées très prochainement"."Une concertation a été engagée par le gouvernement avec les élus locaux et les professionnels mais il me semble toutefois impossible d'envisager une ouverture pour les fêtes", a dit le président de la République, qui juge "préférable de privilégier une réouverture courant janvier dans de bonnes conditions"."Nous nous coordonnerons sur ce point avec nos voisins européens", a-t-il ajouté.
Moniteurs, ski clubs attendent des réponses précises
À Chapelle-des-Bois, Muriel Giacomino est monitrice et directrice de l’école “Glisses Nordiques”. “Si on a de la neige, et qu’on ne peut pas travailler, ça va être terrible, un crève-cœur", a-t-elle expliqué. Les pistes nordiques seront-elles ouvertes à Noël ? “Je n’en sais rien, en même temps, les activités de plein air sont autorisées. Le nordique, on le sait, les gens ne sont pas regroupés au départ des pistes” argumente la monitrice. “Et de toute façon, il faudra préparer les pistes dès que la neige tombera, il y a aura un pré damage, les pistes seront-elles ouvertes ou pas aux skieurs ?” s’interroge Muriel Giacomino. Sans visibilité à l’horizon, comment prévoir le nombre de moniteurs adéquats, ils sont une dizaine au plus fort de la saison, qui heureusement se joue sur les vacances de février principalement.
Dans la grande famille du ski du fond, Sylvain Thouverey est entraîneur du ski club du Mont-Noir. Le ski club du secteur de Chapelle-des-Bois compte une centaine d’adhérents. Les entraînements des enfants vont pouvoir reprendre dès samedi 28 novembre en extérieur, se félicite le coach. Mais quid de la suite ? “Est ce qu’on est une station de ski ?” se questionne-t-il ? “Le gouvernement met tout le monde dans le même panier, on va faire comment, on va faire du ski hors piste ?” ajoute-t-il.
Le domaine skiable de Chapelle-des-Bois est proche de la frontière suisse. “Le problème est qu’on risque d’avoir des gens qui vont vouloir aller skier en Suisse, alors qu’il n’y a pas une pression énorme sur les pistes de ski de fond au niveau de la densité des pratiquants”.
Rouvrir les pistes de ski de fond pour des raisons sanitaires
Pour Quentin Baticle, président du ski club du Mont-Noir, le traçage et l’ouverture des pistes nordiques apparaissent comme une évidence, même en temps de crise sanitaire. Pour les jeunes notamment. “Si les enfants décrochent du ski nordique pour d’autres choses attractives comme les tablettes ou les consoles, on va les perdre, peut-être pendant plusieurs années, et ils ne feront pas de sport” dit-il. Dans le Haut-Doubs, un grand nombre d’enfants pratiquent le ski de fond, trait d’union entre toutes les générations. Quentin Baticle a du mal à comprendre que les sports de neige puissent être mis en mode pause. “Ca me fait plus peur personnellement d’aller au cinéma que de faire 20 km de ski de fond, c’est un peu injuste quand on voit les annonces de réouverture des théâtres ou cinémas” ajoute le fondeur.Pas de ski, mais les vacanciers vont venir malgré tout
À Chapelle-des-Bois, deux courses de ski nordique doivent animer l’hiver. Elles empruntent les pistes tracées et entretenues tout au long de la saison hivernale. L’envolée nordique est prévue le 31 janvier 2021, la mythique Transjurassienne doit passer ici les 13 et 14 février 2021. Pierre-Albert Vandel, président de Trans’Organisation qui prépare la Transju souhaite que le gouvernement clarifie rapidement les choses. “Le gouvernement parle des stations de ski. Si on a un hiver sans neige, les gens vont venir, est-ce qu’on pourra leur proposer des activités, est-ce que le ski, seulement, est interdit” s’interroge-t-il. “On espère que les choses seront clarifiées plus précisément, et que seront prises en compte dans les stations les activités à risque” ajoute-t-il. Si les gens ne peuvent pas skier, ils pourront marcher, se promener sur les pistes, quelle est la différence ?.Plus de 2000 km de pistes nordiques dans le massif du Jura, 1000 km de pistes de raquettes
L’espace nordique jurassien qui fédère l’ensemble des sites nordiques de l’Ain du Haut-Doubs et du Jura est lui aussi dans l’attente. Mais déjà dans l’action. “Pour l’instant, il y a effectivement un flou, mais le gouvernement nous considère comme des stations...Nous allons travailler pour expliquer que la question du ski nordique est assez différente du ski alpin. Le nordique est diffus sur tout le territoire, réparti sur de nombreux points de départ” explique Nicolas Gotorbe, directeur d’Espace Nordique Jurassien.Nordique France prépare une lettre ouverte pour faire entendre la voix du nordique. Parmi les arguments, la possibilité d’assurer la distanciation sociale. “Les salles hors sac, les sanitaires, on peut les fermer” ajoute Nicolas Gotorbe. “L’objectif pour nous est d’arriver à ouvrir les domaines nordiques, pour que les locaux puissent en profiter en cette fin d’année” complète le directeur.