Depuis le début du mois d’août, une dizaine d’attaques sur des troupeaux ont eu lieu dans le Haut-Doubs et le Haut-Jura. La dernière en date a touché des veaux à l’alpage.
Le cadre est verdoyant. Un décor de montagne un beau jour d’été. C’est ici que Gérard Pagnier fait brouter ses jeunes génisses. Le 10 septembre, il a découvert l’un de ses veaux âgés de 8 mois, sans vie. Il redoutait ce moment. “Il y a déjà eu plein de cas dans le secteur. Cela fait un à deux mois, quand on monte voir nos bêtes, on s’attend au pire, le pire est là” confie l'éleveur.
L’homme estime que ce n’est pas à l’agriculteur de s’adapter au retour du loup. “Il faut faire autrement, prendre le problème dans l’autre sens. On n’a pas à subir cette contrainte-là. Je ne sais pas si les pouvoirs publics vont comprendre qu’il faut les éliminer. Une élimination complète comme l’ont fait les anciens il y a un siècle. Il n’y a pas d’autres solutions" estime cet agriculteur. La direction départementale des territoires lui a proposé des filets électriques pour protéger ses bêtes. Il n’y semble pas favorable.
Le loup est-il le responsable de toutes ces attaques ? Les investigations sont en cours par l'OFB et les services de la Préfecture. Dans la nuit du 1er au 2 août, une génisse a été retrouvée morte dans le secteur de Mouthe dans le Doubs. Une quinzaine de jours plus tard, une génisse et six vaches sont blessées à Châtelblanc non loin de là. Début septembre, c’est une génisse qui aurait été victime d’une attaque vers Nozeroy dans le Jura. Un autre agriculteur a perdu la nuit du 10 au 11 septembre une génisse du côté de Rochejean, il envisage de se doter d’un chien de protection. Pour l’instant les louvetiers surveillent son troupeau. “Il faudra qu’on adapte nos pratiques vu la surpopulation du loup” estime Emmanuel Epenoy.
Il y a toujours cette volonté farouche pour certains de ne pas vouloir une cohabitation avec le loup et les prédateurs.
Patrice Raydelet, président du Pôle Grand Prédateurs Jura
Pour les défenseurs du loup, on n’avance pas. “Le lynx est là depuis 50 ans, le loup bientôt 30 ans, mais on s'aperçoit qu’à chaque petite accalmie, on laisse retomber ce qui a été mis en place, on repart à zéro" estime Patrice Raydelet.
Pour les associations, les solutions sont les chiens de protection, des bénévoles pour la surveillance en cas d’attaques, et surtout un changement des mentalités. “Pour cohabiter avec le loup, de façon durable et pérenne, il faut des moyens de protection pérenne. Il faut un accompagnement selon le défenseur de la faune sauvage, un changement des mentalités. Il rappelle que le loup n’est pas qu’un prédateur. "Il a une valeur écologique, l’espèce est indispensable pour l’équilibre de l’écosystème”, précise Patrice Raydelet.
Le loup bien installé dans le massif du Jura
Le loup est bien présent dans le massif du Jura. Une meute s’est sédentarisée dans le secteur du Risoux en France où deux adultes et deux louveteaux ont été photographiés en 2021. Une autre meute était déjà présente en Suisse voisine sur le site du Marchairuz. Les autorités suisses y ont abattu au printemps 2022 deux loups après les dommages causés sur les élevages du secteur, au grand dam des associations de protection de la faune sauvage. Le loup est un animal protégé. Les tirs pour abattre un de ces prédateurs se font sur dérogation uniquement, lorsqu’aucune mesure ne fonctionne après une série d’attaques sur un secteur (chiens de troupeaux, enclos, tirs d’effarouchement).
Combien de loups aujourd’hui en France ?
Le loup a toujours été présent dans les campagnes françaises. Mais il a été chassé par l’homme au fil des siècles. En 1937, on considère qu’il n’y a plus aucun loup en France. L’animal est revenu de ses propres moyens par l’arc alpin.
En France, à l’issue de l’hiver 2021-2022, la population de loups en France est estimée à 921 individus selon les chiffres de l’OFB, Office Français de la Biodiversité. Pour 2020-2021, la population de loups gris se montait à 783 loups.
Cette année 2022, au vu de la présence croissante du loup, le nombre maximal de loups pouvant être tués en France, s'élèvera à 174 individus, contre 118 initialement prévus.
Quelle est la vie d’une meute de loups ?
Selon l’association Ferus France, en France, une meute comporte généralement quatre à cinq individus en fin d’hiver, parfois jusqu’à 10. Le territoire de la meute varie en fonction de l’abondance et de la répartition des proies. Dans les Alpes, sa superficie est de l’ordre de 150 à 300 km2.
Le couple dominant ne se reproduit qu’une fois par an. Une portée compte environ 4 à 8 louveteaux. Mais on assiste à une mortalité importante la première année.