Montbéliard : Abakar, un jeune apprenti guinéen, a été transféré vers le centre de rétention de Metz 

La mobilisation du boulanger de Besançon pour faire régulariser son apprenti Laye Fodé Traoré a payé. D’autres jeunes soutenus par des associations voient leur destin s’accélèrer. C’est le cas d’Abakar, 20 ans transféré soudainement le 1er février en centre de rétention.

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Depuis près de trois semaines, un comité de soutien s’était créé pour défendre Abakar Gassama, jeune cuisinier guinéen menacé d’expulsion. Le jeune homme de 20 ans est sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français.

Abakar est arrivé en France en janvier 2016 à l’âge de 14 ans, officiellement pour échapper aux agissements de son beau-père en Guinée. Pris en charge dans un collège du pays de Montbéliard pour élèves allophones, il a démarré une formation pour préparer un  CAP de cuisinier. Le 21 janvier 2019, soit deux mois avant sa majorité, Abakar demande son « admission au séjour ». En juin 2019, sa demande est rejetée par la préfecture du Doubs, la décision est assortie d’une OQTF (Obligation de quitter le territoire dans les 30 jours). L’apprentissage d’Abakar est donc interrompu. De multiples recours sont alors engagés, indique le comité de soutien d’Abakar. Le jeune homme avait épuisé toutes les démarches en ce début 2021. “Entre Besançon et Belfort, il y a une trentaine de jeunes comme Abakar, des Guinéens. Le prétexte pour les renvoyer c’est de dire qu’ils n’ont pas de papiers d’identité valables” explique Marie France Lehmann, membre de la Ligue des droits de l'Homme dans le nord Franche-Comté.

Abakar est allé pointér mardi 1er février à la gendarmerie vers 16 heures. Il n’est jamais ressorti. “Nous sommes les premiers surpris que ce soit allé si vite, on est en contact avec un avocat à Metz, on est en train de faire la demande pour qu’il soit revu par un juge des libertés au centre de rétention de Metz où oeuvrent des associations d’aide aux migrants” précise Marie-France Lehmann.

La pétition en ligne pour soutenir Abakar avait déjà recueilli près de 485 signatures. Pourquoi tout s'est-il accéléré rapidement ? “Je pense que c’est parce qu'on a parlé de sa situation” estime madame Lehmman.

 

Une expulsion pour Abakar serait dramatique

Selon le comité qui le soutient, la mère et la petite sœur ont dû fuir le domicile conjugal, leur quartier et la Guinée pour échapper aux violences du beau-père. "Il n’est pas envisageable de renvoyer Abakar dans les griffes de son bourreau, perspective qui le terrorise "estime le comité. Ce dernier argumente sur le fait que la Cour de Justice de l’Union Européenne vient  de rappeler, par un arrêt du 14 janvier que la décision de renvoi d’un jeune migrant dans son pays d’origine ne peut être prise que si un accueil adéquat lui est garanti (dans sa famille ou dans une structure adaptée) dans son pays d’origine.

 

Elus et comité de soutien s'indignent de cette expulsion brutale
 

Le comité CGT des retraités de PSA qui soutient le jeune migrant, s’indigne. Le jeune Abakar scolarisé actuellement en CAP vente avait vu ses horaires de pointage à la gendarmerie changés dernièrement. “Ce lundi matin, l'avocate d'Abakar prenait contact avec la gendarmerie pour demander des explications sur cette mesure.La gendarmerie a déclaré à l'avocate qu'il s'agissait d'un malentendu et que les anciennes conditions de pointage étaient rétablies. Un retropédalage et un succès apparent dont nous nous sommes réjouis lorsqu'à 14H nous étions une cinquantaine en soutien à Abakar. Mais il s'agissait d'un piège. Lorsqu'Abakar est venu pointer à 16H30, les gendarmes l'ont embarqué de force au Centre rétention de Metz.Une tromperie odieuse basée  sur un mensonge à l'avocate, pour pouvoir embarquer Abakar quand nous ne serions pas là” écrit le comité emmené par Bruno Lemerle.

Martial Bourquin député maire d'Audincourt vient d'écrire au ministre de l'intérieur Gérald Darmanin afin qu’il sursoie à cette expulsion et procède à la régularisation de sa situation. "Notre pays, et c’est l’honneur de la France, a accueilli cet adolescent, l’a formé. Il obtient un CAP de cuisinier qu’il complète actuellement  par un CAP de vente. Abakar Gassama s’est intégré à notre société. Il a des projets professionnels avec une promesse d’embauche.  Aujourd’hui, la décision d’expulser ce jeune homme est incompréhensible, indigne de nos valeurs de la République, celle que nous défendons et qui sont inscrites sur les frontons de chaque mairie, de  chaque établissement scolaire “Liberté, Égalité, Fraternité”. Comment comprendre qu’une nation accueille, protège, éduque un enfant, lui fait entrevoir un projet de vie et qu’au jour de sa majorité, elle le rejette, casse ses espoirs et l’expulse ?" s'indigne l'élu dans un communiqué envoyé à la presse.

Deux conseillers départementaux ont écrit le 1er février au préfet du Doubs pour s’indigner de la brutalité de la procédure. “Au-delà de la brutalité de ce procédé qui touche un jeune étudiant qui a tout mis en oeuvre pour réussir son intégration et qui a soif d’apprendre et acquérir des compétences reconnues, il est compliqué de comprendre que notre pays accepte, par le biais des départements, de tendre la main à ces jeunes migrants non accompagnés lorsqu’ils sont mineur, leur demandant de faire preuve de responsabilité en entamant leur intégrations, et qu’il n’hésite pas ensuite à les priver d’avenir en interrompant brutalement leur cursus scolaire ou professionnel sans les laisser aller à terme” déclarent Christen Coren Gasperoni et David Barbier, conseillers départementaux du canton d’Audincourt. Les élus demandent au préfet de revoir la situation du jeune homme et de surseoir à son expulsion.

Le Comité pour Abakar demande aussi sa remise en liberté  et le réexamen de sa situation afin de lui permettre de terminer ses études et d’exercer son métier en France.

Deux rassemblements sont prévus mercredi 3 février à 14 h devant la Mairie d’Audincourt et jeudi 4 février à 15H à la Pierre à Poissons (Montbéliard). 

 

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