En décembre 2023, la ville de Pontarlier (Doubs) a reçu plus de 230 dessins et peintures du peintre local Marius Laithier. Des oeuvres inédites, qui témoignent des paysages du Haut-Doubs dans les années 1910, et des conditions de vie des Poilus dans les tranchées.
Un catalogue d'œuvres inédites, et riches à plus d'un titre. Juste avant Noël, le musée de la ville de Pontarlier dans le Haut-Doubs a reçu une belle surprise. 232 œuvres inédites du peintre franc-comtois Marius Laithier lui ont été donnés, sur décision du conseil municipal de la commune.
C'est Jean Barthelet, le neveu du peintre natif de Brey-et-Maison-du-Bois (Doubs), qui a rassemblé 211 croquis au crayon réalisé par son oncle, ainsi que 21 aquarelles, avant de les proposer à la ville. Ces œuvres, peintes et dessinées entre 1912 et 1916, viendront s'ajouter aux 38 travaux de Laithier déjà réunis au musée municipal de Pontarlier.
Un jeune peintre prometteur, fauché par la Première guerre mondiale
Si le nom de Marius Laithier vous est inconnu, sachez qu'il fait partie des artistes incontournables ayant vu le jour dans le Doubs et l'ayant couché sur papier. "C'est un jeune artiste né dans le Haut-Doubs, mais qui a eu une carrière très courte" résume Laurène Mansuy, directrice du Château de Joux et du musée de Pontarlier, au micro de nos journalistes Marine Candel et Guillaume Soudat.
Dès le collège, il s'est fait repérer et a reçu une bourse pour monter à Paris et devenir artiste. Ce qu'il a brillamment réussi puisqu'après avoir réussi le concours de l'école nationale supérieure des Beaux-Arts, il a rejoint l'atelier du peintre Fernand Cormon. Avec l'objectif de se faire connaître.
Laurène Mansuy,directrice du Château de Joux et du musée de Pontarlier
Marius Laithier signe alors un début de carrière prometteur. Il est très vite reconnu par ses pairs. Il signe notamment des cartons grand format, imaginés pour les vitraux du château de Joux, preuve d'un vrai attachement à ses racines. Cette œuvre, exposée au salon des artistes français, lui vaut d'ailleurs une distinction. Malheureusement, et comme beaucoup d'hommes de sa génération, la Première guerre mondiale vient faucher ses grandes ambitions.
Mobilisé dès 1914, Marius Laithier part sur le front. Il finira par y tomber le 20 septembre 1916, lors de la bataille de La Somme, à seulement 23 ans. Pour autant, l'artiste n'a jamais arrêté de dessiner. Les croquis acquis par le musée de Pontarlier, et retrouvés sur la dépouille du peintre, en sont la preuve.
Ces carnets de guerre regroupent des dessins représentant des scènes de vie dans les tranchées. On y voit ses camarades au repos à l'arrière, faire des corvées, en train de faire le guet, etc. L'autre moitié, ce sont des portraits plus précis, détaillés, de ses compagnons d'armes. Il s'agit de souvenirs, réalisés pour que les soldats l'envoient ensuite à leur famille.
Jean-Bernard Passemard,chargé de mission pour le château de Joux
Le reste du catalogue est lui constitué de paysages de Franche-Comté. "Dans les deux cas, ces peintures nous sont d'une grande utilité historique et culturelle" reprend Laurène Mansuy. "Pour la partie nature, on peut comparer les lieux avec les œuvres d'autres artistes locaux, pour voir comment c'était à l'époque".
"Et les croquis des tranches documentent de façon très précise une guerre qui a marqué toute une génération" continue-t-elle. "Ils donnent aussi à voir des moments quotidiens et inédits de la vie des Poilus, en les incarnant avec les visages des soldats".
Les carnets de guerres pas consultables avant 2030
Quand pourrez-vous profiter de tout cela ? Malheureusement, il faudra vous armer de patience. Si la partie paysagère des œuvres de la donation sera présentée sous peu au musée de Pontarlier, dans la partie des "artistes comtois", le reste attendra. En effet, les carnets de guerre seront intégrés au musée d'art et d'histoire militaire qui ouvrira ses portes au château de Joux d'ici à 2030.
Un timing assez, long justifié au vu des importants travaux de restauration, d'accessibilité et de mise en conformité des normes de conservation nécessaires dans la forteresse de la Cluse-et-Mijoux. D'ici là, ces vestiges de la Grande guerre ne pourront être consultés que par des chercheurs, et feront l'objet d'un important travail de documentation.