La Cour administrative d'appel de Nancy vient d'annuler les décisions de la préfecture de Haute-Saône et du tribunal administratif au sujet de l'aménagement de l'ancien aérodrome militaire de Lure-Malbouhans en Haute-Saône. Les associations de défense de l'environnement LPO et FNE BFC avait saisi cette juridiction pour empêcher la destruction d'espèces protégées et de leurs habitats.
Que faire des 236 hectares laissés vacants par l'armée depuis son départ en 1997 ? Un site de développement économique ou un espace naturel préservé ? Cet ancien aérodrome militaire est au cœur d'une bataille juridique depuis le début des années 2000.
En 2005, le Conseil général de Haute-Saône achète ce terrain pour le reconvertir "en un parc industriel d’innovation de qualité environnementale et notamment l'accueil d'équipements destinés principalement à la recherche et au développement des systèmes de mobilité innovantes, durables et propres, ainsi que des activités connexes". Un projet porté par le syndicat mixte Aremis-Lure composé du Conseil Départemental de la Haute-Saône, de la Communauté de Communes du Pays de Lure et de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Haute-Saône.
Mais ce projet est contesté par les associations de défense de l'environnement comme la CPEPESC, la Ligue de protection des Oiseaux de France et France Nature Environnement Bourgogne Franche-Comté.
Sur ces 236 hectares, la nature a repris ses droits. Cet espace "est couvert de prairies naturelles épargnées par l’intensification des pratiques agricoles des dernières décennies. Dès 2002, l’Etat a logiquement classé les 237 hectares du site en Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF) de type 1, reconnaissant ainsi officiellement sa valeur patrimoniale" précisent les associations environnementalistes."
Pour aménager cette zone, le syndicat mixte Aremis-Lure avait donc besoin de dérogation de la part de l'Etat permettant la destruction d’espèces protégées et de leurs habitats. Cette dérogation est accordée par la préfecture de Haute-Saône en 2016.
Les trois associations ont contesté cette dérogation devant le tribunal administratif de Besançon.
Les associations avaient été déboutées en juin 2018 "par un jugement qui abaissait honteusement le niveau d’exigence attendu d’un dossier de demande de dérogation à la protection des espèces" selon l'expression de leur communiqué.
Deux d'entre elles, la LPO et FNE ont poursuivi leur combat judiciaire en appel. Et, cette fois-ci, les associations ont eu gain de cause.
La Cour administrative d’appel de Nancy vient d’annuler ce 8 février 2022 la dérogation de 2016 permettant la destruction d’espèces protégées et de leurs habitats ainsi que le jugement du Tribunal administratif de Besançon qui avait rejeté les requêtes des associations en 2018. Pour les défenseurs de l'environnement, il s'agit d'"une destruction préméditée d’un site à haute valeur environnementale".
D'après la LPO et FNE BFC, "la Cour administrative d'appel a estimé que la recherche menée par le SYMA est très lacunaire et qu’une solution moins dommageable pour l’environnement était envisageable à l’extérieur de la ZNIEFF sans présenter de difficultés insurmontables".
L’étude des alternatives à la destruction d’espèces protégées et de leurs habitats est trop souvent négligée par les porteurs de projets d’aménagement du territoire. Nos associations saluent cette décision de la Cour qui rappelle que les dérogations ne peuvent être délivrées qu’au terme d’une recherche sérieuse démontrant l’absence d’autres solutions et tenant compte des enjeux de préservation de la biodiversité.
LPO et FNE BFC
Sur son site, la Commission de Protection des Eaux se félicite également de cette décision.
Cette décision qui marque un coup d’arrêt que nous espérons définitif au projet irréaliste d’aménagement d’une ZAC sur ce territoire au patrimoine naturel d’une extrême richesse. Comme nous le demandions en 2010 au Conseil départemental, porteur du projet avec le Syndicat mixte pour l’aménagement d’AREMIS-Lure, si en ces lieux une décision de norme supérieure d’intérêt général s’impose, c’est bien celle de prononcer la protection de cet espace remarquable afin de respecter les engagements nationaux et européens de protection de la nature et de la biodiversité.
CEPESC
Contacté le président du Conseil départemental de Haute-Saône, n'a pas encore pu réagir à cette décision.