"Je suis en plein deuil" : après l'incendie de la guinguette de Nevers, le propriétaire toujours effondré

Mardi 17 octobre 2023, la "Guinguette on Loire", lieu de vie bien connu à Nevers et dans toute la Nièvre, était détruite par un incendie. Alors que la justice privilégie la piste criminelle, le gérant de l'établissement, Christophe Bezin, revient sur cet événement "dramatique".

"Je suis en plein deuil. C'est une désolation". Les mots sont durs, mais traduisent l'état d'esprit d'un homme toujours "effondré". Six jours ont passé depuis l'incendie qui a ravagé son établissement, la "Guinguette on Loire", à Nevers (Nièvre), mais Christophe Bezin accuse toujours le coup.

"Normalement, on aurait dû ouvrir la saison automnale ce lundi 23 octobre. Il y aurait eu de la musique, des rires, de la couleur et de la joie", réagit le propriétaire. "À la place, il n'y a plus que du bois calciné, des rubalises rouges et blanches autour du lieu et des panneaux « enquête en cours ». C'est de la science-fiction ".

La Guinguette on Loire, "plus qu'un simple restaurant"

Il y a un peu moins d'une semaine, mardi 17 octobre, la Guinguette on Loire, établissement bien connu des Nivernais, était détruite par un incendie, survenu aux alentours de 21h. Alors en vacances à Quiberon (Morbihan), Christophe Bezin n'est prévenu que trois quarts d'heure plus tard par sa famille et ses amis. "Je rentre d'une balade à vélo, et là, je vois que j'ai des dizaines d'appels manqués" se remémore-t-il. "J'ouvre ensuite une vidéo envoyée par mon fils, où je vois ma guinguette, mangée par des flammes de 5m de haut".

Le déni, d'abord. L'envie de ne pas y croire. Puis la colère et la sidération, devant des photos sans équivoque. "Ça a brûlé de tous les côtés, il ne reste plus rien. La cuisine, le bar, les pistes de danses, les tables et bancs... Tout ce qui faisait notre charme a disparu", regrette Christophe Bezin.

Lui qui devait initialement rentrer le lendemain de l'incendie a préféré prendre "un jour de vacances supplémentaires, afin d'encaisser la nouvelle". À son retour en Bourgogne, le premier réflexe du sexagénaire est de se ruer sur son lieu de travail, comme pour vérifier de ses yeux la nouvelle. "C'est là que la réalité m'a vraiment frappé en pleine tête. Devant ce tableau noir, je me suis dit que c'était six ans de travail parti en fumée, et que plus rien ne serait jamais comme avant".

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Installée depuis 2017, la Guinguette on Loire charriait avec elle l'histoire de son propriétaire, qui décidait de quitter son ancien métier dans l'automobile pour se lancer dans la restauration. "Ce n'était pas un bar lambda", se souvient Christophe Bezin. "J'avais mis du temps à créer une ambiance d'empathie et d'amour pour les autres. C'est perdre cela qui m'a fait le plus mal. Pas le matériel, mais l'espace de liberté que représentait ce lieu".

Il y avait les bals du dimanche, toutes ces soirées à thème. On accueillait des centaines de personnes de tout âge et de toute catégorie sociale. Ici, il n'y avait pas de hiérarchie. Les gens s'y sentaient bien.

Christophe Bezin,

propriétaire de la "Guinguette on Loire"

"J'aime à penser qu'ici, des personnes malmenées par la vie pouvaient venir boire un coup, danser, s'amuser et discuter" reprend le sexagénaire. "C'est aussi cela qu'on perd". Preuve de l'importance du lieu pour les locaux, depuis l'incendie, les hommages se multiplient sur la page Facebook de Christophe. Souvent des vidéos de moments passés à la guinguette, accompagné de mots d'encouragements : "on reste debout", "un lieu magique", "cet endroit renaîtra", etc.

Reconstruire ? Délocaliser ? Abandonner ? Ces questions taraudent actuellement Christophe Bezin. "Je suis en plein doute" assure-t-il. "Ce lieu, je l'adore, c'est ma vie. Les témoignages d'affection me mettent les larmes aux yeux. Mais je ne sais pas. C'est très dur. Il faudrait repartir d'une feuille blanche, après six ans d'efforts, alors que j'ai maintenant 61 ans". Tâches administratives, justice, paperasses, assurances, le propriétaire l'avoue, il essaye de garder la tête froide pour toutes les étapes techniques, avant de penser à une éventuelle reconstruction.

Il faut comprendre que ce lieu, ce sont des centaines d'anecdotes, de tableaux, d'objets chinés mis bout à bout. Ce sont pleins de petits détails irremplaçables qui amenaient un supplément d'âme.

Christophe Bezin,

propriétaire de la "Guinguette on Loire"

Et même si "l'étape de la colère est passée", Christophe Bezin a toujours besoin "d'expurger sa misère"... par l'écriture. "Tous les jours, je poste une publication Facebook qui traduit mon état d'esprit" précise-t-il. "Quelques lignes, comme des poèmes. Cela permet de garder du lien avec les clients, et de me faire du bien moralement". Dernier post en date, une vidéo tournée il y a un an jour pour jour, "lors d'une soirée où on avait réuni 200 personnes. En automne, on aurait eu la soirée Halloween, l'Oktoberfest... Plein de moments de vie".

Du côté de la justice, la thèse criminelle est privilégiée pour expliquer le départ de feu. Impossible d'avoir plus de détails, l'enquête, confiée au parquet de Nevers, étant toujours en cours. "Bien sûr que je me demande qui aurait pu faire ça" évacue Christophe. "Mais je ne vois pas. Ce sont sans doute des gamins, sur un coup de tête. J'avais réussi à créer un lieu de vie atypique, peut-être que ça a provoqué des jalousies. Mais pas au point de détruire ma vie".

Des délocalisations temporaires envisagées

Se dirige-t-on donc vers une fin de l'aventure ? Pas nécessairement. "Au fond de moi, mon souhait est bien sûr de repartir. Mais ça ne dépend aussi pas que de moi" conclut Christophe Bezin. "Je n'imagine pas finir comme ça. L'aventure ne peut pas s'achever de cette façon, ce serait terrible".

Une renaissance, oui, mais sous quelles formes ? Selon nos informations, plusieurs communes de la Nièvre auraient proposé à l'équipe de l'établissement de les accueillir dans leur salle des fêtes, le temps de quelques week-ends. Une option qui séduirait Christophe Bezin. Et qui permettrait de faire vivre l'esprit de la "Guinguette on Loire", oasis de bonheure au milieu de la Nièvre.

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