Depuis le début du confinement, la fermeture des restaurants et de beaucoup d'entreprises, la grande distribution est devenue le seul débouché pour les producteurs. Mais selon les éleveurs, elle en profite pour baisser encore les prix. Des éleveurs ont décidé de cesser de vendre leurs bêtes.
Emmanuel Bernard est éleveur bovin à Cercy-la-Tour dans la Nièvre. Il est aussi vice-président de la Fédération nationale bovine. Depuis une semaine, comme d'autres, cet éleveur de charolaises a cesser de vendre ses vaches. Il dénonce une pression sur les prix qui s’est renforcée depuis le début du confinement.
« La grande distribution est devenue maitre des relations commerciales et en a profité pour écraser les prix payés au producteur. »
« On a vécu des moments difficiles avec le confinement, la fermeture de tous les restaurants, et le remplacement de toute cette consommation par l’approvisionnement en grande-distribution, explique Emmanuel Bernard. La grande distribution est devenue maitre des relations commerciales et en a profité pour écraser les prix payés au producteur. »
Un bras de fer avec la grande distribution
Selon l’éleveur, les prix actuellement proposés ne couvrent que trois quarts des coûts de production. Chaque vache vendue, ce serait donc de l’argent perdu. « On est payé 75 % de nos prix rémunérateurs. On ne peut pas tenir très longtemps ».A l’initiative des Jeunes agriculteurs et de la Fédération nationale bovine, rejoints par la Confédération paysanne, des éleveurs ont donc décidé de cesser d’envoyer leurs bêtes à l’abattoir et de suspendre leurs ventes. Le début d’un bras de fer contre les géants de la distribution.
Face à la pression exercée par les abattoirs et la grande distribution sur les prix, les éleveurs.euses de bovins ont décidé de garder leurs animaux à la ferme depuis ce lundi. Si on veut #PasUnPaysanDeMoins, il faut des prix rémunérateurs maintenant ! @EleveursBovins pic.twitter.com/dLHywguHHe
— Conf' Paysanne (@ConfPaysanne) April 24, 2020
« Ce n’est pas une situation très favorable » reconnait Emmanuel Bernard. « Mais perdu pour perdu, il fallait faire un baroud d’honneur pour montrer à tout le monde que cela ne pourrait pas continuer comme ça. »
Ces éleveurs demandent une contractualisation avec les grandes-surfaces qui prenne en compte leurs coûts de production. « Aujourd’hui, on exporte vers l’Italie avec des tarifs qui n’ont pas baissé. Mais en France grande distribution ne joue pas le jeu » regrette Emmanuel Bernard.
Pour ces éleveurs, il suffirait que « 5 à 10 % des éleveurs fassent l’effort » de retenir leurs animaux. « On est sur un marché à flux tendu. Cela peut suffire » veut croire l’éleveur. « Les effets panique sur les marchés sont très rapide »
Selon la Fédération nationale Bovine, dans un courrier daté 16 avril, le ministre de l'Agriculture, a refusé d'instaurer un prix minimum payé aux éleveurs. Didier Guillaume a néanmoins estimé qu'il n' y a "aucune raison acceptable pour justifier que le prix payé aux éleveurs baisse (...) au moment où les ventes de viande bovine progressent" dans la grande distribution.
Dans un courrier du 16 avril, @dguillaume26 a refusé notre demande de prix minimum payé aux éleveurs à hauteur du coût de production, en se dédouanant de toute responsabilité dans la crise que nous traversons. Notre réponse ⬇️⬇️ pic.twitter.com/055lsV1jYZ
— FNB (@EleveursBovins) April 20, 2020