Daniel Viard, éleveur à Digoin, avait déposé une demande pour exploiter un élevage de 4 470 animaux, dont 3 910 bovins destinés à l’exportation. La préfecture de Saône-et-Loire a retoqué ce projet qui avait reçu un avis négatif du commissaire enquêteur et suscité une forte opposition.
Un dossier qui suscite la polémique depuis l’été 2017
Daniel Viard voulait agrandir son élevage pour pouvoir accueillir 3 910 bovins destinés à l’exportation, 240 bovins à l’engraissement et 320 vaches allaitantes, soit un total de 4 470 animaux.De nombreux riverains s’opposaient à ce projet en raison des risques de nuisances (va-et-vient des camions, odeurs générées par les animaux, problèmes sanitaires, etc).
La Confédération Paysanne avait organisé une manifestation pour dénoncer "un projet d'élevage industriel ne répondant en rien aux manques de revenu et de reconnaissance des paysans" et qui "pourrait provoquer des dégâts environnementaux importants qui nuiront à l’image qualitative de l’élevage charolais".
Brigitte Bardot elle-même avait écrit au ministre de l’Agriculture pour dénoncer ce projet de ferme-usine.
Pourquoi la préfecture a-t-elle refusé de donner une autorisation d’exploiter ?
Une enquête publique avait été lancée du 22 août au 22 septembre 2017 : elle avait débouché sur un avis négatif du commissaire enquêteur qui avait signalé entre autres :
-la sensibilité du terrain aux ruissellements et infiltrations
-l’absence d’étude sur la pérennité de la ressource en eau issue du forage et les incidences sur la nappe phréatique
-l’absence d’accès préservant les riverains des nuisances liées au trafic des poids lourds
-l’absence d'étude économique fiable pour l'activité de préparation à l'export
Le délai normalement imparti au préfet pour statuer sur le dossier était de trois mois à compter de la réception des conclusions du commissaire enquêteur en novembre 2017. Le délai d’instruction a été prolongé de 2 mois en raison du grand nombre d’observations recueillies.
Le dossier a finalement été présenté au CODERST (conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques) jeudi 22 mars 2018.
Le CODERST a aussi émis un avis défavorable, en estimant notamment que ce projet visait à "augmenter de manière manifestement disproportionnée" l'activité actuelle "qui ne respecte déjà pas les dispositions réglementaires". Lors de plusieurs contrôles effectués par la direction départementale de la protection des populations, il a été constaté que l'exploitation de Daniel Viard dépassait le nombre de bovins à l’engraissement autorisé.
A l’issue d’une procédure contradictoire de 15 jours (durant laquelle Daniel Viard a présenté ses observations sur le projet de décision de rejet qu’il a reçu le 27 mars), le préfet a signé un arrêté de refus de l’autorisation d’exploiter.
Tous les documents communicables et en particulier la décision de refus d’autorisation sont disponibles sur le site internet des services de l’État www.saone-et-loire.gouv.fr rubrique politiques publiques/ environnement et risques sanitaires et technologiques/enquêtes publiques/ICPE.
Le reportage de Damien Boutillet, Romy Ho-A-Chuck, Rachel Nectoux et Emmanuel Picaut, avec :
- Bertrand Paire, agriculteur et voisin
- Fabien Genet, maire de Digoin (DVD)
- Jean-Luc Desbrosses (par téléphone), secrétaire général de la chambre d'agriculture de Saône et Loire
Pourquoi le CODERST a-t-il émis un avis défavorable ?
L'avis défavorable à l’autorisation d’exploiter (moins deux abstentions) a été pris en considérant notamment :- que l'une des conditions d'exploitation de cette installation dans le respect du voisinage, de la sécurité et la salubrité publiques, est le détournement du trafic des poids lourds par le chemin de Volgu, et que l'aménagement, à ce stade, est impossible en l'absence d'accord des communes et des propriétaires concernés,
- que le bâtiment B5 prévu pour l'allotement de 2300 bovins ne respecte pas les distances d'implantation imposées dans l'arrêté ministériel du 27 décembre 2013 portant prescriptions générales pour les élevages bovins soumis à autorisation, soit 35 mètres minimum d'un cours d'eau,
et que cet arrêté ministériel ne prévoit pas de dérogation aux distances d'implantation des bâtiments vis-à-vis des cours d'eau,
- que le dossier présenté par Monsieur VIARD a été établi moins dans un objectif de régularisation de sa situation que dans le but d'augmenter de manière manifestement disproportionnée son activité actuelle qui ne respecte déjà pas les dispositions réglementaires