TEMOIGNAGE. Refusée à bord par EasyJet, une passagère handicapée porte plainte

Margaux-Méline Manciat n’a pas pu embarquer lors d’un vol easyJet cet été. Handicapée, la compagnie aérienne a refusé qu'elle voyage seule. Ce n'est pas la première fois que la société britannique est poursuivie en justice pour des faits similaires.

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Le 20 août 2019, Margaux-Méline Manciat se rendait à l’aéroport Lyon-Saint Exupéry. "Je me suis vue refuser l’embarquement de mon avion à destination de Bordeaux par la compagnie EasyJet. Selon eux, je ne pouvais voyager seule sans accompagnant car je me déplace en fauteuil roulant", témoigne la jeune femme, qui vit à Charnay-lès-Mâcon (Saône-et-Loire). Margaux-Méline, âgée de 21 ans au moment des faits, se rendait à Bordeaux pour un voyage personnel.

Suite à l’incident, elle a déposé plainte en octobre dernier. Une enquête est en cours. Margaux-Méline Manciat souhaiterait être indemnisée et que lui soit reconnu le préjudice pour discrimination. 
 

Un avoir de 150£

Suite à une vidéo sur Facebook qu’elle a publié après l’incident, Margaux-Méline a été "très vite" contactée par le siège du groupe à Londres. "C’est assez drôle, ils m’ont proposé un avoir de 150£ à utiliser dans les six mois et utilisable par n’importe qui par téléphone. Je n’ai pas répondu mais j’aurais pu demander : ‘et si j’accepte et que je le prends pour moi et que je suis encore bloquée ?’"
 

Margaux-Méline estime avoir pourtant pris toutes les dispositions nécessaires en remplissant au préalable un formulaire sur sa situation. Le jour du départ, "Je me suis présentée assez tôt le matin car il faut y être en avance lorsque l’on est en situation de handicap. Il était environ 8h45. EasyJet était au courant qu’il devait y avoir une personne handicapée car j’avais réservé une assistance", s’insurge la jeune femme.
 

Voyager seul ou accompagné

Une situation d’autant plus incompréhensible pour elle, alors qu’elle avait réalisé un mois auparavant un voyage Lyon-Biarritz, seule, avec la même compagnie. "Une personne m’a mise sur un petit fauteuil roulant pour me mettre sur ma place. Tout a été très bien fait", estime Margaux-Méline sur ce premier trajet. Au suivant, "la fille à l’embarquement a eu l’audace de me dire que c’était une erreur de leur part", s’étonne-t-elle.

Sur son site, la compagnie explique qu’une personne handicapée peut ne pas être accompagnée si elle peut notamment "attacher et détacher sa ceinture de sécurité" et "enlever ou mettre son gilet de sauvetage". Des conditions que dit pouvoir remplir la Bourguignonne. En fauteuil roulant depuis un accident de cheval survenu en 2015, elle souffre d’une paraplégie basse. Ce qui ne l’empêche pas de faire du tennis fauteuil… ni de ramper si une situation critique le lui imposait.

 

Un manque de formation ?

Margaux-Méline Manciat impute le problème à une désorganisation interne : "lors de l’embarquement, où j’ai déposé ma valise, j’avais tout. La fille de l’embarquement m’a dit non, que ce n’était pas possible de voyager. On voit que c’est un problème de formation sur le terrain. EasyJet était au courant que j’allais voyager mais la personne sur le terrain non." Sa vision est partagée par l'APF France handicap (Association des paralysés de France), qui s'est constituée partie civile dans son dossier.

L'une de ses administratrices de l'association, Pascal Ribes, témoigne : "il y a des problèmes réguliers, notamment avec les compagnies low cost comme EasyJet, Ryanair… qui proposent des billets à des tarifs très réduits. Il y a un problème de formation des personnels : les compagnies ne forment pas leurs salariés à l’assistance des personnes handicapées, à la législation européenne... Elles donnent des consignes contradictoires : il faut faire vite à l’embarquement…" 

Selon l'administratrice, c'est une question d'apprentissage : "Le problème essentiel est qu’ils réduisent les coûts au maximum donc ils ne forment pas leur personnel. Ils ont très peu de personnel dans les aéroports, ils prennent des gens pas formés et les mettent sur un poste sans leur donner la formation qui va bien."


EasyJet déjà condamné

Selon une réglementation européenne du 5 juillet 2006, les compagnies aériennes ne peuvent pas refuser l'embarquement d'une personne en raison de sa mobilité réduite ou de son handicap, sauf "pour des motifs de sécurité justifiés et imposés par le droit".

C’est pourtant loin d’être la première discrimination de la compagnie britannique envers des personnes handicapées. Elle a été plusieurs fois poursuivie et condamnée en France pour des faits similaires.

En 2013, EasyJet doit payer une amende de 70 000 euros pour discrimination, pour avoir refusé l’embarquement de trois personnes handicapées. Les trois personnes paraplégiques n’avaient pas pu prendre leur vol à l’aéroport Roissy Charles de Gaulle, en 2008 et 2009, parce qu’elles n’étaient pas accompagnées. La compagnie avait expliqué l’avoir fait pour des raisons de sécurité.
 
Margaux-Méline Manciat attend désormais la décision de justice. À 22 ans, elle aimerait pouvoir voyager, en toute liberté.

 
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