3 000 faux papiers fabriqués, 400 000 euros de gain : un informaticien et un boulanger faussaires de haut niveau, jugés à Paris

Depuis le lundi 4 mars 2024, Anthony P. et Aurélien, respectivement ingénieur et boulanger dans le Territoire de Belfort, sont jugés à Paris pour leur participation à un réseau de falsification de grande ampleur. Les deux hommes sont accusés d'avoir fabriqué entre plus de 3 000 faux papiers, pour un bénéfice de 400 000 euros.

Informaticien et boulanger le jour. Faussaires au plus de 400 000 euros de bénéfice la nuit. Depuis le lundi 4 mars 2024, deux habitants du Territoire de Belfort sont jugés au tribunal correctionnel de Paris pour leur implication au sein de la Genèverie, un "supermarché en ligne" de la contrefaçon, spécialisé dans la fabrication et la commercialisation de fausses montres de luxe, faux papiers... et actif sur le darknet puis sur la messagerie cryptée Telegram.

Anthony P, 28 ans, et Aurélien, 23 ans, sont au centre de ce procès. Ils sont soupçonnés d'avoir créé un réseau de falsification qui, entre 2022 et 2023, aurait produit puis vendu entre 3 500 et 6 400 faux papiers (cartes d'identité et permis de conduire) selon le journal Le Parisien. Bénéfice retiré par les deux faussaires : plus de 400 000 euros. 

Anthony, "génie de l'informatique"

Au sein de ce duo, un homme apparaît comme le cerveau de l'opération, Anthony P. "Petit génie" de l'informatique, comme l'ont qualifié les enquêteurs qui ont procédé à son arrestation, en avril 2023. Il opérait depuis son domicile de Vauthiermont, petit village de 200 habitants, à la frontière entre le Territoire de Belfort et le Haut-Rhin, où il vivait avec sa femme, qui ignorait tout de ses activités.

Informaticien brillant, Anthony travaillait pour une grande entreprise spécialisée dans la cybersécurité, comme le précisent nos confrères de l'Est Républicain, depuis son pavillon belfortain. C'est pendant le Covid qu'il produit ses premiers faux : factures, chèques, diplômes. Il attrape vite le virus et se met à produire des papiers d'identité sous le pseudonyme de Volrys.

Très vite, les commandes affluent. Volrys travaille vite, et surtout bien. Des faux créés en 2 h 25, en tout point identiques aux papiers officiels, coûtant entre 100 et 400 euros. "La qualité de ses prestations et soulignée par le nombre de commentaires positifs" souligne ainsi les policiers de l'Oltim (office de lutte contre le trafic illicite de migrants) dans les colonnes du Parisien. Le Belfortain se crée ainsi très vite un réseau d'abonnés, et va vouloir passer à la vitesse supérieure. 

Quand la production a commencé à décoller, il a fallu automatiser

Anthony P, alias Volrys,

prise de parole à son procès

Anthony pense alors à Aurélien, ancien boulanger domicilié à Valdoie, qu'il connaît depuis l'enfance. Ce dernier a connu la rue, a travaillé à l'usine et, lorsqu'il est approché, a plusieurs dettes à rembourser. C'est pour régler ses soucis d'argent qu'il accepte donc de rentrer dans la combine, et d'installer un atelier de contrebande à son domicile.

L'équipe Volrys monte en puissance, fabrique jusqu'à dix cartes par jour, avec possibles réductions pour les personnes incarcérées. Le client entrait sur Telegram, prenait contact avec un chatbot, puis il recevait un lien vers un site qui générait un formulaire comprenant les données biométriques et une photo d'identité.

Des fonds intraçables

La fabrication débutait une fois la validation des informations réalisées. Le paiement s'effectuait soit en cryptomonnaies, soit en coupon PCS vendus notamment dans les bureaux de tabac, et qui permettent de créditer des cartes de paiement prépayées. Les fonds étaient ainsi intraçables.

Problème dans cette affaire florissante : Volrys était ciblé par les forces de l'ordre depuis 2020 et ses premières apparitions sur le darknet. Les agents connaissaient son pseudo, mais pas l'identité de celui qui se cachait derrière. Pour entrer en contact avec le petit génie du web, ils se créent un faux profil et passent eux-mêmes commande pour une fausse carte. Aidés par l'IGPN et l'office anticybercriminalité, ils interrogent un premier profil, qui les met alors sur la piste d'Anthony P.

L'ingénieur est mis sous surveillance et les agents comprennent très vite qu'ils tiennent Volrys. Arrêté le 3 avril 2023 à son domicile, le mis en cause ne niera pas les faits. Ils interpellent ensuite son complice, Aurélien, chez qui ils trouvent "un amoncellement de matériel spécialisé posé sur des planches et des tréteaux" raconte Le Parisien. "Cinq imprimantes, une presse hydraulique, des ordinateurs, scanners, encres iridescentes, moules, scalpels ou pastilles estampillées "République Française". Un vrai arsenal, dans lequel était fabriqué jusqu'à 35 cartes par jour, à raison d'un quart d'heure maximum par carte.

Procès jusqu'au 20 mars

Coopératif, Anthony ne nie pas les faits et détaille son modèle opératoire aux policiers. Placé quatre mois en détention provisoire à Meaux (Seine-et-Marne), il est retourné vivre chez ses parents sous contrôle judiciaire. Son procès, qui, en plus de lui et d'Aurélien, concerne six autres personnes, durera jusqu'au 20 mars.

Au total, 56 délits sont reprochés aux prévenus, dont la détention, mise en vente et vente de marchandises contrefaites, mais aussi l'importation de faux en contrebande, le blanchiment, la corruption active, ou encore l'aide au séjour irrégulier en facilitant la fourniture de fausses cartes d'identité. 

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