C'est la nouveauté du festival des Eurocks. Plus possible de se payer une bière ou acheter de la nourriture avec de l'argent liquide. Un système vite pris en main par les festivaliers. C'était l'un des derniers grands festivals en France à ne pas pratiquer ce type de paiement.
Le bouche à oreille est vite passé. A peine installés au camping, les festivaliers se pressent à l'espace "cashless". Il suffit de créer un compte sur l'application du festival pour créditer son compte. Le festivalier récupère ensuite le bracelet associé à son billet de festival. Il ne lui reste plus qu'à dépenser ses euros à la force du poignet.
"Je trouve plutôt ça bien, ça évite d'aller sur le site des Eurockéennes avec du liquide, c'est plus sécurisant" explique une jeune festivalière. Pour une autre, ce bracelet c'est une contrainte. "Mais on a pas le choix, il faut faire avec. Moi je préférais à l'ancienne, avec mon argent en liquide" nous dit-elle. "J'ai peur de dépenser plus que prévu" lance une autre, car c'est un peu comme le sans contact estime-t-elle, on ne voit pas ce que l'on dépense.
Sur le site du festival à quelques pas des scènes et des restaurants, un espace "cashless" composé de 30 caisses permet de charger, recharger, récupérer son bracelet avec une carte bancaire où le billet de 20 euros offert gentiment par vos parents.
Il y a deux ans pourtant, le festival des Eurocks ne semblait pourtant pas convaincu par le cashless. Interrogé par Télérama, Jean-Paul Roland, directeur des Eurockéennes expliquait : "On a évalué le budget : il nous en coûtait 100 000 euros pour imposer une technologie destinée à faire payer les gens, pour qu’ils puissent ensuite se payer des bières. C’est hors de question pour nous. »
Pourquoi le festival a-t-il décidé de passer au cashless ?
Le virage s'est décidé en 2018 selon Fred Adam responsable des partenariats aux Eurockéennes. De son bureau installé en face de l'étang de la Véronne, il confirme que le festival s'interrogeait de la pertinence à se lancer dans un tel projet.
"On est quasi le dernier festival à y être passé. C'est un énorme dispositif à mettre en place. Ca ne correspondait pas jusqu'à présent à des problématiques d'attente signalées sur les points de vente, bars ou restauration" explique Fred Adam. "En 2018, on a vu les limites du système, -je paye comme chez le boulanger-.... On avait une centaine de terminaux de paiement sur le site, il fallait gérér tout ce flux d'argent, le sécuriser. Là depuis l'arrivée du cashless, cela va beaucoup plus vite dans les bars, qui n'ont plus la responsabilité de gérer ces grosses sommes de liquide" explique t-il.
Cashless : les coulisses du système
Le système de cashless est mis en place par la société Weezevent qui commercialise déjà les billets des Eurockéennes mais aussi ceux du Hellfest et des Vieilles Charrues. Quand vous créditez votre bracelet, 1 euro de frais d'activation est reversé aux Eurockénnes afin de financer le système.Le festival estime que la mise en place du cashless lui coûte environ 2 euros par rechargement. "Le Crédit Agricole partenaire des Eurocks nous aide à financer le dispositif. Car mettre en place du cashless, cela implique des coûts, il faut du wifi, des investissements techniques, comptables" explique Fred Adam qui espère atteindre à la fin du festival une moyenne de 60% de festivaliers équipés de ce mode de paiement.
Le cashless : une manne financière de plus pour les festivals ?
A cette question, les Eurockéennes démentent vouloir faire de l'argent en plus grâce à ce système. Le festivalier qui n'a pas dépensé tout l'argent crédité sur son bracelet a, du 10 au 24 juillet, pour demander le remboursement de son crédit. Certains oublieront de le faire, et forcément, c'est de l'argent qui rentrera dans la caisse du festival. "Cet argent on a décidé qu'il restera sur nos comptes pour financer le projet Eurocks Solidaires" explique Fred Adam. Solidaire ou pas, c'est toujours du bénéfice qui rentre.
Du côté des commerçants, quelques bugs ont été signalés les premières heures du festival, mais le système fonctionne. "On est passé au cashless car on est convaincus qu'il faut vivre avec son temps. Et pour le confort des festivaliers, ça nous semble être un plus" estime Fred Adam, responsable des partenariats. Pour celles et ceux qui travaillent sur les stands, terminées les joies de rendre la monnaie en petite coupure dans le bruit des décibels à deux heures du matin.
Le système est entièrement informatisé. Tout est en ligne, ce que vous avez bu, consommé, mangé et à quelle heure ! De quoi se dire que vous festivaliers êtes suivis à la trace. Mais un gros avantage pour les points de vente. "Dans les bars, les régies savent ce qu'elles doivent ramener pour le lendemain en consommation" explique Fred Adam. Et dans le camping, le bracelet c'est aussi une sécurité. On peut aller prendre sa douche sans faire garder son portefeuille sous la tente par les copains !
La grande interrogation du cashless : fait-il vendre plus ? Pour l'instant le festival n'est pas en mesure de le dire. Les comptes seront faits ces prochains jours. « Oui, car les gens dépensent plus car ils ont l’impression de moins dépenser », reconnaissait Jean-Alexandre Janoray, patron de YuFlow, fournisseur en 2017 de la technologie cashless pour le festival Jazz à Vienne.