On a levé les mains. Souvent. On a fait "la la la la", pendant des plombes. On a pensé à Mandela, au Celtic de Glasgow, à l'écosse ouvrière et au temps qui passe. Sans rentrer dans la légende des Eurocks, le concert de Simple Minds aura simplement été un chouette moment de communion.
On va pas se mentir, au début on a eu peur. Il faut dire qu’il était 21h57. Et on pouvait traverser la plaine encore un peu verte mais plus trop et, sans soucis, approcher la Grande scène. Mais vraiment sans soucis. 500 mètres plus bas, à la Green Room, la fille à Higelin surchauffait la foule.
Et nous, on était presque mal à l’aise à l’idée, justement, d’être trop à l’aise. Aucun pied qui nous écrase, aucune goutte de bière qui déborde du camel bag. Arriver à 10 mètres du micro de Jim Kerr sans même avoir à dire : «pardon, pardon, pardon» ça vous fait craindre le four. Ou le gros coup de clim. Pour résumer : le bide, l’erreur de casting, pour des Eurocks trop «jeunes» désormais pour ces anciens du rock.
C’est nul la Loggia ! Moi je suis à Simple Minds !!
À côté de nous, casquette NY à l’envers, un Eurockéens de 20 ans sermonne son copain au téléphone. «Mais rejoins-moi à la Grande Scène, gros ! C’est nul la Loggia, moi je suis à Simple Minds !» Prends-toi ça, Ascendant Vierge.
Alors ça arrive un peu, des «Don’t you, forget about me» résonnent derrière nous. Encore des gars et filles de 20 ans. Mais des quinquas aussi. Pas mal de quinquas.
Comme on a un doute, on vérifie, sur l’appli, l’heure du début du concert. 22h45. On avait oublié que les horaires avaient changé suite à la défection de Foals. On est trop bête. On a honte. Un vrai simple d’esprit. Clignez des paupières.
22h45. La sono démarre «Lust for Life» d’Iggy Pop. On ouvre les paupières. La prairie des Eurocks est gentiment blindée. On est tellement heureux de s’être planté. «So may we start» des Sparks déboule. On se fait bourrer de partout.
C'est sur cette intro que Simple Minds déboule et... commence par la fin. Les six membres du groupe se mettent au milieu de la scène et comme à la fin d'un concert, se prennent par les épaules et saluent le public.
Jim Kerr s'empare du micro et s'écrie «montrez-moi vos mains !» L'intro de "Act of Love" résonne, la foule des Eurocks s'exécute.
«Merci à vous ! Ça va ?». «Let me see your hands!» nous ordonne tous les deux morceaux Jim Kerr. Le genre de gimmick un peu à l’ancienne, bien dans l’esprit des années 80. Mais le public ne se fait pas prier. Les anciens proposent un set vraiment carré, terriblement efficace. La foule n’a pas de mal à jouer le jeu. Charlie Burchill martyrise le vibrato de sa Fender rouge, puis celui de sa Gibson noire. Tandis qu’aux premiers rangs, les sourires des fans des premiers jours aux cheveux un peu gris sont affichés sur les écrans géants.
La veille, le groupe écossais emmené désormais par les fondateurs Jim Kerr, au chant, et Charlie Burchill, à la guitare, était à Munich. Pour cette tournée des quarante ans, Simple Minds semble simplement heureux d’être là, d’enchaîner les tubes et les morceaux préférés des fans. Un retour sur scène après plusieurs années en stand-by fêté par un nouvel single (Vision Thing) et l’annonce de leur prochain album.
La communion sur Mandela Day
Et puis, soudain, une voix de crooneuse résonne. La choriste Sarah Brown rejoint les quatre garçons et les deux filles (Cherisse Osei, une batteuse hyper précise lookée comme Tina Turner et la clavier Berenice Scott) sur Vision Thing. Le concert prend une autre épaisseur. Et la communion est totale pour «Mandela Day», un hymne encore plus émouvant en live.
«Show me your hands!» se répète Kerr. Et puis les tubes new-wave s'empilent les uns sur les autres pendant leur set d'une heure et demi. Le groupe aux 60 millions d'albums semble s'amuser. L'interaction avec le public reste assez basique. Même la présentation des musiciens (Ged Grimes à la basse et Gordy Goudie à la guitare rythmique) est assez timide. Mais toujours dans un bon esprit.
Et puis Cherisse Osei électrise la foule avec un break de batterie carrément béton. Là, on se dit que de toute façon, les filles qui ressemblent à Tina Turner, elles assurent.
Sur Someone Somewhere in Summertime, la foule lève les mains toute seule, même plus besoin de Jim. On se dit que ce morceau aurait pu être choisi dans un épisode de Stranger Things et que ça aurait été tant pis pour le retour en grâce de Kate Bush. Mais ça aussi c'est une autre histoire. Cela montre juste à quel point ces morceaux sont des hymnes générationnels.
La la la la, la la la la
Ça sent la fin. Retentit l'excellent morceau "See the light", tellement anglais, tellement bien.
Et puis arrive ce que tout le monde attend. Les deux notes de l'intro de "Don't you (Forget about me)" s'envolent au dessus du Malsaucy, la scène se pare de violet. Et Jim Kerr décide (mais il le fait à chaque date) de laisser le public faire les chœurs sur le refrain. On lève tous les mains. Même plus besoin de demander. "La, la la la, la la la la la la la "... Le groupe baisse le volume, laisse la foule chanter en boucle des dizaines et des dizaines de "la". Malicieusement, Jim Kerr regarde sa montre, indique qu'il est temps d'aller manger", avant de faire exploser le morceau. Un vrai bon moment.
"Allez je vous demande une dernière fois de lever les mains !" On veut bien, parce qu'arrive "Alive and kicking" et qu'on se demande si ce tube n'est pas encore plus un tube que les autres tubes du groupe. C'est l'heure de se dire au revoir. Une heure trente de show très bien rodé. Un peu lisse mais calibré pour passer un bon moment. On baisse les bras, on les a trop levés. Mais on a simplement adoré.