Rentable et même en pleine croissance, le groupe norvégien Marine Harvest ferme toutefois plusieurs sites en France, dont deux en Bretagne. La direction s'en explique par la nécessité de restructurer le secteur du bas de gamme, concurrencé par l'Europe de l'Est.
Dans le collimateur de ses salariés bretons ulcérés par la fermeture annoncée de sites, le norvégien Marine Harvest est le numéro un mondial du saumon, un secteur lucratif mais pas épargné par la crise économique. C'est ce que font savoir les dirigeant de ce groupe coté à la bourse d'Oslo. À première vue, tous les clignotants sont au vert: le groupe qui emploie 6.200 personnes dans 22 pays a décuplé son bénéfice net sur les neuf premiers mois de 2013, à plus de 150 millions d'euros, et son action a pris plus de 50% en un an.
Contrôlant environ un quart de la production mondiale de saumons de l'Atlantique, l'entreprise table encore sur une forte croissance de son activité l'an prochain. Mais ces chiffres cachent des réalités disparates. Si l'élevage de saumons dans les grands bacs immergés de Norvège, d'Écosse et du Canada se porte bien, d'autres activités comme la transformation tirent la langue. Chargée de transformer le saumon en France (le premier marché du saumon norvégien), au Benelux ou encore en Pologne, la filiale VAP Europe peine ainsi à atteindre l'équilibre financier.
Pour doper sa rentabilité, Marine Harvest a annoncé qu'il allait ramener de 13 à 8 le nombre de ses sites. Dont ceux de Poullaouen et Chateaugiron, situés sur ce créneau du bas de gamme. "On veut rester en France mais pour être compétitifs, on avait besoin de se restructurer", affirme une porte-parole du groupe, Siska Bourgeois. "Avec la crise, la consommation n'a pas augmenté dans les proportions espérées (...) et la consommation se concentre sur les produits un peu moins coûteux", explique-t-elle.
Délocaliser le bas de gamme
L'industrie de la transformation doit acheter ses saumons au cours du marché, même quand ses fournisseurs ont la même maison mère. Or les prix du poisson, sa matière première, sont en forte hausse. La stratégie de VAP Europe consiste donc à délocaliser la production bas de gamme, où la concurrence est vive. "S'agissant du montant et du rythme auxquels les entreprises de transformation peuvent répercuter la hausse de leurs coûts sur les distributeurs et, par ricochet, sur le consommateur, les marges de manoeuvre sont limitées", décrypte Kjetil Lye, analyste chez Handelsbanken."La transformation de poisson réclame pas mal de main d'oeuvre et, sur fond de coûts salariaux sensiblement plus élevés en Europe de l'Ouest qu'en Europe de l'Est, on observe depuis ces 10 ou 15 dernières années une montée en puissance des pays est-européens", souligne-t-il. Pour s'y implanter, Marine Harvest vient de gober le polonais Morpol, qui se présente comme le numéro un mondial de la transformation de saumon. Les activités haut de gamme devraient quant à elles rester en France, où VAP Europe conservera cinq sites.