Les greffes de rein, presque toutes arrêtées à cause de l’épidémie de Covid-19, vont être relancées en tenant compte de la situation de chaque région, selon l’Agence de la Biomédecine. Elles vont pouvoir reprendre notamment en Bretagne.
Raphaël Favier attend une greffe rénale depuis 3 ans. Il avait bon espoir d’être appelé avant l’été. Mais le Covid 19 a chamboulé le calendrier. Toutes les transplantations non vitales ont été interrompues. Trop risqué.
Elles vont recommencer à partir du 11 mai, notamment dans les régions moins touchées. La Bretagne sera l'une des premières à reprendre cette activité. "Il sera probablement plus difficile de faire repartir l'activté de greffes dans l’Est et l’Ile-de-France" explique le professeur Olivier Bastien, responsable des greffes et prélèvements d’organes et de tissus à l’Agence de Biomédecine.
Les CHU de Brest et Rennes pourront reprendre leur activité de greffes
Le professeur Yannick Le Meur, chef du service de néphrologie au CHRU de Brest et président de la Société francophone de transplantation, explique qu'un protocole de redémarrage est en cours de rédaction : "chaque centre de greffes est en train d’étudier la faisabilité de la reprise en fonction du contexte épidémique local et de la disponibilité des blocs opératoires et des lits de réanimation".
Ce qui reste à organiser également, c'est le transport des greffons. Dans cette période de déconfinement, il y aura moins de trains par exemple. Or 1 500 greffons "voyagent" en train chaque année.
Qui va pouvoir être greffé dès le 11 mai ?
Actuellement, Yannick Le Meur comme son homologue au CHU de Rennes Cécile Vigneau tentent de déterminer le facteur bénéfice/risque pour chaque patient. Il s'agit de savoir quels risques graves encourent les futurs greffés si par malheur ils étaient infectés.
Les facteurs de risques graves concernent, par exemple, les patients les plus âgés et ceux qui ont des antécédents de diabète ou de maladies cardio-vasculaires, mais aussi les patients qui présentent une obésité. Yannick Le Meur explique que les transplantations de ces patients seront probablement retardées. Ce qui sera également déterminant, c’est la façon dont le patient pourra se protéger une fois le déconfinement en place.
Raphaël Favier fera confiance aux soignants dont il ne cesse de louer la bienveillance, l’investissement et le professionnalisme.
Quant aux patients qui pourront être greffés, il faudra les convaincre, explique le professeur Vigneau. "On s’assurera que les tests des donneurs sont négatifs au Covid.
Pour les receveurs, on fera un test avant la transplantation pour s’assurer qu’ils ne sont pas porteurs du virus". Elle ajoute qu'ils seront hospitalisés dans un circuit distancié des patients Covid. "Aujourd’hui, dit-elle, l’hôpital est moins risqué que d’aller au supermarché".
Un retard impossible à rattraper
Cécile Vigneau sait aussi qu’il faudra négocier et prendre son tour avec les chirurgiens et les anesthésistes qui seront débordés, car toutes les opérations reportées depuis deux mois vont être reprogrammées. "On ne pourra pas rattraper le retard explique la cheffe de service, les patients attendront deux ou trois mois de plus, d'autant que l’hôpital va être très en tension à la reprise. Il va falloir reprogrammer et prioriser tout ce qu’on n'a pas fait pendant deux mois". Les discussions vont alors commencer dossier par dossier et les opérations reprogrammées, selon la disponibilité du bloc
Avis partagé par Olivier Bastien : "il y a toute une machine à remettre en marche pour les donneurs décédés et pour les donneurs vivants. Le redémarrage va se faire, mais ce n'est pas comme un bouton où on appuie et ça repart immédiatement". Le redémarrage nécessitera probablement plusieurs semaines.
La crainte d'une reprise de l'épidémie
En attendant, Raphaël Favier continuera ses dialyses trois fois par semaine et attendra peut-être encore quelques mois avant d’être greffé. Il restera confiné, le plus éloigné possible du virus. Il redoute un regain de l’épidémie avec le déconfinement et l’arrivée cet été de vacanciers, si les déplacements sont autorisés.
Ce que tous craignent, ce sont les phénomènes migratoires de l’été, "il va falloir être très vigilant sur ce point-là, prévient le professeur Le Meur, c’est une période à risques dans notre région jusqu’à présent très peu infectée donc très peu immunisée".