Comment l'épidémie de Covid-19 est-elle gérée en Bretagne? Stéphane Mulliez, le directeur de l'Agence régionale de santé, répond à nos questions.
- Pourquoi la Bretagne est-elle, pour l'heure, moins touchée que d'autres régions ?
- Stéphane Mulliez, directeur de l'ARS Bretagne : On est en décalage par rapport au Grand Est et à l’Ile de France. Mais on aura prochainement une augmentation de l’activité, on l’observe déjà grâce à toute une batterie d’indicateurs. Comme on est en décalage, on sera peut-être en partie, épargnés. On peut aussi espérer que, les mesures de confinement strictes, liées aux cas dans le Morbihan, portent leurs fruits et ralentissent la propagation du coronavirus. Et que les mesures barrières, les mesures de distanciation sociales sont bien appliquées dans la région. Tout cela participe au freinage de l’épidémie.
- Que pensez-vous du volontarisme des soignants bretons pour aller aider leurs collègues des zones critiques?
- Ils sont les premiers acteurs de la solidarité. Ils sont volontaires, je tiens déjà à les féliciter. Aujourd’hui, environ 70 professionnels bretons participent à l'effort en Île de France. Des médecins, des infirmiers, des infirmiers anesthésistes… qui n’hésitent pas à prendre le train pour partir aider.
- Et dans le même temps, nos hôpitaux reçoivent des patients. Comment cela est-il décidé ?
- On regarde cela quotidiennement pour savoir ce que l’on peut faire, en lien avec le ministère qui régule ce dispositif de transfert entre les régions. Et la Bretagne est au coeur de ce mouvement de solidarité nationale. Six patients ont été accueillis mercredi dernier par avion dans le Finistère. Trente-six patients ont été admis hier dans les hôpitaux de Saint-Brieuc, Rennes et Brest. Et aujourd’hui, deux transferts sont en cours d’organisation vers les régions voisines de la Normandie, du Centre Val de Loire et des Pays de la Loire.
Interviews : Nicolas Ferrière, Chef de clinique-service de réanimation
et Gwenaël Prat, Médecin réanimateur
recueillies par Claire Louet et Gwenaëlle Bron
Bien sûr, il n’est pas question de saturer nos capacités. Concernant nos lits de réanimation, nous sommes à un taux d’occupation de 60%. Nous pouvons donc poursuivre l'effort tout en gardant des possibilités d’accueil pour les patients bretons.
Interview : Philippe El Saïr, Directeur Général du CHRU de Brest
recueillie par Claire Louet et Gwenaëlle Bron
- Parmi les questions autour de cette épidémie, il y a celle des tests. Quelle est la politique à ce stade ?
- Jusqu’ici, nous faisons des tests de virologie au niveau des laboratoires, publics et privés, qu’on appelle des tests PCR. Nous priorisons ces tests pour les soignants et les malades hospitalisés, car nous ne sommes pas en capacité de diagnostiquer tout le monde.
Il y a aussi ces tests qui doivent permettre de diagnostiquer plus vite. Une entreprise d’Ille-et-Vilaine a ainsi proposé un test rapide. Il a bénéficié des normes CE donc, du point de vue médical, son fonctionnement est validé. Des échanges sont en cours avec le ministère pour étudier son déploiement. Je salue là l’innovation bretonne. Et nous espérons pouvoir mobiliser ces tests lorsque nous serons dans une autre phase de l’épidémie.
- La question des masques reste épineuse. Comment l'Agence régionale de santé gère-t-elle les stocks?
- 2,5 millions de masques ont pour l’heure été mobilisés en Bretagne. Grâce aux dons, on a aussi récupéré 600 000 masques auprès d’entreprises, de collectivités ou encore de l’Education Nationale, par exemple. Mais c’est vrai qu’il y a eu de grosses difficultés, qui ne sont pas encore aplanies. Dans nos cellules logistiques, vingt personnes travaillent pour répartir au mieux les masques dans les établissements.
Les commandes passées à l'étranger par les départements bretons doivent aussi arriver.
- La chloroquine est-elle utilisée en Bretagne ?
- Seulement dans les hôpitaux, et je ne sais pas dans quelle proportion. Il faut rappeler que, pour l’instant, on est dans le stade des essais cliniques. En revanche, un médecin généraliste ne peut pas prescrire cette molécule.
- Quel âge ont les victimes en Bretagne ?
- Nous n'avons de données précises que sur les personnes hospitalisées. Les patients atteints ont de zéro à 101 ans.
La moyenne d’âge des patients décédés est de 82 ans. La plus jeune victime en Bretagne était âgée de 60 ans, et la plus âgée, de 97 ans.
- Quant aux Ehpad, les décès y sont-ils désormais comptabilisés ?
- On est en train de mettre en place un système de comptage. Un indicateur « sentinelle » qui va permettre d’avoir une estimation plus précise de la propagation du virus dans ces établissements.