Breton d'adoption, Frédéric Lemoine est conseiller municipal d'opposition à Dinard. Ancien Secrétaire général adjoint de l'Elysée auprès de Jacques Chirac, il coordonne désormais le programme de Valérie Pécresse. Il prône de l'ambition mais aussi du réalisme notamment sur les dossiers des éoliennes et de la décentralisation. Entretien
Vous êtes le coordinateur du projet présidentiel de Valérie Pécresse, la candidate LR. Vous avez un rôle clé dans sa campagne, en quoi consiste précisément votre mission ?
Valérie et moi on se connaît depuis 30 ans. Depuis quatre ans, je suis engagé politiquement auprès d'elle au sein de son mouvement "Libres". A moi de lui faire remonter des idées mais aussi de réagir à ses demandes car c'est quelqu'un de très créatif. Nous avons déjà les grandes lignes d'un programme disponible depuis novembre sur notre site www.valeriepecresse2022.fr. Mais il a vocation à être encore enrichi. Nous sommes encore en phase de dialogue avec la société civile.
Enarque et dirigeant dans de grandes entreprises. Vous avez fait de nombreux allers retours entre le service de l'Etat et le secteur privé. Lequel de ces deux parcours est le plus utile pour votre candidate aujourd'hui ?
J'ai été 20 ans chef d'entreprise. Indéniablement, cette expérience m'a marqué. Mais je crois surtout que les sphères du privé et du public s'ignorent encore trop dans notre pays. Dans le privé, on pense que le public est inefficace. Dans le public, on estime souvent que les artisans de création de richesses ne pensent qu'à se faire de l'argent.
Dans les enquêtes d'opinion, Valérie Pécresse apparaît dynamique, courageuse mais beaucoup de personnes interrogées ne la voient pas encore dans les habits de Présidente de la République. Comment expliquez-vous cela ?
Valérie Pécresse a encore un déficit de notoriété dans certaines régions. Même si depuis juillet, nous avons entamé un grand tour de France. En fait en France, on a du mal à imaginer ce qui n'est pas. Il y a encore six ans qui voyait Emmanuel Macron, chef de l'Etat ?
Le slogan de votre candidate c'est "Faire avant de plaire". Il n'empêche pour gagner une élection il faut aussi séduire. Une élection présidentielle c'est aussi la rencontre d'une personnalité avec un peuple, non ?
Oui c'est vrai. Mais ce qui me plaît avant tout chez Valérie c'est sa culture du résultat. Moi ce qui m'intéresse c'est que quelqu'un sache où la France doit aller. Valérie Pécresse cherche surtout comment elle exercera le pouvoir. Nous sommes déjà à préparer les premières mesures qui lanceront le nouveau quinquennat.
Son début de campagne est très marqué à droite. Notamment en Bretagne, ne craignez-vous pas de vous éloigner de l'électorat modéré également séduit par Emmanuel Macron ?
Sur les questions de l'écologie et de l'éducation, Valérie Pécresse a un programme qui parle beaucoup à l'électorat centriste. D'ailleurs ce n'est pas pour rien qu'Hervé Morin, le président centriste de la Région Normandie a rejoint notre équipe de campagne.
En fait, Valérie Pécresse comme Emmanuel Macron sont les incarnations de partis de gouvernement raisonnables. Mais il y a une grosse différence entre ces deux personnalités. Valérie est depuis 20 ans élue locale, elle connaît la réalité des difficultés des français. Ce n'est pas le cas pour le chef de l'Etat.
Le dossier des éoliennes de la Baie de Saint-Brieuc s'invite dans la campagne présidentielle. La semaine dernière, en visite à Erquy, Marine Le Pen a annoncé qu'elle abandonnera le projet si elle est élue. Et Valérie Pécresse ?
Je ne pense pas que l'avenir d'un projet local comme celui-là doit être décidé par le Président de la République. La présidence verticale, "jupitérienne" que nous reprochons justement à Emmanuel Macron, nous n'en voulons pas.
J'ai accompagné Valérie Pécresse lors de sa venue à Saint-Quay-Portrieux dans les Côtes d'Armor. Nous avons rencontré Alain Coudray, le président du comité départemental des pêches.
Nous comprenons le désarroi des pêcheurs devant un projet qui a dérapé et qui n'a pas été bien géré par Iberdola. Mais il y a encore des recours en justice et des discussions.
Et puis il faut rappeler le contexte. La Bretagne est une péninsule qui a subi des coupures d'électricité. On va avoir 400 000 habitants de plus d'ici 2040. Il va falloir atteindre la neutralité carbone d'ici 2050. Et notre Région n'a pas voulu de l'énergie nucléaire. Donc il faudra des énergies renouvelables, notamment de l'éolien off-shore.
En revanche, il faut que les parcs soient plus éloignés des rivages. Pour l'éolien terrestre, il faut que les collectivités puissent refuser les projets quand elles ne les souhaitent pas.
Votre programme prévoit une grande loi de décentralisation. Concrètement cela donnerait quoi ?
Cela va être un axe très fort de notre campagne ces prochaines semaines. Par exemple, on pense que les régions peuvent prendre la présidence des agences régionales de santé. On pense qu'il faut démanteler Pôle Emploi pour donner aux régions les compétences de la formation et du développement économique.
On en a assez de cet état centralisateur et impuissant. Il doit se recentrer sur la protection, la santé, l'éducation. Il faut réorganiser les compétences et stopper aussi la croissance des moyens que les collectivités ont engendré.
Vous avez été longtemps un homme de l'ombre en politique. Vous êtes désormais un peu plus dans la lumière. Depuis deux ans vous êtes conseiller municipal à Dinard, vous êtes aujourd'hui en quelque sorte avec la conseillère régionale Isabelle Le Callennec et la sénatrice Muriel Jourda, un porte parole de Valérie Pécresse. A l'avenir, vous souhaitez être plus présent sur la scène politique bretonne ou nationale ?
Certes, je suis très attaché à la Bretagne depuis mon enfance. J'y ai une une maison depuis 25 ans.
Mais pour l'instant, je suis à fond engagé dans la campagne présidentielle. Je ne pense qu'à cela. Je ne fais surtout pas de plans sur la comète !
Frédéric Lemoine est l'invité de "Dimanche en politique"
Dimanche 23 janvier à 11h25 sur France 3 Bretagne